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François-Michel Lambert
Question N° 14072 au Ministère de l'économie


Question soumise le 13 novembre 2018

M. François-Michel Lambert alerte M. le ministre de l'économie et des finances sur les menaces pesant sur le secteur industriel français du fait du développement des « fonds vautours ». Bien que non-définis par le code de commerce et le code monétaire et financier à l'exception d'un article manifestement insuffisant intégré dans la loi « Sapin 2 », la pratique s'accorde pour définir les fonds vautours comme constituant des fonds d'investissements spéculatifs spécialisés dans le rachat de dettes d'entreprises ou souveraines poursuivant l'objectif de dégager une plus-value, sinon à l'issue d'une opération de restructuration de la dette ou d'une action contentieuse devant la justice tirée du défaut de paiement majorée d'intérêts de retard, des frais de justice engagés ou de dommages et intérêts. À ce jour, ces fonds d'investissements menacent considérablement le tissu industriel français en s'attaquant directement aux PME, ETI et grands groupes parmi lesquels Altran, Casino ou encore Alstom et Eurodisney. Les représentations syndicales patronales s'inquiètent à leur tour de ce phénomène et de l'amplification de l'émission d'obligations convertibles ou échangeables en actions nouvelles ou existantes en alertant l'Autorité des marchés financiers sur ces pratiques. Outre une incidence directe sur le risque de se retrouver en procédure collective, ces pratiques fragilisent encore plus frontalement le tissu social puisque des milliers d'emploi sont menacés par de telles pratiques pariant sur l'échec de l'entreprise. Il lui demande dès lors, comment il compte agir concrètement contre ce phénomène menaçant considérablement entreprises et emplois.

Réponse émise le 31 décembre 2019

L'intérêt des fonds activistes américains pour le marché européen a pu augmenter ces dernières années. Ceux-ci considèrent alternativement que certaines sociétés européennes sont surévaluées, ce qui peut attirer des stratégies de vente à découvert ou, à l'inverse, ils peuvent considérer certaines entreprises européennes comme sous-valorisées et monter à leur capital pour faire valoir leur point de vue. Aujourd'hui en retrait par rapport aux trois pays du monde concentrant le plus grand nombre d'opérations (les États-Unis, le Royaume-Uni et le Japon regroupent 85 % des interventions), la France semble néanmoins attirer de plus en plus de fonds d'investisseurs activistes. De plus, les marchés européens et français constituent un environnement propice au développement des opérations de fonds activistes étrangers en raison de leur ouverture capitalistique, de l'endettement important des entreprises et de multiples boursiers jugés plus faibles en Europe qu'aux Etats-Unis. Si les équipes dirigeantes de certaines entreprises sur la place de Paris mettent en garde contre les effets néfastes que pourrait avoir l'activisme actionnarial pour les entreprises françaises, en considérant que les fonds activistes auraient une approche systématiquement court-termiste, une telle vision paraît réductrice. En effet, certains fonds activistes (qui exercent activement leurs droits, et notamment leurs droits de vote) peuvent prendre des positions longues dans des entreprises et chercher une évolution durable de leur stratégie, de leur capital ou de leur gouvernance (notamment par la nomination d'administrateurs). D'autres fonds pourront chercher un retour sur investissement plus rapide, mais le fait pour un actionnaire de vouloir faire usage de ses droits n'est pas en soi répréhensible. S'agissant des pratiques agressives de certains fonds, le cadre européen est déjà très complet et concerne tant les ventes à découvert que les prêts de titre. A ce jour, les moyens dont dispose l'Autorité des marchés financiers (AMF) permettent d'intervenir en cas de déstabilisation d'un acteur de marché, puisqu'elle peut même, le cas échéant, interdire temporairement la vente à découvert. Les teneurs de compte ne peuvent prêter des titres sans l'accord préalable de leurs propriétaires. De plus, la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi PACTE, promulguée le 24 mai 2019, apporte de nouveaux outils qui pourraient être mobilisés à court terme pour lutter contre les effets néfastes de l'action de ces fonds (fonds de pérennité économique, abaissement du seuil de retrait obligatoire). Enfin, un moyen de se prémunir contre de telles attaques est pour les entreprises elles-mêmes d'entretenir un dialogue continu et structuré avec ses actionnaires, afin de fidéliser sa base actionnariale. De nombreux travaux ont été réalisés ces derniers mois sur la question de l'activisme actionnarial. Le Gouvernement prendra des initiatives sur la base des recommandations qui lui ont été adressées.

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