M. Jean-Marie Fiévet alerte M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les réfugiés climatiques. La première notion de réfugiés environnementaux est apparue en 1985 comme ceux qui sont forcés de quitter leur lieu temporairement ou de façon permanente à cause d'une rupture environnementale qui met en péril leur existence ou affecte sérieusement leurs conditions de vie. La France, pionnière avec la mise en œuvre de l'accord de Paris pour contenir le réchauffement climatique, doit s'interroger sur les migrations climatiques qui en sont une conséquence. Il lui demande donc les dispositions prévues en faveur des déplacés climatiques pour mieux les protéger.
Les conséquences des changements climatiques ne font pas de doute en matière de migrations et de déplacements : selon l'organisation internationale pour les migrations (OIM), 250 millions de personnes seraient concernées d'ici 2050. Les changements climatiques rendent problématique, à terme, la viabilité de certains territoires proches des côtes ou en voie de désertification. À cela s'ajoute la dégradation des terres et des écosystèmes dans leur ensemble, où la main de l'homme apparaît directement par la déforestation, la pollution, la surpêche, des systèmes d'irrigation et des pratiques agricoles inadaptés. La convention des Nations unies pour la lutte contre la désertification (CNULCD) estime ainsi que 80 à 90 % des migrants voulant rejoindre l'Europe quittent une terre agricole dégradée. Nous ne pouvons pas, pour autant, employer le terme de « réfugiés environnementaux » : Le terme de réfugié est strictement encadré par la convention de Genève. Pour mémoire, celle-ci prévoit une protection juridique pour toute personne « craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ». Les déplacés climatiques ou environnementaux ne sont pas exposés au même type de menace et ne peuvent donc être considérés comme « réfugiés ». La grande majorité des déplacements du fait des catastrophes naturelles et des changements climatiques est aujourd'hui interne. Les déplacements à l'intérieur d'un même pays relèvent de la responsabilité première des États concernés. Là se posent les défis essentiels : comment assurer une urbanisation ordonnée et la sécurité alimentaire de tous. Les « Principes directeurs de 1998 relatifs au déplacement de personnes à l'intérieur de leur propre pays » établis par les Nations unies sont applicables. Enfin, il est difficile d'isoler en propre les facteurs environnementaux dans les motifs de déplacement, ceux-ci résultant de divers facteurs sociaux ou économiques. C'est pourquoi l'appellation de déplacés environnementaux doit être retenue. Pour autant, certaines dispositions, et la France en est pleinement partie prenante, sont prévues pour la protection des déplacés climatiques et environnementaux : L'initiative Nansen, lancée par la Suisse et la Norvège en 2011 en collaboration avec le Haut commissariat pour les réfugiés (HCR) et l'OIM, a pour objectif de « renforcer la protection des personnes déplacées au-delà des frontières dans le contexte des catastrophes, y compris celles liées aux effets du changement climatique, et de prévenir ou réduire les risques de déplacement liés aux catastrophes ». En 2015, un « agenda pour la protection des personnes déplacées dans le cadre de catastrophes et de changements climatiques » a été mis au point et adopté par 109 États. L'initiative Nansen a été rebaptisée « plateforme sur les déplacements liés aux catastrophes ». Un comité de pilotage, dont la France est membre aux côtés d'autres États et organisations, doit promouvoir l'agenda au niveau multilatéral et mettre en œuvre ses recommandations. Dans ce cadre, notre pays a alloué à l'OIM une contribution volontaire de 300 000 € qui a servi, notamment, à lancer un projet pilote de réintégration de migrants dans des activités liées au développement durable en Afrique de l'Ouest, « retours verts ». La France assure, aux côtés du Bangladesh, la co-présidence de la plateforme depuis le mois de janvier 2018, vice-présidence jusqu'en juillet 2019, puis présidence jusqu'en janvier 2021. L'accord de Paris, sans aborder directement la question des migrations, prévoit, par la décision 1/CP.21 qui l'accompagne, la mise en place d'une équipe spéciale pour les déplacés climatiques afin d'engager des premières réflexions sur le sujet dans le cadre des « pertes et dommages », thème de négociation amené à être développé dans les futures COP. Le pacte mondial sur des migrations sûres, régulières et ordonnées, négocié sous l'égide de l'ONU, doit être adopté à Marrakech en décembre 2018. La France s'est attachée, au cours des négociations, à la prise en compte de la problématique des déplacements dus aux changements climatiques et à la dégradation de l'environnement. Le pacte prévoit, entre autres, d'améliorer l'analyse et le partage d'informations en la matière, de développer des stratégies d'adaptation et de résilience et de coopérer pour identifier, développer et renforcer les solutions pour les personnes contraintes de quitter leur pays du fait des changements climatiques et environnementaux. Enfin, il nous faut surtout agir en amont des départs : par la mise en œuvre de l'accord de Paris bien évidemment ; par l'amélioration des pratiques agricoles ; par la préservation des terres et des écosystèmes ; par l'arrêt de la déforestation et le reboisement ; par une meilleure gestion des ressources de l'océan. Des réponses concrètes doivent permettre de diminuer la pression sur les ressources naturelles, en particulier dans les zones les plus fragiles, et soutenir le développement de stratégies qui placent les écosystèmes au cœur du développement. Cela passe par la mobilisation de tous. À ce titre, pour la première fois dans le cadre d'une des conventions de Rio une décision a été adoptée sur le thème des migrations lors de la COP13 sur la désertification, à Ordos en septembre 2017. Les synergies entre les différentes organisations sur ce sujet doivent être favorisées. La France s'y emploie sans relâche.
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