M. Ian Boucard attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur l'inquiétude que suscite le recours de plus en plus fréquent aux enseignants contractuels dans le système éducatif français. La Cour des comptes, dans un rapport de mars 2018, a alerté sur le recours croissant aux enseignants contractuels dans l'éducation nationale, tout en indiquant « qu'au vu de leurs effectifs et de leur rôle, ils ne peuvent plus être considérés comme une variable d'ajustement ». En effet, le recours aux non titulaires a doublé en quelques années et les cadres de l'éducation nationale se retrouvent souvent dans l'obligation de devoir les recruter pour faire face à un manque d'instituteurs ou de professeurs. Outre le fait que beaucoup d'enseignants contractuels ne sont pas formés pour enseigner, il résulte aussi d'une étude du conseil national d'évaluation des politiques scolaires que le recrutement des contractuels est plus élevé dans les territoires défavorisés qui vient renforcer l'inégalité territoriale déjà existante. Par exemple, en Île-de-France, la part des enseignants non titulaires varie du simple au triple entre les territoires parisiens ou de banlieues favorisées et les territoires cumulant le plus de difficultés socio-économiques (Cnesco, 2018). La mission de l'éducation nationale n'est pas de faire croire à des parents qui lui confient leurs enfants, que tout le monde peut s'improviser enseignant du jour au lendemain sans aucune qualification. Face à cette situation qui pose de réelles questions sur la qualité de l'enseignement dispensé aux élèves et sur le nouveau mode de gestion du système éducatif français, il demande au Gouvernement quelles mesures il entend prendre pour éviter les inégalités territoriales d'enseignement et prévenir le recrutement de personnes non formées aux compétences pédagogiques. Il souhaite également savoir quelle stratégie il compte mettre en place pour rendre la filière de l'enseignement plus attractive et qualitative dans le recrutement des enseignants et comment il compte construire une vraie politique de ressources humaines en lien avec les besoins démographiques.
Le cadre de gestion rénové des agents contractuels exerçant des fonctions d'enseignement, d'éducation et de psychologue, entré en vigueur en septembre 2016, rappelle que la loi pose le principe de l'occupation des emplois permanents de l'État par des fonctionnaires et que les concours de recrutement constituent la voie normale d'accès aux corps enseignants. Cependant, en raison de la difficulté à faire coïncider, à tout moment, les ressources en personnels titulaires disponibles et les besoins d'enseignement par discipline et par académie, et afin de garantir la continuité du service public de l'éducation, le recrutement d'agents contractuels peut s'avérer nécessaire. En décembre 2018, le ministère de l'éducation nationale recensait que, dans le second degré, la part des contractuels exerçant des fonctions d'enseignement, d'éducation ou de psychologue, recrutés en contrat à durée déterminée (CDD) et en contrat à durée indéterminée (CDI) s'élevait à 8,15% de l'effectif total de ces catégories de personnels. Si le recrutement de ces agents contractuels relève des prérogatives des recteurs d'académies, un cadre réglementaire unique garantit une harmonisation des pratiques de gestion de ces personnels. A ce titre, ils bénéficient d'une formation adaptée, d'un accueil et d'un accompagnement pédagogique dans leur discipline d'enseignement et d'un tuteur. En sus de la formation d'adaptation à l'emploi qu'ils reçoivent lors de leur primo-recrutement, plusieurs sessions de formation sont programmées à leur profit par les écoles supérieures du professorat et de l'éducation qui seront prochainement transformés en instituts nationaux supérieurs du professorat. Dans l'académie de Créteil, à titre d'exemple, des formations transversales d'une durée de 2,5 jours sont également proposées à tous les nouveaux recrutés. Les agents contractuels peuvent également participer aux formations disciplinaires prévues par le plan académique de formation. L'attention portée à la formation des enseignants contractuels dans les académies est accompagnée d'une action volontariste du ministère afin de lutter contre les inégalités territoriales. Conformément à la promesse de campagne du Président de la République, l'implication des professeurs en école en collège REP+ est valorisée par une prime spécifique depuis la rentrée 2018. Les réseaux REP et REP+ ne se limitent pas aux zones urbaines, mais concernent également des établissements et écoles situés dans les territoires ruraux lorsque ceux-ci accueillent un public confronté à de fortes difficultés socio-économiques. Il ressort du rapport des inspections générales [1] remis au ministre en juillet 2018 que si le pourcentage d'élèves issus des catégories socio-professionnelles défavorisées est de 38,88 % dans les collèges localisés dans les territoires ruraux, il est d'un peu plus de 67 % dans les REP+, la moyenne nationale se situant autour de 40 %. Ce travail pour améliorer l'attractivité des métiers de l'enseignement suppose en amont de pouvoir susciter les vocations professionnelles. Dans ce contexte, le ministère va mettre en place, dès la rentrée 2019 d'un nouveau dispositif ambitieux de préprofessionnalisation. Conçu pour mieux recruter grâce à une professionnalisation plus précoce, il proposera des parcours cohérents permettant de se familiariser progressivement avec le monde de l'école. Il accompagnera les candidats vers la réussite au concours, en les guidant progressivement vers le métier de professeur. Ces parcours, qui concilieront réussite universitaire et professionnalisation, fonderont les choix de carrière sur une expérience concrète. La mise en œuvre de ce dispositif de préprofessionnalisation prévu dès la rentrée 2019 s'appuiera sur le dispositif existant des assistants d'éducation en adaptant les fonctions des assistants d'éducation ayant vocation à devenir professeurs. Ils pourront désormais, à l'occasion d'un parcours de préprofessionnalisation, découvrir le métier d'enseignant et ses missions par immersion progressive dans son environnement professionnel. Néanmoins, ceux qui ne souhaitent pas s'engager dans un tel parcours pourront continuer d'exercer des fonctions d'assistance éducative, notamment de surveillance, dont la loi leur réserve la primauté. [1] Rapport IGEN et IGAENR n° 2018-080, Mission ruralité – adapter l'organisation et le pilotage du système éducatif aux évolutions et défis des territoires ruraux – rapport d'étape n° 2, juillet 2018.
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