Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nadia Ramassamy
Question N° 16072 au Ministère des solidarités


Question soumise le 22 janvier 2019

Mme Nadia Ramassamy alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur l'insuffisante offre de soins sur l'île de La Réunion. En novembre 2018, La Réunion a été touchée par une crise sociale unique dans son histoire. Si le mouvement des « Gilets jaunes » a débuté, comme dans l'Hexagone, avec la hausse des taxes sur les carburants, le malaise qui touche l'île est plus profond et prend ses racines dans la situation économique, sociale et sanitaire de La Réunion. La réponse de la ministre des outre-mer, qui n'a fait que reprendre les éléments prévus par le plan pauvreté de septembre 2018, n'a pas pris en compte la pleine mesure sociale de la crise. La Réunion est frappée par une offre de soins très insuffisante. Le taux d'équipement des établissements de santé est inférieur à celui des établissements hexagonaux, mais aussi à ceux d'autres territoires ultramarins comme en Martinique ou en Guadeloupe. L'institut d'émission des départements d'outre-mer, compte, pour 100 000 habitants, 583 lits en métropole contre 360 à La Réunion, soit une différence de 40 %. À ce déficit dans la capacité d'accueil, vient se greffer un nombre de patients toujours plus élevé en raison du vieillissement de la population et de la hausse des maladies chroniques. Le coût des soins est aussi structurellement plus élevé qu'en métropole en raison des frais d'approche et d'un manque de fidélisation des personnels mais aussi de la précarité d'une partie des citoyens réunionnais (30 % de chômage, 40 % des habitants sous le seuil de pauvreté et 38 % de la population qui disposent de la CMU). À cela s'ajoute l'octroi de mer, dont le secteur de la santé n'est pas exonéré. Cette situation pèse sur le niveau de santé des Réunionnais et n'est pas sans conséquence sur leur niveau et leur qualité de vie. Ainsi, elle lui demande ce que le Gouvernement envisage de d'entreprendre pour combler l'insuffisante offre de soins à La Réunion.

