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Vincent Descoeur
Question N° 12646 au Ministère de la transition écologique et solidaire


Question soumise le 2 octobre 2018

M. Vincent Descoeur attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les conséquences des fortes augmentations des taxes sur les carburants décidées par le Gouvernement, qui atteindront +30,5 centimes d'euros par litre pour le gazole, +15,5 centimes d'euro par litre pour l'essence sans plomb et +17,7 centimes d'euro par litre pour le fioul domestique d'ici 2022. Les premières hausses de taxes intervenues début 2018 (+7,6 centimes d'euro par litre pour le gazole, +3,9 centimes d'euro par litre pour l'essence) sont venues s'ajouter à la hausse des cours du pétrole, si bien que le prix du diesel s'est envolé de 21 % en un an, celui de l'essence de 15 %. Ces spectaculaires augmentations impactent lourdement le pouvoir d'achat des ménages, tout particulièrement en milieu rural où ils n'ont pas d'autre alternative à l'utilisation de leur véhicule pour se déplacer. Elles impactent également les professionnels et surenchérissent les coûts des transports, s'ajoutant aux surcoûts liés à l'allongement des temps de parcours induits par la réduction de la vitesse maximale autorisée à 80 km/h sur le réseau secondaire dont les conséquences économiques ont été ignorées. Ces augmentations ont été décidées au nom de la transition énergétique, pour inciter les Français à utiliser d'autres énergies. Mais, en l'absence de mesures d'accompagnement significatives susceptibles de faciliter le transfert vers d'autres énergies, elles condamnent les foyers modestes comme ceux des classes moyennes à subir de plein fouet ces hausses de la fiscalité écologique faute d'avoir la capacité à investir dans des véhicules électriques -dont le coût reste trop élevé- ou de remplacer leur chaudière fioul par d'autres équipements trop onéreux. Dans ce contexte, la suppression partielle des aides du crédit d'impôt transition énergétique (le CITE dont la disparition totale est prévue fin 2018) qui permettait de financer des travaux de rénovation énergétique sur les résidences principales est incompréhensible. C'est pourquoi il lui demande si, en parallèle de ces hausses de taxes sur les carburants qui relèvent d'une « écologie punitive » particulièrement pénalisante pour les habitants des zones rurales, le Gouvernement entend mettre en place une politique ambitieuse en matière de substitution énergétique, notamment pour favoriser l'achat de véhicules « propres » et aider les ménages à réduire leurs coûts de chauffage ou financer des travaux de rénovation énergétique.

