Intervention de Mireille Clapot

Séance en hémicycle du vendredi 26 mars 2021 à 9h00
Place de la france face à la révolution des nbic

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMireille Clapot, LaREM :

Ces dernières décennies, les NBIC ont connu une progression fulgurante. N pour nanotechnologies qui manipulent les atomes, B pour biotechnologies s'appliquant aux gènes, I pour informatique qui s'appuie sur les bits et C pour sciences cognitives, fondées sur l'étude des neurones biologiques. La fameuse convergence de ces quatre technologies permettra d'entrer dans un nouveau paradigme scientifique ou technologique.

Les NBIC sont connues pour cristalliser la conflictualité entre les États-Unis et la Chine. Pour Washington, la technique occupe une fonction cardinale dans la tradition politique et la construction de l'hégémonie, mais les GAFAM se sont peu à peu émancipées de la politique fédérale américaine. À Pékin, depuis Deng Xiaopin, les ambitions économiques, sociales et géopolitiques s'ancrent dans une politique technoscientifique. Les BATX – Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi – , équivalent chinois des GAFAM, sont de puissants relais de la politique étrangère chinoise. Dans les deux cas, les NBIC sont la pierre angulaire de la course technologique. Elles ouvrent en effet des perspectives enthousiasmantes pour qui aspire à l'hégémonie : prospérité économique, suprématie militaire, contrôle sociopolitique des populations et perspectives de résoudre la crise environnementale sans remettre en cause du régime de production capitaliste. D'où l'importance particulière donnée à l'intelligence artificielle, qui permettra, selon le mot de Poutine, d'être le maître du monde.

Les investissements de ces deux géants sont colossaux. L'intelligence artificielle représente, à elle seule, 1 milliard parmi les 450 milliards de dollars de recherche-développement américaine, avec un investissement privé des GAFAM de 60 milliards. La Chine y consacre 22 milliards de dollars et se donne l'objectif d'atteindre 60 milliards avant 2025. Il y a donc une suprématie politique, économique et financière des États-Unis et de la Chine.

Qu'en est-il de l'Europe et de la France ? L'Union européenne a fait émerger tardivement des objectifs stratégiques de recherche et ce n'est que tout récemment que la Commission européenne a orienté sa politique selon une nouvelle doctrine : celle de l'autonomie stratégique et de la souveraineté numérique. Certes, 8 milliards d'euros sont dédiés au numérique dans le futur cadre financier pluriannuel 2021-2027 et 20 % des 750 milliards d'euros prévus dans le plan de relance européen seront alloués au numérique, tandis que le PIIEC – projet important d'intérêt européen commun – pour la micro-électronique est un succès.

L'Europe promeut les grandes innovations technologiques telles que la 5G ou l'intelligence artificielle – à propos de laquelle le livre blanc publié en février 2020 met l'accent sur l'éthique. Nous souscrivons pleinement à cette ambition, même si – ce n'est pas un grand secret – la culture de la donnée est loin d'être répandue au sein de l'Union, dont l'agilité n'est pas la vertu cardinale. Il faudra donc patienter encore un peu avant qu'un écosystème européen prenne forme. Aussi la France active-t-elle ses leviers souverains, avec le plan France relance sur deux ans, les PIA, ou programmes d'investissements d'avenir, sur cinq ans, les stratégies d'accélération du PIA 4 et, au-delà, le financement de la recherche que notre récente loi de programmation de la recherche porte à 3 % du PIB, soit 25 milliards d'euros sur dix ans. Il faut citer également le déploiement d'une stratégie IA – intelligence artificielle – au succès reconnu, le plan nano 2022 et un plan majeur pour les technologies quantiques dévoilé en janvier par le Président de la République et doté de 1,8 milliard d'euros. Enfin, la cybersécurité, l'espace numérique et le cloud de confiance devraient être des priorités pour la prochaine présidence française de l'Union européenne, en 2022.

J'en viens maintenant à l'aspect societal de ces technologies, vues sous l'angle purement national – ce sera en quelque sorte une réponse à M. Lecoq. Il faut bien, en effet, se poser une question essentielle pour nos concitoyens : les NBIC, pour quoi faire, au fond ?

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