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Erwan Balanant
Question N° 12247 au Ministère de l'europe


Question soumise le 18 septembre 2018

M. Erwan Balanant attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la mise en œuvre de la troisième stratégie internationale pour l'égalité entre les femmes et les hommes (2018-2022). Structurée autour d'une double approche, cette stratégie prévoit, non seulement, une prise en compte transversale de l'égalité des genres, notamment dans l'action extérieure de la France, mais également l'adoption de mesures spécifiques à la promotion des droits des femmes à l'échelle internationale. En outre, il est précisé que, d'ici 2022, 50 % de l'aide publique au développement bilatérale en volume de financement devra être affectée à des mesures genrées, contre 28 % aujourd'hui. L'adoption de cette stratégie va indéniablement dans le bon sens et doit être saluée. En effet, la réalisation de cet objectif ambitieux permettrait à la France de s'affirmer comme l'un des leaders européens dans la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes, sur la scène internationale. En parallèle, le 27 août 2018, le Président Emmanuel Macron a réaffirmé la prééminence que la France doit accorder à l'émancipation des femmes dans son aide publique au développement bilatérale (cf. discours du Président de la République à la conférence des Ambassadeurs, 27 août 2018). Toutefois, les moyens alloués à ces objectifs n'ont pas été détaillés. En effet, la troisième stratégie internationale pour l'égalité entre les femmes et les hommes ne fait état ni d'un budget précis dédié à la promotion de l'égalité des genres, ni d'un plan d'action concret. Afin de lutter avec pragmatisme contre la discrimination dont les femmes sont trop souvent victimes, il est primordial d'identifier les actions que la France souhaite prioritairement mener. Il semblerait tout particulièrement pertinent de mettre l'accent sur des mesures relatives à l'éducation (31 millions de filles en âge de fréquenter l'école n'étaient pas scolarisées en 2016) et à la lutte contre les violences (70 % des femmes dans le monde sont victimes de violence au cours de leur vie). Face à ces constats, le Gouvernement a t-il défini un plan d'action concret destiné à mettre en œuvre la troisième Stratégie internationale pour l'égalité entre les femmes et les hommes (2018-2022) ? Quels budget et modes de financement ont été retenus ? Enfin, il lui demande si le Gouvernement prévoit de confier la supervision de l'application de cette stratégie à une institution ou à un groupe de travail.

