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Thomas Rudigoz
Question N° 13470 au Ministère de la culture


Question soumise le 23 octobre 2018

M. Thomas Rudigoz interroge Mme la ministre du travail sur l'opportunité de créer une branche professionnelle spécifique aux métiers d'arts. Au nombre de 281, ceux-ci sont en effet demandeurs d'une restructuration des branches, qui ne prennent actuellement pas en compte leurs spécificités, mais les rattachent à l'industrie ou à l'artisanat. Ainsi, un charpentier d'art se voit rattaché à la convention collective des ouvriers du bâtiment et un ébéniste à celle de la fabrication d'ameublement. La transversalité de ce secteur a pourtant bien été reconnue dans la loi artisanat, commerce et très petites entreprises du 18 juin 2014 qui définit les métiers d'art, complétée par la loi liberté de création, architecture et patrimoine du 7 juillet 2016. Pour sécuriser l'avenir de ces 38 000 entreprises, qui génèrent un chiffre d'affaires de 8 milliards d'euros, il apparaît aujourd'hui nécessaire de poursuivre cet élan en encourageant la négociation d'une convention collective des métiers d'art. L'enjeu d'une telle restructuration étant, dans un premier temps, de faciliter l'accès à la formation à ces métiers - pour certains oubliés - qui participent au rayonnement du savoir-faire traditionnel français : céramiste, passementerie, feutrier, tourneur de bois, marqueteur, ornemaniste, etc. Il lui demande donc de bien vouloir exprimer sa position quant à la création d'une branche professionnelle spécifique aux métiers d'arts.

Réponse émise le 5 février 2019

Les métiers d'art français sont très nombreux. Ainsi, la liste des métiers d'art, dressée dans l'arrêté du 24 décembre 2015, nécessaire aux Chambres de métiers et de l'artisanat pour l'inscription des artisans sur le répertoire des métiers, en dénombre plus de 280. De plus, en 2016, la loi a réaffirmé la diversité d'exercice de ces métiers. En effet, les professionnels des métiers d'art peuvent être des artisans, des salariés, des professionnels libéraux, des fonctionnaires ou des artistes auteurs. Par ailleurs, les professionnels des métiers d'art qui exercent comme artisans, comme dirigeants ou salariés de petites et moyennes entreprises (PME) ou d'entreprises de taille intermédiaire ne se retrouvent pas dans un seul secteur économique, mais dans de très nombreux secteurs d'activités (luxe, architecture, patrimoine, spectacle vivant…). Les professionnels des métiers d'art exercent aussi dans de nombreuses branches professionnelles telles le bâtiment et travaux publics, l'ameublement, le cuir, le textile, la céramique, le verre… Or, nos branches professionnelles, intégrées et verticales, prennent en compte toutes les tailles d'entreprise et la ligne de partage existe bel et bien entre les entreprises industrielles et les entreprises artisanales. La loi confie à la branche la mission de réguler la concurrence entre les entreprises relevant de son champ d'application en établissant les règles sociales communes pour l'ensemble des acteurs économiques. Il est impensable d'imposer demain aux souffleurs de verre, qui créent des pièces uniques ou en série, les mêmes règles concurrentielles qu'aux restaurateurs de peintures, qui interviennent sur des œuvres patrimoniales en respectant une déontologie scientifique. La loi impose aussi aux branches professionnelles la gestion de la formation professionnelle. Dans les métiers d'art, la formation porte essentiellement sur la transmission de savoir-faire techniques artisanaux. Il n'est pas envisageable demain d'imposer les mêmes dispositifs de formation aux maroquiniers et aux tailleurs de pierre. Une branche professionnelle qui rassemble tous les acteurs d'une filière a la capacité de mutualiser ses ressources et de proposer des formations qui répondent aux besoins spécifiques de toute la filière. Ainsi, la filière bijouterie a-t-elle créé cinq certificats de qualification professionnelle (polisseur, sertisseur, joaillier, concepteur numérique et gemmologue) parce qu'elle seule maîtrise au mieux les enjeux de formation de sa filière. Par ailleurs, les formations aux différents métiers d'art ne relèvent pas uniquement des branches professionnelles, mais aussi des services de l'État (ministère de l'éducation nationale, ministère de la culture) et des chambres consulaires (chambres de métiers et de l'artisanat et chambres du commerce et de l'industrie), lesquels sont très attentifs à la préservation et à la transmission des savoir-faire artisanaux français. En outre, les mesures fiscales adaptées aux métiers d'art existent déjà, tel le crédit d'impôt métiers d'art, prorogé jusqu'en 2019, et étendu aux restaurateurs du patrimoine en 2017. Le rapprochement des champs conventionnels, initié par les lois du 5 mars 2014, du 17 août 2015 et du 8 août 2016, ne relève pas du champ de compétence du ministère de la culture, mais bien de la responsabilité des organisations professionnelles et syndicales des branches concernées. L'esprit de la loi du 8 août 2016 est, en effet, d'inciter les partenaires sociaux à s'approprier la démarche de restructuration du paysage conventionnel. Le ministère du travail n'intervient, par subsidiarité, qu'en l'absence de rapprochements volontaires selon des critères alternatifs définis par la loi et précisés par un décret du 15 novembre 2016 (nombre de salariés, application géographique uniquement régionale, absence d'activité conventionnelle sur les 15 dernières années). En raison de la faiblesse des effectifs salariés, les métiers d'arts étant majoritairement représentés par des entreprises unipersonnelles, une « branche professionnelle spécifique aux métiers d'arts » répondrait difficilement aux critères du décret précité.

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