M. Ugo Bernalicis appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur sur l'usage qui est fait de l'arme de dotation hors service, par nos forces de police et de gendarmerie. À la suite des attentats du 13 novembre 2015, les personnels de police et de gendarmerie ont été autorisés à conserver leur arme hors de leur service et ce dans le cadre de l'état d'urgence. En juillet 2016, à la suite du terrible assassinat de Jessica Schneider et de son conjoint le commandant de police Jean-Baptiste Salvaing, à Magnanville, la décision a été prise de pérenniser l'autorisation du port d'arme hors du service, en dehors de l'état d'urgence. Cette décision a été prise en vertu de l'arrêté du 25 juillet 2016 portant règlement général d'emploi pour les forces de police et la note du 4 juillet 2016 relative aux conditions de détention et de port de l'armement individuel hors service pour la gendarmerie. Ces décisions d'autoriser nos forces de police et de gendarmerie à conserver leur arme à feu en dehors de leur temps de travail, ont été mises en place par à-coups, à chaud et en réaction à des attentats terroristes. Il tient à souligner son opposition à la généralisation du port d'arme à feu pour nos forces de sécurité intérieure et, de façon plus générale, à la prolifération des armes dans la société. Néanmoins, si les gouvernements successifs ont acté ces mesures, il n'en reste pas moins qu'un contrôle démocratique est nécessaire. En ce sens, il est du devoir du ministre de l'Intérieur d'informer le plus précisément possible la représentation nationale quant à l'usage qui est fait de l'arme administrative en dehors du service par les personnels de police et de gendarmerie et ce afin d'interroger la pertinence et la légitimité de ce dispositif. Le ministre de l'Intérieur lui-même a été obligé de s'interroger sur cette légitimité suite au drame de Sarcelles, qui a marqué les esprits. En effet, dans la soirée du 18 novembre 2017, un différend familial se muait en drame lorsqu'un policier a fait usage de son arme administrative pour commettre un triple homicide, blessé trois autres personnes avant de se donner la mort. Le lendemain, Gérard Collomb avait indiqué que le droit accordé aux personnels de police et de gendarmerie de porter leur arme en dehors de service ne serait pas remis en question justifiant cette décision au motif que ces derniers armés en dehors de leur service sont en mesure d'intervenir et de protéger la population en cas d'urgence. Alors que les organisations représentatives du personnel de la police et les associations professionnelles de la gendarmerie ne cessent d'alerter sur l'état de fatigue physique et moral de nos forces de sécurité, exiger qu'elles soient en état d'alerte permanent n'est pas respectueux pour ces dernières et irresponsable politiquement. A priori, le ministre ne souhaite pas qu'un nouveau drame survienne, au cours duquel un agent de police ou de gendarmerie, en situation d'épuisement professionnel ne commette une erreur d'appréciation et fasse un usage inapproprié de son arme administrative. Il souhaite connaître les cas où l'intervention d'un agent de nos forces de police ou de gendarmerie, armé et en dehors de son temps de travail, a permis de mettre fin à une action terroriste ou d'empêcher un crime, depuis qu'elles disposent d'une telle autorisation.
1 - Principe de l'habilitation du port de l'arme en dehors de l‘exercice de la fonction : S'agissant de la gendarmerie nationale, jusqu'au 19 janvier 2018, les officiers et sous-officiers d'active pouvaient être autorisés à porter leur arme de poing en dotation individuelle en dehors de l'exercice de la fonction selon un processus de demande nécessitant en amont deux niveaux d'avis hiérarchique. Depuis le 19 janvier 2018, en application de l'instruction no 234000/GEND/DOE/SDSPSR/BSP relative à l'emploi et à la sécurité de l'armement de dotation en gendarmerie, ce processus est caduc. Dorénavant, tous les officiers et sous-officiers d'active peuvent, par principe et sous réserve de disposer d'une habilitation au port de l'arme dans l'exercice de la fonction, porter leur arme de poing en dotation individuelle hors de l'exercice de la fonction. L'autorisation, par principe, est valable sur l'ensemble du territoire métropolitain ou couvre, pour les militaires affectés outre-mer, le ressort de leur formation administrative. Le commandant de formation administrative conserve la faculté de retirer une autorisation à tout moment. Cette autorisation s'accompagne d'une stricte obligation de respecter : - l'interdiction de porter son arme, hors de l'exercice de la fonction, à l'étranger ; - les règles de port et de transport par voie aérienne et maritime. Le port de l'armement, en dehors de l'exercice de la fonction, est également conditionné par la détention de la carte professionnelle et l'emport du brassard « gendarmerie » avec son bandeau identifiant. En toutes circonstances, le militaire doit pouvoir décliner sa qualité immédiatement. S'agissant de la police nationale, la question du port de l'arme hors service impose au préalable de rappeler que les personnels actifs de la police nationale constituent, dans la fonction publique, une catégorie spéciale du fait du caractère particulier de leurs