Monsieur le président, monsieur le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, madame la présidente de la commission des lois, mes chers collègues, le projet de loi organique relatif à l'élection du Président de la République a été adopté par notre assemblée en janvier dernier puis par le Sénat en février, à une très large majorité.
La commission mixte paritaire qui s'est réunie la semaine dernière est parvenue à conclure un accord, dans un esprit de dialogue ouvert et constructif, ce dont s'est félicitée en particulier la présidente de notre commission. Je me réjouis qu'un consensus parlementaire ait pu émerger dans une perspective transpartisane. Ce résultat témoigne d'une véritable convergence de vues sur un texte qui, compte tenu de ses dispositions, présente un caractère que l'on peut qualifier de technique.
Il vise en effet essentiellement à actualiser certaines dispositions de la loi organique du 6 novembre 1962 relative à l'élection présidentielle au suffrage universel, en apportant des précisions sur la date de publication du décret de convocation des électeurs et les modalités de la procédure de parrainage des candidats.
Il autorise par ailleurs le vote par correspondance des personnes détenues, une grande et notable nouveauté en la matière, qui représente une réelle avancée, que je tiens ici à saluer.
Conformément à la loi relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique du 27 décembre 2019, il prévoit la déterritorialisation des procurations. Autrement dit, pour voter par procuration, il ne sera pas obligatoire de se rendre dans la commune dans laquelle vote la personne qui a donné procuration. Il procède aussi à l'adaptation de dispositions relatives aux listes électorales consulaires et au vote des Français de l'étranger.
Le caractère technique de ce projet de loi organique a été quelque peu altéré, monsieur le ministre délégué, par le dépôt d'un amendement gouvernemental lors de son examen en séance publique par le Sénat. Je sais que vous avez l'esprit suffisamment ouvert pour écouter les quelques réflexions acides que je vais formuler à ce sujet.
Cet amendement, qui visait à introduire un vote anticipé sur des machines à voter, a suscité de fortes réactions, ce qui a logiquement conduit à son rejet. Sans préjuger du fond de la question, je regrette que cette proposition de dernière minute ait ouvert un débat sur un enjeu d'une aussi haute importance dans des conditions qui ne pouvaient, compte tenu de l'état d'avancement de l'examen parlementaire, être pleinement satisfaisantes – l'Assemblée nationale n'avait alors même pas été consultée.
Je suis pourtant convaincu qu'une réflexion parlementaire de grande ampleur pouvait être menée et qu'elle devra l'être au cours des prochaines années afin de moderniser les règles relatives aux opérations électorales avec l'objectif de garantir non seulement une augmentation du nombre de votes, mais d'abord et surtout la sécurité et la sincérité du scrutin.
Le Sénat a apporté quelques modifications au projet de loi organique. Je pense notamment à l'article 1er bis qui précise de façon opportune que « les candidats veillent à l'accessibilité de leurs moyens de propagande électorale aux personnes handicapées ».
Le Sénat a également décidé de raccourcir de trois mois la durée de la période de financement qui, dans le texte adopté par notre assemblée et conformément au droit commun, s'étendait sur douze mois à compter d'avril 2021.
L'intention de nos collègues sénateurs était d'éviter le chevauchement de deux périodes de financement de campagne électorale, en l'occurrence, d'une part, celle des élections départementales et régionales, reportées à juin 2021, et de l'autre, celle de la campagne présidentielle. Chacun imagine bien ce qui pourrait se passer dans un tel cas de figure et conviendra, eu égard à certaines procédures actuelles, qu'il faut faire extrêmement attention.
Bien que ce chevauchement ne pose pas, a priori, de problèmes insurmontables, la commission mixte paritaire – a décidé de retenir la position du Sénat sur ce point afin de faciliter et de rendre plus lisible le contrôle du financement des campagnes électorales.
L'exigence de sincérité du scrutin, sur laquelle j'insiste fortement, repose sur la confiance des citoyens dans les opérations électorales au cours de périodes difficiles. Je sais, bien sûr, que la confiance seule ne saurait suffire et n'exclut donc pas le contrôle. L'une et l'autre doivent ainsi se conjuguer afin de préserver l'exercice du droit de suffrage, qui constitue le pilier essentiel de notre démocratie, je dis bien « essentiel » – je relisais à ce propos, il y a quelques instants, De oratore dans lequel Cicéron met l'accent sur les grandes phases de l'analyse du mode de scrutin. Cette remarque vaut a fortiori pour l'élection du Président de la République, véritable clef de voûte de nos institutions.
C'est précisément dans cet esprit que je forme le v? u que le texte adopté par la commission mixte paritaire la semaine dernière à l'unanimité – il faut le souligner – soit aujourd'hui adopté par notre assemblée, je l'espère à une très forte majorité voire à l'unanimité, ce qui serait à l'évidence la marque d'une démocratie encore plus forte.