M. Jean Lassalle alerte M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les conséquences de la réorganisation du temps de travail des sapeurs-pompiers volontaires, relevant de la DETT (directive 2003/88/CE). En effet, cette directive, datant du 4 novembre 2003, sur l'aménagement du temps de travail, prévoit une durée maximale de 48 heures par semaine, calculée en moyenne sur une période pouvant aller jusqu'à six mois pour certaines activités, dont celle des sapeurs-pompiers. Un décret du 18 décembre 2013 entré en vigueur en janvier 2014, quant à lui, modifie la durée maximale de travail pour la fixer à 1 128 heures par semestre pour se conformer au droit européen, et la notice de ce décret précise que la moyenne de 48 heures hebdomadaires est calculée sur 47 semaines. Cette multiplication des normes contribue à complexifier la législation en la matière, la rendant illisible pour les acteurs concernés, notamment en matière d'heures supplémentaires. Ils sont aujourd'hui particulièrement inquiets pour leur statut. En effet, le 19 juin 2018, la direction de la sécurité civile a demandé au comité national des sapeurs-pompiers volontaires de travailler dans le sens de cette directive européenne qui viserait à les rapprocher des travailleurs classiques. Or une telle mesure sonnerait la fin du modèle français qui fonctionne pourtant très bien sur la base du volontariat. Il impliquerait, notamment, le plafonnement de l'activité cumulée travail-volontariat à 48 heures par semaine, l'obligation du repos de sécurité quotidien entre le travail et l'activité de sapeur-pompier volontaire et le paiement des charges salariales. La France n'a pas les moyens financiers (2,5 milliards d'euros) nécessaires pour recruter des sapeurs-pompiers pour répondre aux missions, le niveau de sécurité des populations serait alors fortement réduit. Cela représenterait donc, entre autres, une réduction du potentiel de garde de jour comme de nuit, une réduction massive du maillage territorial, un allongement des délais d'intervention et de prise en charge des victimes, et enfin, un anéantissement du potentiel de montée en puissance en cas de crise. Alors que la Cour de justice de l'Union européenne a, dans un arrêt rendu le 21 février 2018, reconnu la qualité de travailleur aux sapeurs-pompiers volontaires belges, le Gouvernement français a les mêmes chances de défendre ceux de la France devant la même juridiction. Et c'est pourquoi il lui demande, à l'aube du 125ème congrès national des sapeurs-pompiers le 26 septembre 2018, de lui exposer quelles mesures il compte mettre en place en faveur des sapeurs-pompiers volontaires et de l'ensemble des acteurs volontaires et bénévoles, qui, aux côtés des forces de sécurité publique, assurent l'assistance et le secours aux populations avec autant d'engagement altruiste et de « don de soi ».
La sécurité civile française repose sur un modèle qui démontre chaque jour sa pertinence et sa robustesse. Par son organisation et son implantation territoriale cohérente, notamment dans les zones rurales, le modèle français permet aussi bien de faire face aux accidents du quotidien, que d'affronter les crises exceptionnelles. Ce modèle, garant de la pérennité de la mission des 240 000 sapeurs-pompiers volontaires (SPV) et professionnels, doit être conforté. L'engagement des SPV contribue à garantir, chaque jour, la continuité opérationnelle du service public de protection et de secours à la population. La pérennité et l'attractivité du volontariat dépendent de sa capacité à s'adapter aux nouvelles formes d'engagement, attendues par les plus jeunes qui aspirent davantage aujourd'hui à pouvoir concilier vie privée, vie professionnelle et engagement. Pour stimuler le volontariat, rendre cet engagement pérenne et fidéliser dès à présent les plus jeunes, le ministre de l'intérieur a souhaité la mise en œuvre d'un nouveau plan d'action en faveur du volontariat, qui se déploiera dans les prochaines années. C'est dans ce cadre qu'une mission de réflexion dédiée a été lancée le 4 décembre 2017. La mission a remis son rapport au ministre de l'intérieur le 23 mai 2018. Le Gouvernement a présenté, le 29 septembre 2018, les 37 mesures du plan d'action que porte le ministère de l'intérieur en faveur du volontariat et qui vise trois objectifs principaux : attirer et susciter des vocations, en représentant mieux notre société, en donnant toute leur place aux femmes et en intégrant les jeunes venant de tous les horizons ; fidéliser et mettre le SPV au cœur du dispositif, en prenant en compte les compétences individuelles et les contraintes et les obligations des employeurs ; diffuser les bonnes pratiques et s'assurer de l'utilisation de tous les outils mis à disposition. Sur les 37 mesures présentées, 19 seront réalisées d'ici la fin du premier trimestre 2019. Mais c'est également au niveau européen que se dessine l'avenir de notre modèle de sécurité civile. L'objectif de la directive européenne concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail (2003/88/CE) est de garantir à tous les travailleurs de l'Union européenne un socle de droits communs, harmonisé et protecteur. L'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt « Matzak ») suscite une inquiétude chez les SPV, qui craignent une remise en cause du modèle français de sécurité civile. En effet, l'assimilation sans aménagement du volontariat à un travail pourrait limiter sa compatibilité avec tout autre emploi salarié en ce que le cumul d'activité résultant de cette assimilation pourrait potentiellement conduire à un dépassement des plafonds, rendant le salarié inemployable à l'issue d'une période d'activité de SPV. Dès lors, le Gouvernement, qui entend et partage la préoccupation des SPV et des élus, a immédiatement fait part de sa volonté de protéger notre système de secours, reposant précisément, pour sa plus grande part, sur l'engagement citoyen des SPV. Plusieurs pistes de travail sont engagées afin de protéger ce modèle de volontariat. D'une part, via une démarche auprès des autorités européennes pour consacrer le caractère spécifique de l'activité de SPV. D'autre part, afin de se prémunir de tout effet préjudiciable qu'entraînerait une application directe de l'arrêt « Matzak », le Gouvernement entreprendra la transposition de la directive, afin d'en exploiter les larges facultés de dérogation.
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