Je souhaite tout d'abord remercier nos collègues du groupe UDI et indépendants d'avoir mis ce débat à l'ordre du jour.
Remis au Gouvernement en novembre 2019 par Jean-Luc Warsmann et Laurent Saint-Martin, dont je salue le travail, ce rapport témoigne de l'approche transpartisane existant depuis plus de dix ans sur cette thématique des saisies des avoirs criminels. Il témoigne également – et c'est fort appréciable – de l'engagement de longue durée de notre collègue Jean-Luc Warsmann sur ces enjeux. Je le perçois comme un point d'étape sur la politique de saisie et de confiscation, quelque dix ans après l'entrée en vigueur de la loi du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale. Cette loi est le premier marqueur fort du changement de paradigme en matière de saisies judiciaires. Alors que jusque là les saisies et les confiscations n'étaient pas ancrées dans la culture française, elles sont devenues un outil de répression à part entière de notre arsenal judiciaire.
Bien manié, cet outil cumule plusieurs avantages. Il répond d'abord à l'impératif de justice qui veut qu'un délinquant ne puisse profiter du produit de ses activités illicites. Il répond ensuite à un impératif budgétaire, puisqu'il apporte des recettes nouvelles à la collectivité. Enfin, il répond à un impératif d'efficacité de la politique de répression puisqu'en frappant de manière efficace les délinquants au portefeuille, elle renforce l'arsenal répressif à disposition du juge.
Pour assurer la mise en ? uvre de cette politique de saisie et de confiscation, la loi du 9 juillet 2010 a créé l'AGRASC. Dix ans après sa création, cette agence est reconnue pour son utilité et son expertise. Son rapport pour l'année 2019 montre que le montant des confiscations a dépassé cette année-là les 253 millions d'euros, soit une hausse de plus de 600 % par rapport à l'année précédente. Quatre-vingt-sept immeubles et 3 060 biens meubles ont été vendus. Le rapport précise que les sommes confisquées ont permis d'indemniser en 2019 426 parties civiles, à hauteur de 101 millions d'euros. Ce sont des résultats significatifs, encourageants et révélateurs de l'appropriation par le système judiciaire français de ces nouveaux outils de saisie et de confiscation.
La création d'agences régionales pourrait améliorer encore cette efficacité en renforçant le maillage territorial et en généralisant les bonnes pratiques ; ainsi, on identifierait mieux le patrimoine frauduleux, on le saisirait plus efficacement, on accélérerait les procédures et on réduirait les frais de gestion des biens saisis et confisqués. Nous ne pouvons que soutenir une telle proposition, qui nécessite toutefois un investissement financier et humain non négligeable.
Parmi les autres axes de progression, votre rapport constate que les saisies restent concentrées sur les dossiers économiques et financiers, qui en représentent entre 60 et 70 %, et sont trop rares dans la délinquance de moyenne intensité. Je pense qu'il y a là un enjeu majeur pour permettre au dispositif d'atteindre sa pleine portée. Je retiens également la proposition de permettre aux magistrats de statuer sur le sort des biens saisis dans les trois mois afin de gérer les saisies de manière efficace et d'éviter des frais de garde importants. Enfin, je salue la volonté d'élaborer des statistiques plus fiables en mettant en place une chaîne unique de recensement et de centralisation des données.
Le groupe Agir Ensemble se réjouit donc de la manière dont le cadre normatif évolue depuis dix ans en la matière, conformément à une logique d'efficacité et de pragmatisme. Ces résultats sont déjà extrêmement encourageants et les propositions que vous formulez dans ce rapport vont dans le sens d'une amélioration du dispositif. Je terminerai donc en m'associant au v? u que vous formulez à la fin de votre rapport : « la peine de confiscation doit désormais prendre pleinement sa place dans l'arsenal répressif en devenant une peine principale et non plus seulement une peine complémentaire ».