M. Gilles Lurton appelle l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur les conséquences du prélèvement de l'impôt à la source pour de nombreuses entreprises artisanales qui n'ont pas forcément les moyens logistiques d'assumer un tel travail. Les entreprises du bâtiment ont estimé à une semaine par an en moyenne le temps nécessaire au traitement administratif de la collecte de l'impôt. Une semaine de travail non rémunéré au détriment des chantiers et des clients de ces entreprises. La réforme implique aussi des dépenses pour s'adapter, comme un changement de logiciels informatiques, voire des formations pour les personnels ou pour les chefs d'entreprises eux-mêmes. A un moment où l'activité repart dans le bâtiment et que les carnets de commandes des entreprises sont pleins, les dirigeants des entreprises artisanales s'interrogent sur leur capacité à assumer ce travail supplémentaire de la collecte de l'impôt. Ils sont prêts à relever les grands défis de la rénovation énergétique des bâtiments mais pas pour endosser une mission qui reste, de leur point de vue, une prérogative de l'Etat. Ils sont prêts à s'engager pour faire vivre l'économie locale et créer des emplois mais pas pour s'immiscer dans la vie privée de leurs salariés. De plus, le dispositif tel qu'adopté, contribuera à doublement pénaliser le secteur du bâtiment. En effet, beaucoup de propriétaires bailleurs risquent de reporter des travaux de rénovation en 2020, voire en 2021, car en 2019, les propriétaires ne pourront déduire fiscalement que la moitié seulement du montant de leur travaux. Pour toutes ces raisons, il lui demande quelles mesures il entend mettre en place pour faciliter le travail de collecte de l'impôt par les entreprises et ne pas leur créer une charge de travail supplémentaire inappropriée et trop coûteuse pour l'équilibre de leur activité.
Le rapport d'audit de l'Inspection Générale des Finances (IGF) transmis au Parlement le 10 octobre 2017 sur les conditions de mise en œuvre du prélèvement à la source vient objectiver et relativiser la charge nouvelle pesant sur les entreprises. La mission IGF estime ainsi que la charge financière serait comprise entre 310 et 420 M€ pour les entreprises et non 1,2 milliard d'euros comme évoqué précédemment dans un rapport réalisé par un cabinet privé. Plus de 70 % de ce coût provient de la valorisation des ressources internes qui seraient mobilisées pour le paramétrage des logiciels, la formation des utilisateurs et la communication auprès des salariés. En effet, la mise en œuvre du prélèvement à la source repose sur la déclaration sociale nominative (DSN) qui est un vecteur déclaratif existant, désormais éprouvé et ayant permis des économies substantielles aux entreprises. Les entreprises bénéficient en outre d'un effet en trésorerie dès lors qu'elles ne reversent la retenue à la source qu'elles ont collectée qu'après un délai de plusieurs jours. Les entreprises de moins de cinquante salariés effectuent ainsi ce reversement le 15 du mois suivant le prélèvement. La mission poursuit en précisant que cette charge peut néanmoins être atténuée par un plan de communication adéquat de l'administration, qui a été mis en place à compter de la campagne déclarative d'impôt sur le revenu de l'an dernier. Le rapport de l'IGF comporte également des propositions pour alléger les modalités et règles de gestion pour les collecteurs. Elles visent notamment à renforcer le dispositif d'accompagnement des employeurs par l'administration, en particulier grâce à un kit de démarrage à l'attention de tous les collecteurs, publié en mars 2018, qui a permis de mettre à leur disposition tous les outils d'information et de communication sur le prélèvement à la source. En outre, la préfiguration qui s'est déroulée pendant le dernier trimestre 2018 a permis aux salariés de s'approprier le nouveau mode de paiement de l'impôt sur le revenu, ce qui a fortement diminué la charge des sollicitations des salariés auprès de leurs employeurs. S'agissant du règlement de la transition entre les deux systèmes de recouvrement de l'impôt sur le revenu, le législateur a eu pour objectif d'éviter une double contribution aux charges publiques qui aurait résulté pour les contribuables du paiement en 2019 de l'impôt sur les revenus de 2018 avec le décalage d'un an et sur les revenus de 2019 avec le prélèvement à la source. Il a donc créé le crédit d'impôt de modernisation du recouvrement (CIMR) qui viendra effacer l'impôt sur les revenus de 2018 non exceptionnels dans le champ de la réforme. La notion de revenus non exceptionnels est définie différemment selon la catégorie de revenus concernée. S'agissant des revenus fonciers, des modalités dérogatoires de prise en compte des charges foncières ont été prévues. Pour les charges récurrentes, afférentes à des dettes dont l'échéance intervient en 2018, celles-ci ne seront déductibles que pour la détermination du seul revenu net foncier imposable de l'année 2018. Cette règle conduit à écarter, lorsqu'elle est distincte de celle de son échéance normale, la date de paiement effectif de la dette correspondante pour apprécier l'année au cours de laquelle la dépense peut être admise en déduction. Pour les charges dites pilotables, qui s'entendent des dépenses de travaux dont le bailleur maîtrise le calendrier de réalisation et donc l'année d'imputation, le dispositif prévu consiste à apprécier globalement le montant des charges concernées pour la détermination du revenu net foncier imposable de l'année 2019, en retenant la moyenne des montants respectivement supportés au titre de ces mêmes dépenses au cours des années 2018 et 2019. Cette règle a permis de ne pas désinciter les contribuables à effectuer des travaux dans leurs immeubles en 2018 afin de soutenir le secteur du bâtiment.
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