M. Philippe Huppé alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le manque de précaution pris quant au respect du code de la santé publique constaté dans la campagne d'information réalisée par le ministère des solidarités et de la santé, conjointement avec l'Institut national du cancer. Cette campagne, qui souhaite inciter les Français à modifier leurs habitudes alimentaires et notamment leur consommation d'alcool afin de prévenir les cancers qui lui sont imputables, présente, comme unique visuel, un tire-bouchon, symbole d'une guerre contre l'excès d'alcool qui ne s'attaque qu'à la consommation de vin. L'utilisation de ce visuel se heurte en effet à l'article L. 3311-3 du code de la santé publique qui dispose que « les campagnes d'information menées dans le cadre de la lutte antialcoolique doivent comporter des messages de prévention et d'éducation. Ces messages ne doivent pas présenter de caractères discriminatoires entre les différents produits ». Par ailleurs, cette discrimination, qui a auparavant déjà été constatée, contribue à donner une mauvaise image au vin dont l'apport culturel et économique pour le pays n'est plus à démontrer et qui constitue, selon les mots du président de la République, « un formidable atout pour le rayonnement de la France ». Dans un contexte difficile pour les vignerons qui subissent de plein fouet les aléas climatiques, avec, en 2017 dans l'Hérault, la plus petite récolte enregistrée depuis des décennies, les producteurs de vin auraient de quoi être découragés par une campagne du ministère des solidarités et de la santé qui, une fois de plus, s'attaque à leur production alors qu'ils s'inscrivent dans une volonté d'amener à une consommation modérée et qualitative afin de lutter contre le fléau que représente l'alcoolisme.
La consommation d'alcool en France est estimée à 11,6 litres d'alcool pur par habitant, soit environ 2,5 verres de 10 g d'alcool par jour et par habitant. Si cette consommation est en baisse depuis plusieurs années, elle demeure néanmoins l'une des plus élevées en Europe et dans le monde. Près d'un adulte sur deux consomme de l'alcool au moins une fois par semaine et 10 % chaque jour, en particulier les plus de 50 ans. Les plus jeunes consomment moins régulièrement mais de façon plus excessive et ponctuelle, avec des épisodes d'ivresse (« binge drinking »). La consommation nocive d'alcool peut conduire à la dépendance et altérer la santé et la qualité de vie, pour soi comme pour les autres. Ainsi, l'alcool est aujourd'hui en France la deuxième cause de mortalité prématurée évitable, après le tabac. Il est responsable de 49 000 décès par an en France, dont 15 000 décès par cancers. L'exposition à l'alcool pendant la grossesse constitue la première cause non génétique de handicap mental chez l'enfant. L'alcool est également à l'origine de 29 % des décès par accident de la route (3 477 tués sur les routes, donc plus de 1 000 morts dus à l'alcool). Face à ces constats, l'Institut National du Cancer (INCa) a lancé, en septembre 2017, une campagne visant à mieux faire connaître les gestes alimentaires quotidiens qui permettent de prévenir les cancers évitables. Parmi les comportements encouragés figure celui de la diminution de sa consommation d'alcool. Mettre à la disposition du grand public les informations qui lui permettront de faire des choix éclairés pour sa santé relève de la responsabilité des autorités sanitaires dont les missions pourraient être niées en cas d'absence d'information de la population sur les risques associés à certains comportements. Par ailleurs, dans le cadre de ses dispositifs de prévention, l'institut national du cancer (INCa) s'attache à promouvoir un discours neutre fondé sur des données probantes, non stigmatisant et prenant en compte les plaisirs associés à la consommation de certains produits, dont l'alcool fait partie. Cette campagne de prévention, qui ne se limite pas uniquement à la question de la consommation d'alcool mais aborde plus largement celle d'une alimentation saine et équilibrée, s'inscrit pleinement dans notre stratégie nationale de santé. Parmi les axes prioritaires de cette stratégie nationale, qui a fait l'objet d'une consultation publique, figure un volet prévention important intégrant plusieurs objectifs de lutte contre l'usage nocif d'alcool.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.