Mme Valérie Boyer appelle l'attention de M. le ministre de la culture sur l'inscription du savoir-faire des santonniers provençaux au patrimoine culturel immatériel de l'humanité de l'UNESCO. Depuis plusieurs années, de nombreux Français s'insurgent contre ceux qui veulent interdire les crèches de Noël dans des espaces publics. Récemment, le tribunal administratif de Marseille a jugé que les crèches provençales de l'hôtel de ville de Salon, Châteauneuf-les-Martigues, Carry-le-Rouet et Berre l'Étang devaient y rester. S'agissant des crèches installées en mairies des 2e et 3e arrondissements et des 13e et 14e arrondissements de Marseille, il a été décidé d'annuler les décisions des élus qui refusaient de désinstaller les crèches en question. Appelées «Santuns » ou « petits saints » en provençal, ces figures apparaissent après la Révolution française. La population, interdite de fréquenter les églises, devenues propriétés de l'État, ressent alors le besoin de recréer la crèche de Noël. D'abord confectionnés en mie de pain ou en papier mâché, les santons sont ensuite fabriqués en argile cuite, à partir de 1798. Progressivement, la technique s'affine. On les peint, on les habille. La gamme des santons s'étoffe. Aux santons religieux, s'ajoutent les personnages du village, les vieux métiers... Malheureusement, presque huit siècles plus tard, une minorité qui se revendique de « la libre pensée » cherche à effacer toute trace des racines du pays, au nom d'une certaine conception de la laïcité. Le 11 juillet 2006, la France a ratifié la convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. En 2018, la France compte 17 éléments inscrits au patrimoine culturel immatériel, notamment la tapisserie d'Aubusson, la dentelle au point d'Alençon ou encore les savoir-faire liés au parfum en Pays-de-Grasse (la culture de la plante à parfum, la connaissance des matières premières naturelles et leur transformation, l'art de composer le parfum). Selon l'UNESCO : « le patrimoine culturel ne s'arrête pas aux monuments et aux collections d'objets. Il comprend également les traditions ou les expressions vivantes héritées des ancêtres et transmises aux descendants, comme les traditions orales, les arts du spectacle, les pratiques sociales, rituels et événements festifs, les connaissances et pratiques concernant la nature et l'univers ou les connaissances et le savoir-faire nécessaires à l'artisanat traditionnel. Bien que fragile, le patrimoine culturel immatériel est un facteur important du maintien de la diversité culturelle face à la mondialisation croissante. Avoir une idée du patrimoine culturel immatériel de différentes communautés est utile au dialogue interculturel et encourage le respect d'autres modes de vie. Pour fêter la tradition régionale des crèches provençales, des foires aux santons se déroulent chaque année sur la Canebière, à Marseille, à Aix-en-Provence, à Aubagne et dans de nombreux villages provençaux. La ville d'Arles accueille tous les ans le salon international des santonniers. À Fontaine-de-Vaucluse, au musée des santons et des traditions de Provence, est exposée la plus belle collection publique. Ces petits personnages de terre appartiennent à l'histoire, à celle de nombreuses familles. De génération en génération, chacun a réécrit son histoire qui, du XIIIe siècle à nos jours, associe la Provence à la légende. Pour les uns, le santon est témoin de la chrétienté. Pour d'autres, il raconte la résistance du peuple de Marseille aux interdictions des messes de minuit sous la révolution de 1789. Il convient de souligner qu'en ce moment de l'histoire où le pays ne sait plus qui il est, où certains veulent faire haïr ce que les Français ont été et même ce qu'ils sont encore. Les crèches provençales appartiennent à l'identité, à la culture, à l'histoire de nombreuses familles françaises. Les santonniers provençaux perpétuent tant bien que mal cette tradition si chère au cœur des Français. Cela fait partie du patrimoine culturel. Par conséquent, elle souhaiterait savoir si la France pourrait envisager de demander à l'UNESCO l'inscription du savoir-faire des santonniers provençaux au patrimoine culturel immatériel de l'humanité.
En ratifiant la convention UNESCO de 2003 sur la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, la France s'est engagée, tout comme 177 autres États parties aujourd'hui, à prendre les mesures nécessaires pour assurer la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel présent sur son territoire, avec la plus large participation possible des communautés. L'identification de ce patrimoine spécifique constitue la première étape réglementaire de cette politique de sauvegarde. Elle se réalise au moyen de l'Inventaire national, géré et diffusé par le ministère de la culture, chargé de mettre en œuvre la convention. L'inscription sur cet inventaire est aussi nécessaire pour toute candidature auprès de l'UNESCO. À l'échelle internationale, en effet, le Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel administre, à partir des candidatures recueillies et évaluées, trois dispositifs de reconnaissance : une liste représentative, une liste de sauvegarde urgente et un registre des bonnes pratiques. Depuis 2015, les candidatures examinées par l'UNESCO sont bornées à 50 maximum par an, tous États confondus. Chaque État partie peut déposer une unique candidature nationale tous les 2 ans et plusieurs candidatures multinationales chaque année, comme pilote ou partenaire du dossier commun. Le patrimoine culturel immatériel comprend les pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir-faire, ainsi que les instruments, objets, artefacts et espaces culturels associés, que les communautés (groupes ou individus) reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel. Pour relever du Patrimoine culturel immatériel, une pratique culturelle doit respecter certains critères : être vivante, dynamique et facteur d'identité et de continuité ; respecter la diversité culturelle et la créativité humaine ; favoriser le rapprochement, le dialogue et la compréhension entre les êtres humains, sans provoquer de malentendu entre les communautés ni créer tensions sociales et inégalités ; encourager le respect mutuel (y compris l'égalité des genres) et le développement durable ; exclure, enfin, toute référence au conflit, à la guerre ou à la violence, entre des êtres humains, des animaux ou entre êtres humains et animaux. S'ils le souhaitent, il appartient aux santonniers de Provence de s'organiser pour engager une démarche d'inscription à l'Inventaire national du patrimoine culturel immatériel en France. L'inventaire national comporte déjà des savoir-faire artisanaux et des événements festifs en lien avec des pratiques rituelles. Au sein du ministère de la culture, l'accompagnement des porteurs de projet est assuré par la direction générale des patrimoines.
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