J'ai rappelé tout à l'heure le travail, assez efficace, me semble-t-il, qui a été accompli à Marseille au cours des dernières années. Il se double aujourd'hui d'un effort de réinvestissement des services de l'État. Si l'on se contente de démanteler les réseaux ou les gangs, le terme lui-même important peu, ils se reconstituent assez vite dès lors que tout le monde ne reprend pas sa place dans la cité.
La question n'est pas nécessairement de construire des commissariats. J'en ai connu un, situé dans une zone particulièrement sensible, que les policiers s'efforçaient d'abord de défendre… Le véritable enjeu est de faire en sorte qu'il y ait davantage de forces de police sur le terrain. On doit voir dans les rues des policiers qui ne s'y rendent pas à titre exceptionnel. Dans un certain nombre de cités sensibles, nous avons aussi réalisé un travail groupé avec l'ensemble des services de l'État, ceux relevant du ministère de l'intérieur mais aussi Tracfin, pour procéder à des saisies et ainsi taper là où ça fait mal, c'est-à-dire au portefeuille. Il faut par ailleurs réinvestir au niveau social.
Si je peux m'inspirer de mon expérience à la mairie et à la métropole de Lyon, nous devons peut-être aussi recréer de la mixité sociale dans les territoires. Là où 80 % des habitants vivent d'allocations sociales, je ne pense pas qu'il puisse vraiment y avoir un équilibre profond. Dans des communes telles que Vaulx-en-Velin ou dans des quartiers sensibles de Lyon tels que La Duchère ou Mermoz, où nous avons mené des opérations de rénovation urbaine, le problème n'est pas tant l'architecture ou l'urbanisme que la restauration de la mixité sociale. Il faut ramener des couches moyennes à des doses qui ne doivent pas être homéopathiques, mais aussi réaliser 30 % de logements sociaux dans des opérations de grande ampleur telles que celle de La Confluence. Cela change évidemment la donne. La régulation sociale se fait par elle-même dans les quartiers où l'on crée 30 % de logements sociaux : les voisins s'en chargent en général, alors qu'ils prendraient de grands risques à le faire là où tout le monde est en perdition.
Il faut donc traiter les problèmes en profondeur, ce qui suppose toute une série de réformes dont nous aurons peut-être à débattre dans le cadre d'une discussion sur les institutions de nos collectivités locales. J'ai toujours pensé qu'une politique d'urbanisme équilibrée ne pouvait être mise en oeuvre que sur un vaste territoire ; c'est la seule manière de changer véritablement les choses.