M. Guy Teissier interroge M. le ministre de l'éducation nationale sur la prise en charge des élèves atteints de troubles spécifiques du langage et des apprentissages (TSLA dits communément troubles Dys). En effet, ces derniers et leur famille vivent un véritable parcours du combattant : du repérage à l'accès à l'emploi, ce parcours est semé d'embûches en raison de la méconnaissance des troubles par les professionnels de la santé, de l'éducation, de l'emploi et de la vie au jour le jour (par exemple le passage du permis de conduite), mais aussi du manque de structures ou de professionnels compétents et disponibles sur leur territoire. Les troubles Dys (dyslexie, dysphasie, dyspraxie, dyscalculie, trouble déficit de l'attention avec ou sans hyper activité...), qui sont des troubles cognitifs spécifiques neurodéveloppementaux, concerneraient 10 % de la population. Parmi les 140 000 élèves sortant du système scolaire sans qualification, il y a certainement de très nombreux élèves atteints de troubles Dys. Or les enseignants ne sont pas nécessairement formés à la prise en charge de ces élèves ce qui expliquerait en grande partie le parcours chaotique de ces élèves, se traduisant souvent par une orientation par défaut et parfois par une déscolarisation partielle ou totale, et créant ou aggravant une situation de handicap. En formation initiale, la formation dispensée dépend à ce jour de la motivation des ESPE à intégrer cette problématique de façon pratique dans le cursus de formation. D'une ESPE à une autre, d'une filière à une autre, le nombre d'heures consacré est très variable et de toute façon très faible, alors que les élèves atteints de ces troubles sont répartis sur l'ensemble du territoire et que leurs troubles ont un retentissement sur un grand nombre de matières (voire sur toutes). En formation continue, seuls les enseignants motivés et volontaires peuvent accéder à des contenus souvent dispensés par les associations à titre bénévole. De nombreux enseignants ne profitent pas de ces formations, alors qu'ils croisent tous les ans des élèves « Dys » et tout au long de leur carrière. Par ailleurs, les méthodes d'apprentissage des langues dont l'anglais restent inadaptées aux élèves et particulièrement aux personnes Dys. Face à ces situations, il lui demande quelles mesures il compte prendre pour faire connaître les neurosciences et évaluer le degré de connaissance des enseignants sur ces troubles en formation initiale, en formation continue afin d'assurer l'égalité des chances sur l'ensemble du territoire.
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) reconnaît les troubles spécifiques du langage et des apprentissages (TLSA) comme une difficulté durable d'apprentissage, dont la sévérité varie d'une personne à l'autre. Les élèves atteints de troubles TSLA peuvent bénéficier de deux types de dispositifs spécifiques permettant la mise en place, par les enseignants, de mesures d'adaptations et d'aménagements pédagogiques : - le plan d'accompagnement personnalisé (PAP) tel que défini par l'article D. 311-13 du code de l'éducation, est destiné aux élèves présentant des difficultés scolaires durables en raison d'un trouble des apprentissages mais ne relevant pas d'une reconnaissance de handicap par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH), instance décisionnelle de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) ; - la mise en place d'un projet personnalisé de scolarisation (PPS) mentionné à l'article D. 351-5 du code de l'éducation, nécessite que la famille s'adresse à la MDPH afin que l'élève puisse bénéficier d'une reconnaissance de handicap de la CDAPH. Le PPS définit et coordonne les modalités de déroulement de la scolarité et les actions pédagogiques, psychologiques, éducatives, sociales, médicales et paramédicales répondant aux besoins particuliers des élèves présentant un handicap. En ce qui concerne la formation des enseignants, pour la formation initiale, les écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) sont chargées de former les enseignants à la prise en charge des élèves en situation de handicap. Les masters "Métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation" (MEEF), proposés dans chaque ESPE, comprennent nécessairement des enseignements du tronc commun relatifs aux domaines suivants : - le processus d'apprentissage des élèves ; - la prise en compte de la diversité des publics et en particulier des élèves en situation de handicap ; - les méthodes de différenciation pédagogique et de soutien aux élèves en difficulté. Ainsi, les enseignants stagiaires bénéficient d'une formation sur « l'école inclusive (adaptation scolaire et scolarisation des élèves en situation de handicap) », afin de répondre aux questions liées à l'accueil et à l'accompagnement des élèves à besoins éducatifs particuliers, notamment des élèves DYS, dans leur classe. La formation initiale des enseignants fait actuellement l'objet de réflexions en vue d'une prochaine réforme. A l'issue du colloque international relatif à l'éducation inclusive, des 18 et 19 octobre 2018, une nouvelle dynamique a été enclenchée et la question d'un approfondissement de la formation des enseignants afin d'améliorer l'inclusion et le suivi des élèves à besoins éducatifs particuliers est pleinement prise en compte. En ce qui concerne la formation continue, depuis le décret n° 2017-169 du 10 février 2017, les enseignants peuvent bénéficier d'une formation professionnelle spécialisée, dans le cadre de la formation continue, en s'inscrivant au Certificat d'aptitude professionnelle aux pratiques de l'éducation inclusive (CAPPEI). Dans le cadre de cette nouvelle formation, ils peuvent notamment suivre un parcours comprenant des modules relatifs à la scolarisation des élèves présentant des TSLA. A la rentrée scolaire 2018, 1 300 candidats se sont inscrits pour suivre la formation du CAPPEI et 1 200 stagiaires se sont inscrits aux modules de formation d'initiative nationale dans le domaine de l'adaptation scolaire et de la scolarisation des élèves handicapés. De plus, des actions de formation sont offertes aux enseignants des premier et second degrés dans le cadre des plans académiques de formation (PAF) ou des plans départementaux de formation (PDF). Elles peuvent prendre la forme de formations d'initiatives locales organisées en école, en établissement scolaire ou en inspection afin d'être au plus près des besoins des enseignants. Les inspecteurs de l'éducation nationale et les chefs d'établissement veillent ainsi à offrir aux équipes pédagogiques des réponses aux besoins éducatifs particuliers des élèves TSLA (parfois en prenant appui sur les propositions faites par les associations). Les directions des services départementaux de l'éducation nationale (DSDEN) sont toutes pourvues d'inspecteurs de l'éducation nationale chargés de l'adaptation scolaire et de la scolarisation des élèves handicapés dédié à l'accompagnement (IEN ASH). Ils s'occupent du suivi des élèves à besoins éducatifs particuliers ou en situation de handicap, tels que les élèves DYS, et de la coordination des différents acteurs. Des professeurs ressources peuvent aussi accompagner les enseignants afin de répondre de manière concrète aux besoins des élèves présentant des TSLA. L'entrée de l'école dans l'ère numérique est, en outre, l'occasion de déployer de multiples outils innovants facilitant les apprentissages de tous les élèves, tels que la plateforme M@gistère dédiée à la formation initiale et continue des enseignants du premier degré et du second degré, qui comporte des outils de formation à distance et en présentiel consacrés au handicap et notamment aux élèves présentant des troubles des apprentissages. Le projet de création de la plateforme numérique nationale « Cap école inclusive » est également en cours de réalisation. Cet outil proposera des ressources et des actions d'accompagnement et de formation à destination des enseignants des classes ordinaires, afin de les aider notamment à accueillir un élève avec TSLA dans leur classe. Enfin, le Conseil scientifique de l'éducation nationale, créé le 10 janvier 2018, a pour mission d'apporter des fondements scientifiques aux évolutions de la politique publique d'éducation, en prenant particulièrement appui sur les neurosciences et afin de mettre en valeur les pratiques pédagogiques les plus adaptées, notamment aux élèves DYS.
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