Intervention de Stéphane Bredin

Réunion du mardi 21 novembre 2017 à 17h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Stéphane Bredin, directeur de l'administration pénitentiaire :

Je ne pense pas qu'il revienne au directeur de l'administration pénitentiaire de discourir sur la césure entre le peuple et la justice. Pour ma première audition devant l'Assemblée, je vais rester dans mon rôle car j'aimerais que mon mandat ne s'achève pas dès demain. (Sourires.)

Monsieur Masson, vous avez cité un article du Figaro du 14 novembre dernier ; la dépêche de l'AFP qui s'en est suivie était plus équilibrée. Que faut-il retenir du travail que nous avons fait pendant la dernière année ? Sans pratiquer la langue de bois administrative, je pense que l'on n'a jamais avancé aussi vite dans la préparation d'un programme immobilier. Le Président de la République a rappelé que l'objectif était de construire 15 000 places.

La première étape – celle dans laquelle se sont perdus nombre de nos prédécesseurs – est de trouver des terrains. Le besoin social de prisons, exprimé par beaucoup de nos concitoyens, est relayé dans de nombreux discours nationaux. Cependant, il y a un écart manifeste entre cette expression et l'adhésion objective des élus des collectivités territoriales et des futurs riverains d'établissement pénitentiaire. Pour avoir travaillé au ministère de l'intérieur, je peux vous dire que l'on est moins bien accueilli quand on annonce un projet de construction de prison que quand il s'agit d'implanter une gendarmerie ou un commissariat.

Comme je le disais dans mon propos introductif, il n'y a pas de parole institutionnelle sur la prison. On n'a pas de discours construit sur la réalité des nuisances des établissements pénitentiaires, ni sur le soin apporté à leur architecture pour en limiter l'impact sur l'environnement immédiat, ni sur les retombées économiques dont bénéficient les départements moins urbanisés. Pour Nice et Lille, l'arrivée d'un établissement de 600 places – et quelques créations d'emplois à la clef – aura des répercussions assez négligeables. En revanche, pour d'autres agglomérations, une telle implantation peut avoir des effets très notables.

Au cours de l'année écoulée, nous avons lancé la recherche de terrains d'une superficie de cinq à quinze hectares pour construire des maisons d'arrêt de 400 à 600 places dans trente-trois agglomérations, sans compter les terrains qui doivent accueillir les seize QPS. Très volontaristes, des préfets nous ont fait des propositions et nous sommes en phase d'expertise d'études de faisabilité sur bon nombre de localisations. Les difficultés habituelles demeurent en Île-de-France et dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) où le foncier est rare et extrêmement cher. La charge foncière y est importante pour l'administration pénitentiaire. Dans ces milieux hyperurbanisés, les élus acceptent d'autant moins ce type d'établissements qu'ils ont des projets de valorisation économique bien différents de ceux de l'administration pénitentiaire.

Dans ces territoires, nous recherchons essentiellement à mobiliser du foncier public. Or celui-ci est réclamé pour des hébergements d'urgence, des logements sociaux, des projets de valorisation économique, etc. Il y a une concurrence entre les différentes administrations pour la mobilisation du foncier public. Lorsqu'elle présentera le projet de loi de programmation pour la justice au Parlement, la ministre fera des annonces. Pour ma part, je note que le volontarisme des préfets a vraiment porté ses fruits, y compris dans ces régions difficiles. Mercredi dernier, j'ai rencontré les préfets d'Île-de-France. Ils ont presque tous, dans leur département, des propositions techniques à nous faire. Nous allons pouvoir en discuter avec les collectivités dans les semaines et les mois à venir. J'aurais plutôt cette vision optimiste des choses.

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