Mme Frédérique Lardet attire l'attention de Mme la ministre du travail sur les opportunités d'emplois offertes par la révolution numérique et la nécessité de s'y préparer. Selon une étude récente du World economic forum, la robotisation devrait entraîner dans les années qui viennent à l'échelle mondiale la suppression de 75 millions d'emplois et la création de 133 millions. Une occasion à saisir, à condition d'être formé aux bouleversements introduits par la nouvelle organisation du travail. Or, en procédant à un classement du nombre d'heures nécessaires en moyenne aux salariés de chaque pays ou région du monde (Afrique du Nord, Europe de l'Est), pour effectuer la montée en compétences nécessaire, en s'appuyant sur les déclarations des employeurs qui y sont implantés, cette étude montre que la France semble être mal partie dans la formation de ses salariés à cette révolution numérique. En effet, pour faire face aux bouleversements technologiques, il faudrait en moyenne cent cinq jours de formation par salarié français ce qui le place bon dernier du classement, derrière un salarié philippin ou un salarié mexicain et très loin du salarié suisse qui n'aurait besoin que de 83 jours... Aussi, à l'heure où l'intelligence artificielle et l'automatisation croissante du travail s'imposent sur le marché à l'échelle internationale, elle lui demande quelles solutions sont envisagées par ses services pour renforcer les compétences des salariés français en la matière et assurer à la France toute sa place dans la compétition mondiale.
Une forte transformation des métiers touche tous les secteurs de l'activité, en lien avec la révolution numérique et la conversion écologique. Ainsi 50 % des emplois seront transformés dans les 10 ans qui viennent ; 10 à 20 % des emplois seront créés et 10 % à 20 % sont menacés de disparition par l'automatisation et la désintermédiation des tâches entraînées par la robotisation ou le numérique ; 40 % des actifs ayant un niveau inférieur au Bac occupent des métiers à fort risque d'automatisation contre 5 % des actifs diplômés de l'enseignement supérieur. Face aux évolutions du marché du travail, à la mutation des emplois et pour lutter contre le chômage de masse, la compétence est la clé de voûte d'une croissance durable et inclusive. Pour y faire face, des travaux sont engagés par le ministère du travail avec les branches professionnelles afin de répondre à une meilleure identification des besoins en emploi et en compétences à venir. Le plan d'investissement dans les compétences (PIC), qui représente un effort sans précédent de 15 milliards d'euros sur cinq ans - a pour objectif de développer ces démarches. Elles permettent notamment d'identifier les besoins d'évolution d'offre de formation et les perspectives d'évolution en compétences des actifs, ainsi que les parcours professionnels qu'il convient d'élaborer pour répondre aux besoins identifiés. Le PIC prévoit en outre en 2018 l'achat de 10 000 formations concernant les métiers du numérique afin de répondre aux besoins d'entreprises identifiés sur des métiers en tension. 5 000 formations seront réalisées par la Grande Ecole du Numérique et 5 000 formations seront mises en œuvre par Pôle emploi dans le cadre d'un appel à projet vers les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA). Elles s'adressent aux demandeurs d'emploi non qualifiés (niveau infra IV – infra baccalauréat). La durée de ces formations a été allongée à 800 heures (contre 400 heures habituellement) pour permettre à des publics éloignés de l'emploi de se former le plus efficacement possible sur ce type de métier qui requiert des compétences techniques particulières. En répondant aux besoins identifiés par les entreprises qui souhaitent s'adapter au numérique, ces formations doivent permettre aux bénéficiaires d'occuper un emploi dès la sortie de la formation. En complément, la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel vise à intégrer cette évolution des besoins en compétences pour les entreprises dans la conception des diplômes et titres délivrés par l'Etat ainsi que par les certificateurs privés. La commission en charge de la certification professionnelle de France compétences, qui succèdera à l'actuelle commission nationale des certifications professionnelles s'articulera avec la compétence de prospective, de veille et d'évaluation de France compétences : à ce titre, elle veillera à la cohérence, à la complémentarité et au renouvellement des certifications professionnelles ainsi qu'à leur adaptation à l'évolution des qualifications et de l'organisation du travail. Par ailleurs la loi instaure les opérateurs de compétences qui remplaceront les vingt organismes paritaires collecteurs agréés (Opca) actuels, qui, aujourd'hui, collectent et gèrent les cotisations formation des entreprises. Leurs missions seront ainsi recentrées sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, sur la construction des diplômes, le financement des CFA et le service de proximité aux entreprises. Enfin, la loi introduit un nouveau dispositif puissant de « reconversion et promotion par l'alternance ». Baptisé « Pro A », il vise à permettre aux salariés, tout en gardant leur contrat de travail et leur rémunération, d'accéder à une formation qualifiante en alternance, soit pour une promotion interne, soit pour une reconversion. Il permettra aussi de répondre aux besoins spécifiques des certains secteurs d'activité et d'anticiper les reconversions liées aux mutations, tout en conservant l'emploi. Ce dispositif est un élément clé qui s'inscrit en complément du plan de formation de l'entreprise, désormais, plan de développement des compétences, et du droit individuel, via le compte personnel de formation (CPF), qui, par le projet de loi, devient un véritable outil d'émancipation sociale à la main des actifs, avec la protection d'une garantie collective.
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