Mme Anne-France Brunet attire l'attention de M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'action et des comptes publics, chargé du numérique, sur l'exclusion générée par le phénomène de dématérialisation des services de l'État. Le principe d'égalité devant le service public impose de s'interroger sur les conséquences de la digitalisation des procédures administratives pour certaines populations. Les acteurs locaux et personnels accompagnants alertent les pouvoirs publics sur les conditions d'accès aux services de l'État pour les personnes âgées. En effet, ces populations font face à de grandes difficultés de déplacement, corollaire de leur isolement et ne bénéficient pas (pour la plupart) d'un accès internet. De plus, comme le souligne le rapport « Accès aux droits » de Jacques Toubon, les personnes âgées bénéficiant d'un accès internet souffrent d'une « fracture numérique ». Le manque de maîtrise du matériel informatique et l'impossibilité de se faire accompagner sont aussi des facteurs d'exclusion. Si la numérisation répond au principe de mutabilité et donc à des enjeux d'intérêt général, remédier à l'exclusion des populations les plus âgées et les plus précaires est essentiel à la préservation des principes républicains. Enfin, cette situation entre en contradiction avec la loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement. Elle lui demande comment le Gouvernement entend répondre à cet enjeu.
Le déploiement des services publics numériques pour les démarches courantes des français est une priorité du Gouvernement. Celui-ci a ainsi annoncé l'objectif de 100% des démarches dématérialisées d'ici 2022. Selon le tableau de bord des services publics numériques 2017, en 2016, parmi les particuliers déclarant avoir réalisé une démarche administrative au cours des 12 derniers mois, 3 sur 4 déclarent l'avoir effectuée en ligne. 90% se sont déclarés satisfaits de la démarche effectuée en ligne. L'enjeu est bien d'accompagner concrètement les publics les plus vulnérables et les moins au fait des usages numériques, et notamment les personnes âgées. Ainsi, la stratégie nationale d'orientation de l'action publique annexée au projet de loi pour un État au service d'une société de confiance affirme que « l'administration doit assurer, notamment aux personnes vulnérables ou n'utilisant pas l'outil numérique, des possibilités de communication et de médiation adaptées à leurs besoins et à leur situation ». C'est dans cette perspective que s'inscrit notamment la politique d'inclusion numérique, priorité déclarée du Secrétaire d'État chargé du numérique. Ce dernier a ainsi présenté fin mai 2018 la stratégie pour un numérique inclusif. Elle est exposée dans un rapport largement concerté (rapport-inclusion.societenumerique.gouv.fr). Parallèlement à la rédaction du rapport, les travaux ont permis de créer une plateforme en ligne, pour aider au déploiement dans les territoires de la stratégie par l'agrégation de ressources, outils et bonnes pratiques (inclusion.societenumerique.gouv.fr). Un kit d'intervention rapide est également disponible afin d'accompagner les personnes les plus éloignées de l'informatique et améliorer la maitrise de ces outils (https://kit-inclusion.societenumerique.gouv.fr/). La mission Société numérique, au sein de l'Agence du numérique, travaille également à ce défi, notamment en structurant les acteurs de la médiation numérique à travers une coopérative. Elle propose également des données et des savoirs précis pour renforcer l'information et la compréhension des pratiques numériques et pour orienter les politiques publiques. Enfin, elle expérimente un dispositif de chèque culture numérique #APTIC (Agir pour l'Inclusion Numérique) dont l'objectif est de financer la prise en charge des usagers pour la réalisation de ces démarches en ligne dans des lieux labellisés afin de permettre leur mise en autonomie. Une première expérimentation de 300 chéquiers distribués à 300 personnes sur 3 territoires (Drôme, Gironde, La Réunion) a été réalisée au printemps 2017 pour l'accompagnement à la réalisation de la déclaration de revenu en ligne. 75% des personnes accompagnées se sont déclarés autonomes à la suite de la réalisation d'un parcours de formation dans 6 espaces publics numériques partenaires de l'expérimentation. Le 19 juillet 2018, le Président de la République a annoncé le déploiement national de #APTIC sous la forme d'un « pass numérique ». D'autres mesures ont été prises pour répondre au défi d'accompagner les usagers les plus vulnérables. Outre l'assistance téléphonique généraliste de service-public.fr, le Gouvernement accélère l'ouverture des maisons de services au public (MSAP) afin de répondre aux enjeux de l'éloignement soulevé par le parlementaire. A l'été 2018, 1 281 MSAP ont d'ores et déjà été ouvertes. Elles ont vocation à devenir des interfaces privilégiées entre les usagers et l'administration en délivrant, en un lieu unique, une offre d'accompagnement personnalisé dans les démarches de la vie quotidienne (aide et prestations sociales, emploi, insertion, retraite, énergie, prévention santé, accès aux droits, mobilité, vie associative, etc.). Lors des premières rencontres nationales des maisons de services au public, le commissaire général à l'égalité des territoires (CGET) a réaffirmé sa volonté de voir ce dispositif s'étendre. L'enjeu pour accompagner ces publics est aussi d'outiller les administrations chargées de la dématérialisation des démarches et de les acculturer à la démarche d'inclusion. Le programme « Cerfa numérique » porté par la direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État comprend plus de 30 critères de qualité dont 9 visent spécifiquement à lutter contre l'exclusion numérique et à faciliter le travail des médiateurs.
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