Mme Frédérique Lardet attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur le droit des faillites. Par rapport à ses voisins européens, le droit des faillites français offre des garanties moindres à ses créanciers, à cause d'une double spécificité, le non-respect des rangs de priorités entre les dettes par les tribunaux et la priorité accordée aux dettes fiscales et sociales. Cette situation est dommageable. D'une part, car elle entraîne un allongement des délais de résolution des faillites, 1,9 an en France contre 1,2 an en Allemagne et 1,0 an au Royaume-Uni, et d'autre part, un recouvrement des créances manquant d'efficacité, le taux moyen de récupération des créances est 77,5 % en France contre 83,7 % en Allemagne et 88,6 % au Royaume-Uni. In fine, ce manque de prévisibilité des pertes encourues par les créanciers en cas de faillite, rend plus difficile l'accès des PME aux financements et, en dehors de l'Hexagone, réduit l'attractivité de la France pour des investisseurs potentiels. Cependant, face à la diversité du droit des faillites en Europe, la Commission européenne a présenté au Parlement européen un projet de directive dite « Insolvabilité » tendant notamment à harmoniser ce droit sur la base des meilleures pratiques. Le projet de loi PACTE, en cours d'examen au Parlement est destiné à habiliter le Gouvernement à transposer cette directive. De fait, en créant des classes homogènes de créanciers, le projet de loi d'habilitation permettra de résoudre la question des droits de priorité entre dettes, puisque les classes de créanciers ainsi créées auront des droits distincts dans les procédures de résolution de faillite, ouvrant la possibilité pour le tribunal d'arrêter un plan de continuation malgré l'opposition d'une ou plusieurs classes de créanciers. Demeure la question du privilège accordé aux dettes fiscales et sociales et à leur non soumission au processus de restructuration, au même titre que toutes les autres dettes. Elle lui demande si le Gouvernement entend agir en la matière pour éliminer ou tout au moins diminuer l'avantage conféré par le super privilège accordé aux dettes fiscales et sociales, à l'exception de celui des salaires impayés, afin d'aligner le droit français sur celui de ses principaux voisins et concurrents.
Le privilège est un droit que la loi reconnaît à un créancier, en raison de la qualité de la créance, d'être préféré aux autres créanciers sur l'ensemble des biens de son débiteur ou sur certains d'entre eux seulement. La primauté de l'intérêt général sur les intérêts particuliers et la nécessité d'assurer le bon fonctionnement de l'État ont conduit le législateur à soustraire les créances du Trésor et de la Sécurité Sociale à la loi du concours entre créanciers, en leur octroyant un privilège chargé de garantir leur recouvrement. La suspension des privilèges du Trésor et de la Sécurité Sociale aurait des répercussions sur le recouvrement des créances fiscales et sociales, qui deviendraient dès lors chirographaires. Cette suspension viendrait amoindrir les recettes de l'État et de la Sécurité Sociale dans un contexte budgétaire difficile. Par ailleurs, cette suspension ne serait pas de nature à améliorer significativement la situation des créanciers chirographaires. En effet, dans le cadre des procédures collectives, les créances privilégiées du Trésor ou de la Sécurité Sociale sont déjà primées par les créances salariales bénéficiant du super privilège, les créances bénéficiant du privilège des frais de justice et les créances garanties par le privilège de conciliation. Néanmoins, ces sujets feront partie de la réflexion qui devra être menée dans le cadre de la transposition de la directive dite « Insolvabilité » et de la modernisation du droit des sûretés souhaitée par le Gouvernement, dans l'optique d'avoir un ordre de séniorité des créanciers qui soit à la fois plus lisible et mieux adapté à une répartition des créanciers en classes.
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