M. Jean Lassalle attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les conséquences de la décision de l'Office national des forêts (ONF) d'étendre à partir du 1er septembre 2018, la labellisation UE aux acheteurs-transformateurs ainsi qu'à l'ensemble de leur approvisionnement, y compris les chênes en provenance des forêts privées. La labellisation UE a été mise en place en 2015 par l'ONF afin de favoriser la transformation en Europe des chênes issus des forêts publics et contraindre les enchérisseurs des ventes publiques ONF à s'assurer, sous peine de sanctions, que les chênes qu'ils achètent soient bien transformés en Europe. Cette labellisation prenait en compte dans son article 4 - dont le syndicat de la filière bois (SFB) a demandé l'annulation devant le Conseil d'État pour illégalité - non seulement l'entreprise en tant qu'entité mais également l'ensemble de ses approvisionnements, y compris ceux issus des forêts privées qui devaient également être transformées en Europe. C'était une très bonne idée sur le principe qui est devenue une importante contrainte pour les exploitants. Cela a conduit à restreindre la commercialisation des propriétaires privés qui ne pouvaient plus vendre à des sociétés labellisées UE les lots de chêne de qualité inférieure, de petits diamètres, inférieur au 40 cm ou même bois tordus et noueux qui n'intéressaient pas ou peu les transformateurs français mais leur procuraient a contrario un revenu important, à travers notamment l'export vers la Chine. Désormais, sans concertation préalable avec les propriétaires privés et les exploitants forestiers et sans attendre les conclusions du Plan filière feuillu en cours de négociation avec une partie des acteurs de la filière, l'ONF entend étendre, à compter du 1er septembre 2018, la labellisation UE aux acheteurs-transformateurs des enchérisseurs labellisés UE (c'est-à-dire aux scieries et seconds transformateurs : parqueterie /fabricants de meubles) ainsi qu' à l'ensemble de leur approvisionnement, y compris les chênes en provenance des forêts privées. Selon le SFB, cette extension représente une grave menace pour les forêts, les exploitants-forestiers et les petites scieries territoriales. Tout d'abord, alors qu'elles le font depuis des années, cela risque d'empêcher les petites scieries territoriales d'exporter vers l'Asie, via des exploitants-négociants, les chênes de qualité inférieure qu'elles ne peuvent pas scier, alors qu'ils contribuent fortement à combler le déficit de leur activité industrielle. Ensuite, le syndicat craint que les ventes de chênes de qualité inférieure des propriétaires privés destinés aux acheteurs transformateurs soient restreintes et enfin que l'activité des exploitants forestiers dont le rôle est de dispatcher les différentes essences et qualité entre, d'une part les transformateurs français (en leur donnant la priorité) et d'autre part, l'export pour les bois délaissés par les transformateurs (mais dont la vente reste indispensable pour financer le repeuplement des forêts françaises en feuillus) soit remise en question. Enfin, selon le SFB, en réglementant à l'avenir l'ensemble de la commercialisation des chênes jusqu'à la seconde transformation, y compris ceux issus des forêts privées, l'ONF, alors qu'elle n'est qu'un établissement public à caractère commercial, s'érige en législateur et bafoue le rôle du Parlement, seul habilité à définir les règles de commercialisation d'un secteur d'activité. D'autant plus que face à une absence de politique européenne de la forêt et du bois, la compétitivité de l'industrie française est déjà fortement pénalisée. En conséquence, il lui demande d'examiner en urgence la situation de cette filière et de démontrer avec des mesures concrètes et efficaces qu'il défend ses intérêts et qu'il est un véritable garant pour entendre la position des exploitant-forestiers et des petites scieries territoriales fortement fragilisées.