missions et des responsabilités exceptionnelles qu'ils assument. Ce statut spécial leur impose un certain nombre de contraintes professionnelles, notamment celle d'être disponibles même en dehors des heures habituelles de travail. En application des dispositions de l'article 19 du décret du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale, leurs « obligations ne disparaissent pas après l'accomplissement des heures normales de service » et « dans tous les cas où le fonctionnaire intervient en dehors des heures normales de service soit de sa propre initiative, soit en vertu d'une réquisition, il est considéré comme étant en service ». Ainsi, en cas de nécessité, de jour comme de nuit, le policier peut être appelé à exécuter une mission, notamment pour répondre aux exigences de l'article R. 434-19 du code de la sécurité intérieure (« lorsque les circonstances le requièrent, le policier ou le gendarme, même lorsqu'il n'est pas en service, intervient de sa propre initiative, avec les moyens dont il dispose, notamment pour porter assistance aux personnes en danger »). Il a été décidé, dès le 18 novembre 2015, dans le contexte de l'état d'urgence, la mise en place temporaire d'un régime dérogatoire permettant d'autoriser les policiers actifs à porter leur arme individuelle en dehors de leur service afin de leur permettre de faire face, à tout moment, dans le respect du droit applicable, à des individus armés. Il convient cependant de rappeler que les policiers pouvaient déjà précédemment décider de porter leur arme hors service. En effet, si les modalités du port de l'arme dans le cadre de la vie privée ont été étendues à compter de 2015-2016, les dispositions réglementaires antérieures autorisaient déjà les policiers à garder leur arme, soit sur le trajet entre leur domicile et leur lieu de travail, soit dans le ressort territorial où ils exerçaient leurs fonctions. Le cadre légal du port de l'arme hors service a été clarifié et conforté par un arrêté du 4 janvier 2016 modifiant l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale. L'intensification de la menace terroriste et l'assassinat en juin 2016, à leur domicile, de deux agents du ministère de l'intérieur, ont conduit le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur à décider de pérenniser cette possibilité du port de l'arme hors service, en dehors même donc de toute période d'état d'urgence, par arrêté du 25 juillet 2016 modifiant l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale. Le port de l'arme peut désormais s'effectuer sur l'ensemble du territoire national et pendant les périodes de repos et de congés. Le port de l'arme par les policiers, qui n'est nullement obligatoire, répond à un cadre juridique précis, qui fixe plusieurs conditions (déclaration préalable et par écrit, détenir sa carte professionnelle et un brassard police en cas de port de l'arme hors service, etc.), et son usage plus encore puisqu'il relève des dispositions législatives et réglementaires en vigueur. Par ailleurs, et à l'instar de ce qui s'applique dans la gendarmerie nationale, des dispositions prévoient la possibilité de refuser ou de retirer l'autorisation du port de l'arme hors service. L'instruction du 9 mars 2017 du directeur générale de la police nationale relative à l'arme individuelle ou de service prévoit ainsi que le chef de service peut s'opposer au port de l'arme hors service, ou retirer l'autorisation, à tout fonctionnaire présentant un état de dangerosité pour lui-même ou pour autrui sur le fondement de l'article 114-6 du règlement général d'emploi de la police nationale et de l'article du R. 434-6 du code de la sécurité intérieure. Par ailleurs, le chef de service peut également, a posteriori, interdire à un agent le port de l'arme hors service lorsque cet agent a commis une faute au regard des obligations relatives au port et à la conservation de l'arme hors service. Il peut également être rappelé que l'agent a l'obligation de restituer à son service d'affectation l'arme individuelle dont il est doté dans certaines circonstances (congés de longue maladie ou de longue durée, etc.). 2 - Nombre d'usages des armes hors service recensé pour mettre fin à une action terroriste ou empêcher un crime : Depuis la mise en place de cette mesure, aucun militaire de la gendarmerie, autorisé à porter son armement individuel hors de l'exercice de la fonction, n'a fait usage de son arme hors service pour mettre fin à une action terroriste ou empêcher un crime. S'agissant du recensement des usages de l'arme individuelle au sein de la police nationale, les informations relatives aux conditions de l'usage des armes individuelles et collectives sont enregistrées, depuis janvier 2012, dans une application dénommée « traitement relatif au suivi de l'usage des armes » (TSUA). Y sont enregistrés les tirs opérationnels effectués en service, que l'usage de l'arme individuelle ait lieu pendant ou en dehors du temps réglementaire de travail. Aussi, dans l'application, les usages d'arme effectués en dehors du temps de service ne sont pas recensés en tant que tels, puisque tout policier auteur d'un tir opérationnel est légalement réputé être en fonction comme rappelé plus haut.
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