Intervention de Émilie Guerel

Séance en hémicycle du mardi 9 mars 2021 à 15h00
Article 1er de la constitution et préservation de l'environnement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉmilie Guerel :

Nous sommes aujourd'hui réunis pour examiner le projet de loi constitutionnelle complétant l'article 1er de la Constitution et relatif à la préservation de l'environnement. Composé d'un article unique, ce projet de loi constitutionnelle a pour but d'inscrire au premier alinéa de l'article 1er de la Constitution le principe selon lequel la France garantit la préservation de la biodiversité et de l'environnement, et lutte contre le dérèglement climatique. Il reprend, en termes quasiment identiques, une proposition issue du rapport du 21 juin 2020 de la Convention citoyenne pour le climat.

En avril 2019, le Président de la République a en effet annoncé la constitution d'une Convention citoyenne pour le climat. Expérience démocratique inédite en France, cette Convention citoyenne, composée de 150 Françaises et Français tirés au sort, a eu pour ambition de relever le défi climatique en partant des attentes des Français en matière de transition écologique et de participation à la décision publique. Elle a permis de donner la parole aux citoyennes et aux citoyens pour accélérer la lutte contre le changement climatique.

À l'issue de neuf mois de travaux, 149 propositions ont été retenues et, lors de la session du 21 juin 2020, 81 % des membres de la Convention se sont prononcés en faveur de celle consistant à modifier l'article 1er de la Constitution afin de renforcer la responsabilité de la France en matière environnementale ; par ailleurs, 85 % d'entre eux se sont déclarés favorables au projet d'un référendum constituant.

Le 14 décembre 2020, le Président de la République les a reçus et, à cette occasion, il s'est engagé à mettre en oeuvre cette proposition phare, fruit de leur travail collectif. Il a alors proposé aux Françaises et aux Français de réviser la Constitution du 4 octobre 1958 afin d'y inscrire avec force l'engagement du pays en faveur de l'environnement et de la lutte contre le réchauffement climatique et s'est engagé à leur soumettre par référendum le projet de loi constitutionnelle selon les modalités définies à l'article 89 de la Constitution.

Si la Charte de l'environnement mentionnée dans le préambule de la Constitution a déjà permis de faire entrer l'enjeu environnemental dans le bloc de constitutionnalité, il apparaît aujourd'hui indispensable de renforcer la responsabilité de la France en matière environnementale, en introduisant un principe d'action positif, applicable et opposable aux pouvoirs publics nationaux et locaux. Ces derniers devront garantir la préservation de la biodiversité et de l'environnement et lutter contre le dérèglement climatique. Cette mention dans notre Constitution a pour objet et pour effet de hisser l'objectif à valeur constitutionnelle de préservation de l'environnement au rang de principe à valeur constitutionnelle.

Cette élévation rééquilibrera, sans lui porter préjudice, la nécessaire conciliation de la protection de l'environnement avec les principes constitutionnels. Elle complétera aussi utilement la Charte de l'environnement en traitant de la question du dérèglement climatique. Ainsi, après la proclamation libérale dans la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 des droits naturels, inaliénables et sacrés de l'homme, et la reconnaissance dans le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 des droits économiques et sociaux, cette réforme vise à entériner dans notre loi fondamentale la dimension écologique de notre contrat social.

La Constitution française a été rédigée à une période où les problèmes environnementaux n'avaient pas encore été parfaitement identifiés. De ce fait, elle ne comporte pas de dispositions spécifiques à l'environnement, contrairement aux deux tiers des constitutions des États membres de l'Union européenne, adaptées ou révisées par la suite. En effet, plus de 150 constitutions dans le monde comportent des dispositions relatives à l'environnement : c'est le cas des constitutions de la Suisse, de l'Italie, de l'Espagne, ou encore de la loi fondamentale allemande.

J'ai entendu les réserves exprimées par certains de mes collègues lors de l'examen du texte en commission des lois, notamment au sujet de l'utilisation du verbe « garantir », du principe de non-régression ou encore de la notion de dérèglement climatique. Dans le prolongement des travaux de la commission, les débats en séance publique permettront, j'en suis convaincue, de lever quelques doutes légitimes et d'apporter d'utiles éclairages. En la matière, je sais pouvoir compter sur les lumières de M. le ministre et de MM. les rapporteurs.

Le caractère prioritaire de la cause environnementale, l'un des enjeux, si ce n'est l'enjeu le plus fondamental auquel l'humanité est aujourd'hui confrontée, justifie qu'elle figure en bonne place dans l'article 1er de la Constitution, où sont posés les principes et valeurs qui organisent notre vivre-ensemble. Telles sont les raisons pour lesquelles les députés du groupe La République en marche apporteront leur concours plein et entier à cette réforme constitutionnelle. Mes chers collègues, cette révision constitutionnelle est un acte fondateur. Le moment est venu de le concrétiser et nous y sommes prêts.

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