Nous sommes réunis aujourd'hui pour débattre de l'action de la France dans le domaine des NBIC – nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives – à la lumière de la compétition stratégique sino-américaine. En effet, la dynamique géopolitique entre la Chine et les États-Unis structurera le Grand Jeu des nations pour les trente prochaines années. Nous en voyons d'ailleurs d'ores et déjà des illustrations sur les plans diplomatique, commercial, et parfois même militaire.
Pour commencer, je voudrais remercier le président du groupe Agir ensemble, Olivier Becht, d'avoir choisi d'inscrire ce thème à l'ordre du jour et de m'avoir proposé d'intervenir pour indiquer la position de notre groupe.
Durant la seconde moitié du XXe siècle, l'ère de la révolution de l'information a été marquée par la convergence des technologies de l'information, donnant naissance à une série de disciplines scientifiques, de processus industriels, et de services. Internet, par exemple, dont chacun ici mesure bien les conséquences dans sa vie quotidienne, est né de cette convergence. De même, la recherche sur le génome humain, qui continue de progresser, est issue de la convergence entre la biologie et les technologies de l'information. En effet, si le décryptage du génome a été rendu possible par l'augmentation de la puissance de calcul, la communauté des technologies de l'information, à l'inverse, s'est inspirée des avancées de la biologie, inventant les réseaux neuronaux, l'intelligence en essaim et les ordinateurs à ADN.
L'émergence rapide des sciences cognitives a entraîné une interaction croissante entre les sciences du vivant, l'informatique et l'ingénierie, puis a donné un nouveau souffle à l'intelligence artificielle et à la robotique.
Nous le voyons, les avancées technologiques permises par la convergence des NBIC provoquent des effets de rupture sans précédent. Elles offrent autant d'occasions pour le stratège visionnaire que de risques pour celui qui, par crainte ou par manque d'ambition, reste en retrait de la marche du monde.
Il est parfois difficile de cerner les enjeux de technologies aux effets de rupture si importants. La fiction prend alors le pas sur la réalité. À cet égard, notre imaginaire collectif est foisonnant : de Terminator, le robot tueur émancipé de la tutelle de l'homme à la Matrice – l'intelligence artificielle exploitant l'homme pour en faire une source d'énergie – , en passant par Hulk, supersoldat incontrôlable au génome modifié, ces références issues de la culture populaire sont pour nous, décideurs politiques, riches d'enseignements sur la perception des ruptures technologiques.