M. Jean-Philippe Ardouin alerte M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique, sur les dérives de l'anonymat sur les réseaux sociaux. Dans le cadre du Grand débat national, interrogé par un maire du Lot à Moissac, le Président de la République a annoncé être favorable à la « levée progressive de tout anonymat » sur internet afin de « redonner une hygiène démocratique au statut de l'information ». Les comptes anonymes qui se dédoublent de semaine en semaine sur les réseaux sociaux sont les instruments de la « nouvelle haine numérique ». Sur les réseaux sociaux Twitter, Facebook, le « pseudonymat » a libéré les discours de haine raciste, antisémite, négationniste, anti-République, anti-élus ou homophobe. Le président de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICRA), M. Mario Stasi, a posé les bonnes questions dans une récente tribune « En France, en 2019, serait-il nécessaire de se planquer anonymement pour s'exprimer librement » ? Et il y répond d'une manière simple : « une démocratie sous pseudonyme n'est plus une démocratie ». Aussi, il lui demande si le Gouvernement pourrait prendre les mesures nécessaires, qui s'imposent aujourd'hui, pour mettre un terme aux dérives de l'anonymat. Elles conduisent certains citoyens à détourner les réseaux sociaux aussi, il lui demande également quelles mesures concrètes il peut annoncer pour garantir à tous de connaître l'identité de celles et ceux qui s'expriment, sans retenue, au quotidien sur les réseaux sociaux.
Le Gouvernement est pleinement mobilisé dans le combat contre le racisme et l'antisémitisme sur internet. En mars 2018, le Gouvernement a présenté son plan national de lutte contre le racisme et l'antisémitisme et, à cette occasion, a engagé une mission d'étude spécifiquement dédiée à la lutte contre la diffusion de ces contenus de haine sur internet. Le rapport établi en juillet 2018 par Mme Laetitia Avia et Messieurs Gil Taïeb et Karim Amellal a proposé des mesures structurantes pour combattre la propagation de la « cyber-haine » et le Gouvernement a également entamé, dans le cadre des « Etats Généraux des Nouvelles Régulations du Numérique » lancés à l'été 2018, des travaux de réflexion sur le sujet. A l'issue de l'ensemble de ces travaux, et, dans une collaboration fructueuse avec le Gouvernement, une initiative parlementaire portée par Mme Avia est aujourd'hui engagée en vue de renforcer l'arsenal législatif en vigueur. Il s'agit, d'une part, d'obliger les plateformes internet à retirer dans un très bref délai les contenus de haine signalés par les usagers, et d'autre part, de renforcer les règles et les sanctions en ce qui concerne l'identification des auteurs de tels contenus. Le cadre légal en vigueur en France ne confère pas en effet un anonymat absolu aux auteurs de tels contenus : l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique impose aux réseaux sociaux l'obligation de conserver toutes données permettant d'identifier les auteurs des contenus portés sur leurs services. Le décret n° 2011-219 du 25 février 2011 relatif à la conservation et à la communication des données permettant d'identifier toute personne ayant contribué à la création d'un contenu mis en ligne définit en son article 1 la liste des données devant faire l'objet d'une conservation et objet des réquisitions par les autorités judiciaires. Par ailleurs, la piste d'une interdiction absolue (ex ante) de l'anonymat sur les réseaux sociaux pourrait soulever un certain nombre de risques lourds et définitifs : au-delà du risque juridique sur la compatibilité de cette piste avec la Constitution et de sa conséquence immédiate (qui rendrait les réseaux sociaux détenteurs d'une masse considérable de données d'identités qualifiées de citoyens français), une telle voie serait en outre susceptible d'induire de nouvelles pratiques encore plus préjudiciables (fraudes massives à l'identité, migration des contenus illicites sur des réseaux clandestins, cryptés…), altérant d'autant in fine les capacités de contrôle et de sanction des autorités répressives. Aussi, les mesures législatives envisagées à ce stade privilégient bien plutôt une responsabilisation accrue des réseaux sociaux dans l'identification des auteurs de contenus illicites (obligation de désigner un représentant légal en France, multiplication par un facteur quatre du montant de l'amende en cas de non-communication des données d'identification).
1 commentaire :
Le 16/07/2020 à 19:25, Laïc1 a dit :
"En France, en 2019, serait-il nécessaire de se planquer anonymement pour s'exprimer librement »
Belle hypocrisie de la part de ceux qui veulent museler le peuple et le citoyen en l'obligeant à dire nom, prénom, adresse, numéro de téléphone, profession... quoi de mieux pour l'intimider par avance et l'empêcher de dire ce qu'il a à dire ?
Jean Castex a osé dire que l'anonymat, ou le pseudonymat lui rappelait Vichy... Il aurait mieux fait de réfléchir avant de s'exprimer. Jean Moulin, symbole de la République et de la lutte autant contre le régime de Vichy que du nazisme, officiait sous un pseudonyme, et même plusieurs...
Voici un extrait fort intéressant issu d'un article d'un blog :
"Les chefs de la Résistance "institutionnalisent" leur fausse identité sur les fausses cartes d’identité. Ils sont en effet amener à beaucoup circuler. Par exemple,il est mentionné sur la carte d’identité de Jean Moulin "Joseph Mercier". Il est arrêté sous le nom de "Jacques Martel". Dans le cas présent, les initiales sont identiques, afin notamment de faciliter la mémorisation de ces pseudonymes.
Les résistants adoptent parfois des pseudonymes qui rappellent un souvenir personnel indécryptable. Jean Moulin se fait appeler "Max", peut-être en hommage au poète Max Jacob. Pierre Guillain de Bénouville se fait appeler "Barrès", en hommage à une figure du nationalisme français, Maurice Barrès. Parfois, le pseudonyme indique le sens de leur activité. André Bollier, jeune polytechnicien et imprimeur du journal Combat, devient "Vélin", comme le papier.
Afin de brouiller les pistes, les résistants peuvent démultiplier les pseudonymes. Le général Delestraint (chef de l’Armée secrète) est tour à tour "Vidal", "Mars", "Chevalier", "Delé" ou encore "Duchêne". Il est néanmoins arrêté par la Gestapo.
Le BCRA (Bureau Central de Renseignements et d’Action) choisissait les pseudonymes selon une certaine logique : les créateurs du BCRA reçurent le nom d’une station de métro ("Passy", "Saint-Jacques", "Bienvenüe"), les officiers d’opérations aériennes un nom monosyllabique ("Pal", "Kim", "Frit", "Sif"), les dirigeants de la zone sud les noms de grands personnages ("Sultan", "Archiduc"), les délégués militaires une double appellation géométrique et guerrière (Mangin = "Losange" et "Grognard")... Dans le réseau Alliance, Marie-Madeleine ne voulait que des animaux. Son réseau allait de "Criquet" à "Eléphant", en passant par "Tigre", "Epagneul" ou encore "Castor".
Afin de mieux égarer les services de la Gestapo, il était recommandé de prendre un prénom féminin pour désigner un homme (Serreules = "Sophie"). L’humour n’était pas toujours absent. Un résistant avait choisi comme pseudonyme "Vichy", l’intéressé souffrant d’un ulcère à l’estomac.
Après la guerre, certains résistants conservent leur pseudonyme par idéal ou peut-être par nostalgie (ex : Jacques Chaban-Delmas, général Maurice Chevance-Bertin)."
Voilà, voilà, donc, pour mieux lutter contre tous les totalitarismes anti-républicains et anti-démocratiques : à vos pseudos !!
Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui