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José Evrard
Question N° 11134 au Ministère de l'europe


Question soumise le 24 juillet 2018

M. José Evrard attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la coopération avec les pays d'émigration. Face à la vague d'immigration africaine en Europe, il est souvent préconisé de favoriser des coopérations avec les pays pourvoyeurs de migrants pour neutraliser les velléités de départs. C'est le rôle qui revient à l'aide publique au développement, APD. Cependant, d'après plusieurs démographes, et non des moindres, les aides au développement n'endiguent en rien l'immigration mais la favorisent dans la mesure où ces aides apportent des compléments en relations et en capacités financières pour les individus candidats. L'aide au développement ne peut constituer la panacée contre le « déferlement » migratoire. Il lui demande quelles autres mesures peuvent être envisagées pour endiguer ces départs du continent africain et mettre un terme à cet exode de population du sud.

Réponse émise le 2 octobre 2018

La France promeut une politique équilibrée sur les migrations, une responsabilité partagée entre pays d'origine, de transit et de destination, ainsi que le lien migration-développement. En ce qui concerne particulièrement les migrations irrégulières, la France entend concrètement, à la fois agir sur les causes profondes de la celles-ci (notamment par le développement économique et social des pays d'origine), assurer le retour, la réadmission et la réintégration des migrants irréguliers dans leur pays d'origine, lutter contre les atteintes aux droits de l'Homme dont les migrants sont victimes et les filières responsables, sans pour autant compromettre sa politique en faveur des migrations légales, le renforcement de la protection des demandeurs d'asile ainsi que le soutien et la valorisation des apports de la migration régulière au développement durable et à la croissance (rôle des diasporas, premier acteur mondial de solidarité avant l'aide publique au développement : 450 milliards de dollars par an, selon la Banque mondiale). S'agissant de l'aide publique au développement (APD), celle-ci participe à la lutte contre les "causes profondes"de la migration irrégulière. Ces dernières sont multiples et complexes puisqu'elles recouvrent aussi bien les conflits, la pauvreté, la mauvaise gouvernance que l'insécurité. Si des études universitaires tendent à démontrer que plus un pays à faible revenu se développe, plus la migration s'accroît, elles soulignent aussi que ce phénomène ne vaudrait que dans un premier temps. En effet, si l'aide publique au développement n'a que peu d'impact sur l'endiguement des mouvements migratoires à court terme, elle demeure cependant indispensable pour asseoir les conditions de la limitation des flux à moyen et long termes, répondant aux causes profondes des décisions de migrer. Ainsi, ce n'est qu'après un certain temps que le développement, en rendant"acceptable"l'option de rester chez soi, est susceptible d'entraîner un plafonnement de l'émigration, puis sa diminution et son éventuelle disparition. La relation entre développement et migrations internationales pourrait ainsi être schématisée par une courbe en cloche. L'utilisation de l'APD pour faire face à l'enjeu migratoire doit donc se faire avec mesure et être adaptée au contexte, notamment par une politique de développement axée sur la création d'emploi et l'inclusion de la jeunesse. Il est toutefois évident que l'APD ne saurait constituer à elle seule la réponse à un défi multi-causal et en aucun cas suffire à"fixer" les populations sur place, mais à offrir un environnement davantage propice au développement. Selon les estimations des Nations unies, le nombre de migrants internationaux (244 millions de personnes) et de déplacés forcés (65 millions de personnes) a atteint un seuil record en 2016. L'afflux de réfugiés a mécaniquement augmenté les dépenses en faveur de ce poste dans plusieurs pays européens. Dans le cas de la France, la part des coûts liés à l'accueil des réfugiés dans l'APD est passée de 4 % (2015) à 4,8 % (2016) et 5 % en 2017 (données préliminaires), restant toutefois en dessous de la moyenne des pays du CAD de l'OCDE (11 % en 2017). La France a également renforcé les partenariats et augmenté ses contributions en faveur des organisations multilatérales œuvrant dans le domaine du soutien des réfugiés et des déplacés internes, telles que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR : 38,5 millions d'euros en 2016), qui assure un soutien indéfectible aux Etats, aux communautés hôtes et aux personnes contraintes à l'exil, et le Programme alimentaire mondial (PAM : 26,3 millions d'euros en 2016). Elle a également contribué et appuyé la création de facilités spécifiques dédiées aux pays en développement les plus touchés par l'afflux des réfugiés, couvrant la Turquie, la Jordanie et le Liban. En 2016, la France a alloué la majorité de son aide humanitaire à la Facilité de l'Union européenne en faveur des réfugiés en Turquie (98,2 millions d'euros, soit 97 % de son aide multilatérale humanitaire et 64 % de son aide humanitaire totale). C'est dans cet esprit que le 25 avril 2018, à l'occasion de la conférence de Bruxelles II, la France a annoncé le renforcement de l'effort financier en faveur du peuple syrien et des communautés hôtes, qui devrait s'élever à plus d'un milliard d'euros pour les années 2018-2020. Parallèlement, la France participe activement au Fonds Fiduciaire d'urgence (FFU) créé à la suite du Sommet euro-africain de La Valette en 2015. Ce fonds constitue le principal outil financier de l'UE en matière de dimension extérieure des migrations. Phénomène transnational, la migration appelle, au total, à une responsabilité partagée entre pays d'origine, de transit et de destination et exige une coopération et une coordination dans la formulation de réponses à long terme. La France prend part de manière responsable à cet objectif, par des engagements sur ces trois niveaux.

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