Réponse émise le 11 décembre 2018

La stratégie internationale de la France pour l'égalité entre les femmes et les hommes (2018-2022) s'inscrit dans le cadre de la grande cause quinquennale pour l'égalité décidée par le Président de la République. La conduite d'une diplomatie française féministe active et résolue s'inscrit en haut de l'agenda des priorités du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE). Il s'agit d'un exercice à caractère transversal à tous les niveaux du MEAE, mais aussi de ses 12 opérateurs, au premier rang desquels l'Agence française de développement. La stratégie pose pour objectif d'arriver en 2022 à 50% de l'aide publique au développement (APD) bilatérale (en volume) dédiée à des projets ciblant l'égalité entre les femmes et les hommes. Cette stratégie, dont les orientations et le contenu ont été salués par le Haut Conseil à l'Egalité entre les femmes et les hommes, les associations de la société civile (Plateforme Genre et Développement et Coordination Sud), est dotée d'un plan d'action concret et opérationnel, avec un cadre de redevabilité précis (objectifs, indicateurs, actions et acteurs impliqués). Elle est dotée d'une gouvernance claire, avec un portage institutionnel à haut niveau par le secrétaire général (2 comités de pilotage par an), une coordination par la Haute fonctionnaire à l'Egalité (un comité technique tous les trimestres, coordination de la feuille de route quinquennale sur l'égalité entre les femmes et les hommes au sein du MEAE), un secrétariat (la direction générale de la mondialisation) doté de l'expertise genre qui coordonne notamment les actions (sensibilisation, formation, animation des correspondants et points focaux "égalité femmes-hommes" du MEAE et au sein des opérateurs, soit environ 200 agents, suivi rigoureux du cadre de redevabilité, un groupe de travail réfléchissant sur l'efficacité et l'évaluation de l'aide genrée, des réflexions internes sur la traçabilité de notre aide genrée…) et enfin une implication plus grande des directions du MEAE, des ambassades et des opérateurs qui vient traduire le caractère transversal de la stratégie. Le programme 209 "Solidarité à l'égard des pays en développement", piloté par la direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats, participe à la mise en œuvre de la politique d'APD de la France et suit les orientations définies par la nouvelle stratégie pour l'égalité femmes-hommes, et plus concrètement la promotion des valeurs universelles des droits des femmes et la lutte contre toute forme de discrimination à l'encontre des filles et des femmes (aide aux réfugiées et aux femmes migrantes ; soutien des actions des défenseures des droits ; lutte contre les violences de genre en milieu scolaire notamment en Afrique de l'Ouest ; soutien pour l'adoption des sept résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies "Femmes, paix et sécurité" qui ont vu le jour en 2000 ; …), ainsi que l'accès aux droits et à la santé sexuels et reproductifs. Deux actions du programme 209 participent à la politique transversale : une action consacrée à la coopération bilatérale et une consacrée à la coopération multilatérale. L'action "coopération bilatérale" comprend en premier lieu le nouvel instrument remplaçant le FSP : le Fonds de solidarité prioritaire pour les projets innovants, les sociétés civiles, la francophonie et le développement humain (FSPI) : projets FSPI 2017 et projets FSPI 2018 confondus, 9.3 M€ en autorisations d'engagements et en crédits de paiement ont été mis à disposition des projets genre en 2018. Sont également comptabilisés dans cette action les projets dans le cadre de l'initiative Muskoka en faveur de la santé des femmes et des enfants, et de la promotion des droits sexuels et reproductifs. Les engagements liés à l'initiative ont pris fin en 2015 mais la France a choisi de poursuivre son engagement : le financement du Fonds français Muskoka, qui intervient dans neuf pays d'Afrique occidentale et à Haïti, a été maintenu à 10 M€ en 2018, et le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) de février 2018 a décidé de poursuivre son financement à hauteur de 10 M€ par an. L'action comprend de plus les projets d'initiative ONG gérés par l'AFD (en 2017, 65% des financements accordés aux organisations de la société civile (OSC) par la division du partenariat avec les ONG, soit un montant total de 52 M€ qui correspond à 74% des engagements en montant ont été notés 1 et 2 selon les critères de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), c'est-à-dire ayant des objectifs d'égalité femmes-hommes à la fois principaux et significatifs) et les projets menés par les services de coopération et d'action culturelle à titre bilatéral en matière de développement durable, et plus spécifiquement en vue de la lutte contre les discriminations et pour la promotion du droit des femmes. Outre les financements bilatéraux, la stratégie prévoie également le renforcement de son plaidoyer bilatéral, en encourageant les ambassadeurs et ambassadrices à se doter de manière systématique de plans d'actions intégrant les enjeux de genre et d'égalité entre les femmes et les hommes assortis de moyens et d'actions concrètes, notamment des feuilles de route portées par les correspondants et points focaux "égalité entre les femmes et les hommes". L'action "coopération multilatérale"du programme 209 subventionne plusieurs organismes participant à la politique de promotion de l'égalité femmes/hommes tels que l'ONU Femmes (entité des Nations unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes) le programme des Nations unies pour le développement (PNUD), l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (UNICEF), le Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP) etc. Ces organismes privilégient une approche"genre" transversale au travers de leurs activités (création de ressources électroniques pour l'évaluation politiques de lutte contre les discriminations, prise en compte dans la politique RH interne, etc.) et mènent des actions spécifiques sur le genre (programme d'éducation, de santé, de promotion des droits,…). En 2017, 6,7 M€ de contributions aux budgets réguliers furent données par la France pour la promotion du genre et de l'égalité entre les femmes et les hommes, dont 3,4 M€ pour UNICEF, 1,1 M€ pour ONU Femmes, 1,2 M€ pour le PNUD et 1,1 M€ pour le FNUAP. Dans le cadre de la nouvelle stratégie 2018-2022, la contribution française à ONU Femmes sera doublée dès 2019 ; la France poursuit également son soutien au Fonds des Nations unies pour les populations. Au niveau des opérateurs, la stratégie prévoit l'intégration effective de l'égalité des genres dans toutes les actions et les stratégies des 12 opérateurs. Concernant l'Agence française de développement (AFD), l'opérateur pivot en charge de la mise en œuvre de la politique française de coopération et de développement, renforce ses efforts visant l'égalité selon une trajectoire progressive avec pour objectif 700 M€ annuels (dons et prêts) alloués à des programmes phares et structurants en 2022 (marqueur 2 de l'OCDE, soit avec comme objectif principal l'égalité entre les femmes et les hommes). Cet objectif implique un triplement des volumes actuels, qui s'établissent entre 200 et 300 M€ par an. Le CICID a également décidé que l'AFD bénéficiera dès 2019 d'autorisations d'engagement s'élevant à 1 Md€ additionnels en dons-projets avec une enveloppe dédiée à la thématique "égalité entre les femmes et les hommes" de plus de 100 M€. L'atteinte de cet objectif ambitieux passe par plusieurs canaux : - s'assurer de l'adéquation et de l'articulation des contrats d'objectifs et des moyens des opérateurs avec cet objectif ; - veiller à une trajectoire de renforcement significatif des financements ayant comme objectif principal la réduction des inégalités entre les femmes et les hommes. Le premier comité de pilotage de suivi de la stratégie sous la présidence du secrétaire général du MEAE, a eu lieu à la fin du mois d'octobre, six mois après l'adoption de la stratégie, et a permis de faire un premier état des lieux de son application par les diverses directions du MEAE ainsi que par les opérateurs : plusieurs initiatives déjà mises en place ont ainsi été mises en lumière, montrant un réel engagement en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes à la fois dans l'action extérieure du MEAE mais aussi en son sein dans ses pratiques internes Le prochain comité de pilotage devra se réunir début mars 2019.

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