Soyons réalistes, nous ne pourrons résoudre en cinq ans la question de la surpopulation carcérale, qui a longtemps été un serpent de mer politique. S'il est indispensable de construire des établissements afin de soulager les maisons d'arrêt saturées, nous savons que l'enjeu de la surpopulation carcérale ne se résume pas à une question immobilière. Elle aussi liée à l'augmentation de la population pénale.
La loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice enrichit et rationalise le pénal et revoit l'échelle des peines afin d'apporter une réponse à l'inflation du nombre de détenus et à la surpopulation en prison. Mais elle ne peut remédier à elle seule à des années de désintérêt politique pour cette question.
Il était également indispensable de répondre rapidement aux conditions indignes de détention grâce à un autre levier d'action : c'est l'objet de cette proposition de loi. Elle vient après plusieurs décisions de justice récentes de la Cour européenne des droits de l'homme, de la Cour de cassation et du Conseil constitutionnel, qui ont constaté que la France n'est pas en mesure de garantir en toutes circonstances des conditions de vie suffisamment dignes en établissement pénitentiaire. Il nous incombe d'y remédier en garantissant aux détenus la possibilité de saisir le juge pour mettre un terme à ces atteintes à la dignité humaine. Si nous légiférons aujourd'hui pour instaurer ce recours, il est regrettable, comme l'a souligné ma collègue Laurence Vichnievsky en commission, que n'ayons pas pris les devants il y a longtemps.
Mes chers collègues, la procédure prévue par la proposition de loi est compréhensible et mesurée. À la suite d'un signalement d'un détenu, le texte prévoit d'abord l'intervention de l'administration pénitentiaire, qui formulera ses observations au juge saisi, lequel sera différent suivant que la personne se trouve en détention provisoire ou exécute sa peine. Si les conditions indignes de détention sont confirmées, l'administration pénitentiaire devra y remédier dans un délai d'un mois. À défaut, le juge pourra ordonner le transfèrement du détenu, sa mise en liberté immédiate ou un aménagement de peine.
Le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés est convaincu que cette procédure apportera de la lisibilité et une plus grande réactivité. C'est pourquoi nous voterons cette proposition de loi. La France, pays des droits de l'homme, ne peut infliger plus longtemps un traitement indigne à ses détenus ni, par voie de conséquence, à ses personnels pénitentiaires.