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Sébastien Nadot
Question N° 1515 au Ministère de la justice


Question soumise le 3 octobre 2017

M. Sébastien Nadot attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la question du droit de vote des majeurs placés sous tutelle, tout particulièrement sur les conséquences du retrait de ce droit pour les personnes en situation de handicap. La loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 prévoit que « lorsqu'il ouvre ou renouvelle une mesure de tutelle, le juge statue sur le maintien ou la suppression du droit de vote de la personne protégée ». Ainsi, à l'occasion de l'ouverture ou du renouvellement d'une telle mesure, le juge est autorisé à supprimer le droit de vote de la personne protégée. La suppression du droit de vote, attribut le plus emblématique de la citoyenneté, est hautement stigmatisant pour la personne touchée : la déchéance de citoyenneté n'est par ailleurs prononcée que pour des infractions pénales en raison de leur gravité, la société signalant ainsi le caractère d'indignité qu'elle attache à ces infractions. Le droit de vote conditionne, en partie, le sentiment d'inclusion sociale. En priver certaines catégories de la population revient à leur signifier leur marginalité. Sont tout particulièrement concernées les personnes en situation de handicap mental qui se retrouvent dans le même temps exclues de la société et assimilées aux personnes sanctionnées par la loi pour des fautes graves. À juste titre, le Gouvernement a fait du handicap une priorité nationale. Le quatrième plan pour l'autisme prévoit notamment de mettre l'accent sur « l'inclusion sociale et la citoyenneté des adultes autistes ». Par ailleurs, la Convention internationale relative aux droits des personnes handicapées [CIDPH], ratifiée par la France en 2010, s'oppose à cette pratique discriminatoire. Il lui demande comment elle entend répondre au sentiment d'injustice que ressentent des personnes protégées par une mesure de tutelle et auxquelles le droit de vote a été retiré, ressenti que partagent également leurs familles.

Réponse émise le 6 février 2018

Jusqu'à la réforme de la protection juridique des majeurs entrée en vigueur le 1er janvier 2009, la loi prévoyait que les personnes sous mesure de tutelle n'avaient pas le droit de vote, sauf décision contraire du juge. Depuis cette date, le principe est inversé puisque désormais, les personnes sous tutelle disposent de leur droit de vote, sauf si le juge en décide explicitement autrement (article L. 5 du code électoral). Le juge ne peut se prononcer sur la suppression du droit de vote que sur avis circonstancié d'un médecin. Ce retrait doit s'apprécier au regard de la situation concrète du majeur protégé. Cette décision peut bien sûr faire l'objet d'un recours devant la cour d'appel ou faire l'objet d'une demande de modification si le majeur exprime sa volonté d'exercer son droit de vote et que les éléments médicaux ne s'y opposent plus. Il n'y a donc aucune stigmatisation d'une catégorie de personnes puisqu'il n'existe aucune automaticité du retrait du droit de vote. Par ailleurs, compte tenu du risque de voir le suffrage de ces personnes dévoyé, la France a fait une déclaration interprétative s'agissant de l'article 29 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées selon laquelle : « L'exercice du droit de vote est une composante de la capacité juridique qui ne peut connaître de restriction que dans les conditions et selon les modalités prévues à l'article 12 de la Convention ». Néanmoins, une réflexion doit être menée dans le cadre d'un groupe de travail interministériel et interprofessionnel sur la protection juridique des majeurs qui sera mis en place au début de l'année 2018 par le directeur des affaires civiles et du sceau à la demande de Madame la Garde des Sceaux, ministre de la justice. La question du droit de vote du majeur en tutelle y sera abordée.

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