Face au développement des exportations de grumes de chêne en dehors de l'Union européenne (UE) au détriment de la filière européenne de transformation et de l'emploi dans nos territoires, en dialogue avec les organisations représentatives du secteur, en particulier la fédération nationale du bois, l'État, pour les forêts dont il est propriétaire, avec le soutien de la fédération nationale des communes forestières s'agissant des forêts des collectivités, a décidé par décret en Conseil d'État du 11 septembre 2015 que le droit de se porter acquéreur aux ventes publiques de l'office national des forêts (ONF) pouvait être subordonné à la présentation d'engagements permettant d'assurer la prise en compte effective des objectifs mentionnés à l'article L. 121-2-1 du code forestier. Ces objectifs sont notamment de renforcer le développement de la filière de production de récolte, de transformation et de commercialisation des produits forestiers, de fixer sur le territoire européen les capacités de transformation des produits forestiers et d'assurer le maintien de l'activité économique, notamment en zone rurale défavorisée. Sur cette base, l'ONF a mis en œuvre, par plusieurs résolutions de son conseil d'administration (CA), un dispositif « label UE » permettant de subordonner les ventes publiques de bois d'œuvre de chêne à un engagement de l'acheteur de transformation dans l'UE. Cet engagement porte depuis l'origine, sur l'ensemble de l'approvisionnement de l'acheteur. Il n'est en effet pas possible d'assurer la traçabilité des grumes acquises en forêt publique de celles acquises en forêt privée. Deux voies permettent aux acheteurs de prendre l'engagement de transformer dans l'UE et donc d'accéder aux ventes publiques de bois d'œuvre de chêne de l'ONF : - soit un engagement direct auprès de l'ONF par signature d'un document récapitulant les engagements ; - soit l'adhésion au cahier des charges porté par l'association pour l'emploi du chêne et des feuillus. Il s'agit là d'un dispositif volontaire : les acheteurs qui ne s'engagent pas dans ce dispositif, peuvent s'approvisionner soit auprès des propriétaires privés qui ne souhaitent pas subordonner la vente de leur bois à un engagement contractuel similaire soit auprès de l'ONF pour des lots minoritaires de bois d'œuvre de chêne ou des lots labellisés invendus en ventes publiques. Le dispositif a été prolongé jusqu'au 31 décembre 2017 lors du CA du 12 octobre 2016 puis jusqu'au 31 décembre 2018 lors du CA du 30 novembre 2017. Alors qu'un certain tassement des exportations de chêne vers la Chine a pu être observé en 2016, les exportations vers la Chine ont repris au dernier trimestre 2017 malgré le dispositif « label UE » tel qu'en place. Face à cette situation, un travail d'analyse conduit par l'ONF avec les représentants professionnels de la filière a permis d'identifier les failles du dispositif en place permettant un contournement de l'objectif initial. Ce travail a abouti à une modification des engagements pour accéder aux ventes de bois de l'ONF qui a été présentée et adoptée à l'unanimité lors du CA du 28 juin de l'ONF. Les améliorations apportées consistent notamment : - à demander à chaque acheteur de déclarer les sociétés qui lui sont liées et de se porter garant qu'elles respecteront son engagement. Le contractant porte seul la responsabilité de l'engagement. - à exiger de chaque sous-acquéreur qu'il soit lui-même engagé dans la labellisation UE. Ainsi, un acheteur de bois d'œuvre de chêne de l'ONF ne peut revendre le bois qu'il ne transforme pas lui-même qu'à une entreprise s'engageant à transformer ou faire transformer, sur le territoire de l'UE, le bois d'œuvre de chêne ainsi acquis. Cette labellisation en cascade simplifie la traçabilité des flux et sécurise les contrôles en rendant les fraudes au label plus difficiles. Ce nouvel engagement de transformation dans l'UE s'applique dans les mêmes termes que le précédent, à savoir à tous les acheteurs de ventes publiques de chêne, qu'ils soient français, européens ou issus d'un pays tiers sans aucune discrimination. De même, il s'applique quelle que soit la qualité de l'acheteur, scieurs, négociants ou exploitants. Il ne modifie ainsi en rien le modèle du précédent engagement mais vient le conforter. Ce dispositif, ainsi rendu plus robuste, est la preuve de l'engagement résolu du Gouvernement dans nos territoires, de maintenir et développer la valeur ajoutée grâce à la transformation préférentielle du bois issu des forêts publiques (domaniales et communales) par l'outil industriel français et européen. Il doit permettre à la filière, pendant la durée de sa mise en œuvre, de s'organiser pour notamment déployer la contractualisation entre l'amont et l'aval et sécuriser ainsi durablement l'approvisionnement en chêne de nos entreprises face à la pression commerciale exercée aujourd'hui par les pays tiers sur les grumes de chêne issues des forêts françaises.
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