Réponse émise le 30 octobre 2018

L'évolution de la taxation sur l'énergie en 2018 s'explique par la volonté du Gouvernement de faire porter la fiscalité sur les énergies fossiles, afin de répondre à deux urgences : le changement climatique, d'une part, et la mauvaise qualité de l'air que nous respirons, d'autre part. En France, depuis 2014, les taxes sur l'énergie tiennent compte des émissions de carbone liées à la combustion des différents produits énergétiques, pour contribuer à l'atteinte de nos objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et viser la limitation du réchauffement planétaire conformément aux engagements pris dans le cadre de l'accord de Paris. Le plan climat adopté en 2017 prévoit une augmentation accélérée, lisible et durable du prix du carbone sur 5 ans. Cette augmentation programmée doit permettre d'influencer les comportements des ménages et des acteurs économiques. Elle doit également favoriser l'innovation verte, les travaux d'économie d'énergie ainsi que l'utilisation de produits énergétiques moins carbonés. L'augmentation du prix du carbone et la poursuite du rattrapage des fiscalités gazole/essences ont déja permis de réduire les consommations de carburants. Sur le premier semestre de l'année 2018, la consommation de gazole a diminué de 2,3 % par rapport à la même période en 2017. Ces résultats concordent avec les travaux économétriques les plus récents (Douenne, 2018) [1] qui estiment que, lors d'une hausse des prix des énergies de 10 %, les ménages réduisent leurs consommations à court terme : plus fortement pour les carburants (- 4,5 %) que pour les énergies du logement (- 2 %). Le Gouvernement est particulièrement attentif à ce que les plus modestes ne soient pas pénalisés et a mis en place diverses mesures d'accompagnement. Ainsi, pour permettre la transformation du parc automobile français à grande échelle, le Gouvernement a souhaité permettre l'accès de tous les français à la prime à la conversion des vieux véhicules, sans conditions de ressources, et doubler la prime pour les ménages non imposables. Le bonus écologique et la prime à la conversion sont des aides à l'acquisition des véhicules les moins polluants. Le bonus écologique vise essentiellement, en 2018, à favoriser le véhicule électrique. En revanche, la prime à la conversion pour les véhicules thermiques (diesel et essence) a été considérablement renforcée depuis le 1er janvier 2018. Elle s'appuie sur les émissions de CO2 ainsi que les certificats Crit'Air. Ainsi, un particulier peut bénéficier d'une prime allant jusqu'à 1 000 € (2 000 € s'il est non imposable, ce doublement pour les ménages non imposables étant une nouveauté introduite par le Gouvernement en 2018) s'il met au rebut un véhicule essence immatriculé avant le 1er janvier 1997 (nouveauté 2018) ou diesel immatriculé avant le 1er janvier 2001 (1er janvier 2006 s'il est non imposable) et acquiert un véhicule essence immatriculé après le 1er janvier 2006 ou diesel immatriculé après le 1er janvier 2011 (en 2017, seul l'achat d'une voiture particulière essence immatriculé après le 1er janvier 2011 par un ménage non imposable ouvrait droit à une prime). Cette mesure encourage l'évolution du parc des véhicules immatriculés vers les véhicules les plus économes et les moins polluants. À la mi-octobre, plus de 195 000 personnes ont déposé une demande pour bénéficier de la prime à la conversion qui s'avère être un vrai succès. De plus, le Gouvernement a généralisé le chèque énergie en remplacement des tarifs sociaux de l'énergie depuis le 1er janvier 2018, après 2 années d'expérimentation fructueuse. Il s'agit d'une aide automatique au paiement des factures d'énergie associées au logement, quelle qu'en soit la nature, ou des dépenses de rénovation énergétique du logement. Cette aide au paiement des factures d'énergie représente en moyenne 150 € par ménage et est en moyenne plus élevée que les tarifs sociaux de l'énergie qu'elle remplace. Afin d'accompagner au mieux les ménages en situation de précarité, son montant sera augmenté de 50 € en 2019. En ce qui concerne le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), à travers le projet de loi de finances pour 2019 le Gouvernement souhaite proroger le crédit d'impôt d'une année supplémentaire, soit jusqu'au 31 décembre 2019, en poursuivant les mesures d'efficience mises en place en 2018. Le maintien du CITE à son niveau actuel en 2019, sans modification des critères d'éligibilité, garantit la stabilité de ce mécanisme de soutien et entretient la dynamique de rénovation. Cette prolongation sera accompagnée d'une simplification de l'éco-prêt à taux zéro en 2019 (éco-PTZ) afin, notamment, de lever la contrainte de liquidité pesant sur les ménages ne réalisant pas de bouquet de travaux : l'éco-PTZ devient accessible quel que soit le projet de rénovation, et permet d'éviter aux ménages d'avancer le montant du CITE au moment des travaux, conformément à la promesse de campagne présidentielle. Dans le cadre d'un recentrage du CITE sur les équipements les plus performants, un dispositif transitoire de sortie des chaudières au fioul et des matériaux isolants pour les parois mobiles (portes, volets, fenêtres) du CITE a été mis en place au premier semestre 2018. En effet, l'isolation des parois vitrées, par exemple, est dix fois moins performante que l'isolation des parois opaques (comme l'a quantifié la revue de dépenses de 2017). En parallèle, deux nouvelles dépenses ont été rendues éligibles au CITE en 2018 : les dépenses d'audit énergétique (hors cas où la législation le rend obligatoire) et la part représentative des équipements dans les frais de raccordement à un réseau de chaleur et de froid. Il n'est pas prévu de disparition du CITE. Des travaux seront entrepris au premier trimestre 2019 pour engager la transition vers un montant forfaitaire : le CITE ne serait alors plus déterminé en fonction du prix des travaux mais en fonction des économies d'énergie et de la production de chaleur et de froid renouvelable, de façon à donner un signal sur la performance des divers équipements et prestations éligibles. Le nouveau dispositif forfaitaire sera façonné pour être facilement compréhensible par les ménages et ainsi faciliter le passage à l'acte de rénovation. [1] Douenne T., « The vertical and horizontal distributive effects of energy taxes : A micro-simulation study of a French policy », PSE, 2018.

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