Vaste sujet que celui des politiques de la France au Sahel. En tant que corapporteure, avec Sereine Mauborgne, de la mission d'information de la commission de la défense nationale et des forces armées sur l'opération Barkhane, je me dois d'abord d'évoquer notre action militaire. Car, au Sahel, la France est d'abord présente militairement : depuis huit ans, nos forces y luttent contre les groupes armés terroristes qui sévissent dans la région, déstabilisent les États, meurtrissent les populations et entendent constituer des sanctuaires djihadistes où répandre leur idéologie mortifère.
Avec l'opération Serval, la France a stoppé net l'avancée de djihadistes qui menaçaient Bamako. Depuis 2014, elle lutte, aux côtés des forces partenaires locales et internationales, contre un ennemi qui ne cesse de s'adapter à notre mode d'action et qui parvient à subsister en profitant des fragilités structurelles de certains États sahéliens et de leurs défaillances. Pourtant, s'il y a bien une chose dont on ne peut douter, c'est que notre intervention militaire au Sahel obtient des résultats car, depuis 2014, Barkhane a changé de visage, et les efforts consentis ont porté leurs fruits. C'est particulièrement vrai depuis le sommet de Pau, qui a permis d'engager une nouvelle dynamique militaire : les groupes armés terroristes ont été durablement frappés grâce à des opérations de plus grande envergure, comme Bourrasque ou Éclipse, ainsi que par la neutralisation de nombreux leaders. Ces succès, nous les avons collectivement remportés malgré les caveats de certains de nos partenaires internationaux et les contraintes humaines et capacitaires qui pèsent sur les forces locales.
La lutte contre les groupes armés terroristes n'est, en effet, pas le seul fait de la France. Elle mobilise aussi nos partenaires européens, dont on pourrait espérer encore davantage d'implication, madame la ministre – Jean-Louis Thiériot y reviendra avec une question – , ainsi que notre allié américain, dont nous aimerions que vous nous détailliez les intentions dans la zone, et les forces locales, individuellement et dans le cadre de la force conjointe du G5 Sahel. Leur montée en puissance est, d'ailleurs, l'un des plus grands défis, car la France n'a évidemment pas vocation à rester éternellement engagée au Sahel. C'est aux forces sahéliennes qui convient d'assurer la sécurisation des territoires. Dans cette perspective, les armées françaises réalisent également des opérations de formation : c'est aussi cela, la politique de la France au Sahel. Au Mali, il y a quelques mois, j'ai été marquée par mes échanges avec un capitaine des forces armées maliennes à la tête d'une des unités légères de reconnaissance et d'intervention – ULRI – que les armées françaises ont contribué à former. Au Niger, j'ai pu constater, en visitant le poste de commandement de la force conjointe, que les choses avançaient dans le sens d'une coopération plus approfondie.
C'est pourquoi je suis convaincue que l'heure n'est pas à la réduction de nos efforts mais, au contraire, à leur intensification. Celle-ci ne doit pas seulement porter sur notre action militaire ; elle doit aussi porter sur les politiques de développement. C'est un autre volet des politiques de la France au Sahel.
Dès lors, comment ne pas se féliciter de l'adoption, avant-hier, par notre assemblée, à l'unanimité ou presque, du projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales ? S'exprimant au nom du groupe Les Républicains, notre collègue Bérengère Poletti relevait qu'enfin, ce texte permet de répondre aux exigences de transparence ; elle ajoutait que les Français sont en droit d'avoir l'assurance que les moyens donnés par la France ne seront pas détournés par la corruption. Gageons, monsieur le ministre, qu'avec la transparence, les pays que nous soutenons et où nos soldats payent le prix du sang investiront pour un retour de l'État sur leur territoire, offrant à leur population un accès à l'éducation, à l'eau, aux soins et à la justice, définiront des projets qui leur garantiront le développement et trouveront leurs propres solutions aux enjeux climatiques, démographiques et économiques. Du moins, c'est ce que nous espérons : c'est en effet pour permettre d'atteindre ces objectifs que nos soldats combattent au Sahel, et je leur renouvelle ici le soutien et la confiance des députés du groupe Les Républicains.
Pour finir, je souhaite, monsieur le ministre, que vous nous exposiez plus avant la stratégie – j'insiste sur le mot « stratégie » – de la France en matière d'aide au développement au Sahel et la manière dont vos deux ministères coopèrent pour faire de l'approche 3D autre chose qu'un slogan politique.