Réponse émise le 19 novembre 2019

Le Gouvernement a fait de l'amélioration de l'accès aux soins une priorité. Cette ambition a été déclinée au sein de la Stratégie nationale de santé, portée par la ministre des solidarités et de la santé. Elle fixe le cadre de la politique de santé des cinq prochaines années et notamment des objectifs forts de réduction des inégalités sociales et territoriales tout en maintenant des exigences de qualité et de sécurité des soins au plus haut niveau. Au sein de cette Stratégie nationale de santé, un volet spécifique est dédié à l'amélioration de la santé en outre-mer. En effet, la progression des maladies chroniques et en particulier du diabète, de même que l'exposition à des risques épidémiques infectieux posent de réels enjeux de santé publique sur les territoires d'outre-mer et en particulier à La Réunion. Les efforts en matière de prévention, de dépistage et de veille sanitaire seront intensifiés. L'offre de soins, pour répondre au mieux aux besoins de la population, doit également s'adapter en tenant compte des particularités du territoire réunionnais. Après une large concertation avec les acteurs de santé, couronnée de succès par une entière approbation du projet régional de santé 2018-2028 qui constitue la feuille de route pour la politique de la santé de La Réunion pour les 10 prochaines années, l'agence régionale de santé (ARS) de l'Océan Indien pilote la mise en œuvre d'un plan d'actions prioritaires pluriannuel, tout à la fois ambitieux et pragmatique, portant sur des problématiques et des enjeux prioritaires notamment les pathologies chroniques, les addictions, la santé mentale, les personnes âgées et les personnes handicapées. Le renforcement de l'attractivité de l'île pour les professionnels de santé constitue un enjeu prioritaire pour structurer une offre de soins de qualité. Ainsi, des mesures d'accompagnement ont été introduites pour faciliter les parcours des professionnels engagés en outre-mer, depuis la formation jusqu'aux conditions d'exercice. Le dispositif des assistants spécialistes à temps partagés, pour lesquels des crédits sont alloués en 2018 et 2019 au financement de 100 nouveaux postes dans les territoires ultramarins dont La Réunion, répond au double objectif de renforcer l'offre locale de soins et de participer à la réduction des inégalités territoriales, inscrit dans la stratégie nationale de santé et décliné spécifiquement à l'outre-mer. Le défi démographique à relever aujourd'hui est grand car le nombre de médecins généralistes ou spécialistes exerçant en libéral est en baisse régulière depuis 2010 et cette baisse est susceptible de se poursuivre jusqu'en 2025. C'est pourquoi le Gouvernement a lancé, dès octobre 2017, le plan d'égal accès aux soins : un plan comportant un panel de solutions, adaptables à chaque contexte local car la réponse aux difficultés démographiques n'est pas unique. Ce plan porte aussi un changement de paradigme car l'installation de professionnels de santé ne constitue pas la seule action à envisager : tous les leviers de nature à « projeter » du temps médical dans les zones en tension sont à mobiliser (comme la facilitation des consultations avancées ou encore la télémédecine …). Depuis le lancement du plan, des dynamiques de mobilisation et de coopération se sont nouées localement ; impulsées et animées au quotidien par les ARS, ces dynamiques ont déjà permis d'enregistrer les premiers progrès sur le terrain. La stratégie « Ma Santé 2022 » annoncée par le Président de la République en septembre 2018 est venue donner un nouvel élan à ce plan en accélérant la mise en place de certains dispositifs comme les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), et en proposant des leviers supplémentaires pour libérer du temps médical et redynamiser les soins de proximité : comme notamment la création de 4 000 postes d'assistants médicaux pour seconder et appuyer les médecins dans un ensemble de tâches administratives et soignantes ou encore le déploiement de 400 médecins généralistes dans des territoires prioritaires, en exercice partagé entre une structure hospitalière et une structure ambulatoire, ou salariés d'un centre ou établissement de santé. Cette politique trouve d'ailleurs sa traduction concrète sur l'île de La Réunion où la densité de médecins généralistes libéraux (98 contre 90/100 000 habitants) reste toutefois supérieure à la moyenne nationale, à travers notamment : - la dynamique autour des projets d'exercice coordonné, dont on sait qu'il représente un fort levier d'attractivité : douze maisons de santé pluridisciplinaires maillent le territoire grâce à l'engagement de l'ARS et de ses partenaires. 3 projets sont en cours ; l'objectif des 3 prochaines années étant de doubler le nombre de ces structures. - la télémédecine, levier essentiel pour abolir les distances, se déploie aussi : outre le dispositif de téléconsultation mis en place à Cilaos, plusieurs projets ont été développés sur le champ de la télé-expertise (plaies chroniques) ou pour le suivi des patients diabétiques. L'ARS soutient aussi l'émergence de projets de CPTS : celles-ci représentent un nouveau mode d'exercice coordonné et reposent sur le portage en commun par les professionnels de santé d'un territoire d'un projet de santé qui réponde aux besoins de la population. Elles sont appelées à se déployer au niveau où les professionnels de santé, médecins de toutes spécialités, pharmaciens, paramédicaux… ont déjà des habitudes de travail en commun et peuvent aller encore plus loin dans la coopération et le partage des tâches. Une nouvelle dynamique est lancée ; l'enjeu des prochains mois consistera à conforter la montée en charge et le déploiement de ces dispositifs innovants. Le caractère insulaire et l'éloignement géographique appellent également à la mise en place de solutions adaptées pour permettre à la population d'accéder à une offre de soins graduée laquelle s'appuie sur le développement de l'offre de recours sur l'île de La Réunion pour diminuer encore les évacuations sanitaires ; cette ambition s'est notamment matérialisée par l'attribution de nouvelles autorisations au centre hospitalier universitaire (CHU) pour la mise en place d'activités de recours (allogreffes, cardiologie pédiatrique et prise en charge médico-chirurgicale des pathologies congénitales de l'enfant). Par ailleurs, afin d'appuyer la structuration d'une offre de soins adéquate, les établissements de la Réunion seront accompagnés jusqu'en 2020. Des accompagnements national et régional viennent à ce titre appuyer les efforts d'efficience engagés par le CHU qui a bénéficié en 2018 d'un soutien de 13 millions d'euros de la part de l'Etat pour accompagner ses efforts en vue de résorber son déficit structurel. Cet établissement a également reçu un avis favorable en janvier 2018 pour son projet d'investissement et bénéficiera d'une aide nationale de 40 millions d'euros, sous réserve que les recommandations faites par le comité interministériel de performance et de la modernisation de l'offre de soins soient respectées. Les établissements de santé réunionnais font face à certains surcoûts spécifiques liés plus particulièrement à l'insularité et à l'éloignement. Ainsi, le Gouvernement a souhaité que soient prises en considération ces sujétions à travers un coefficient géographique qui s'élève, pour La Réunion, à 31 %. Si la Réunion reste la zone géographique marquée par les surcoûts les plus importants, les travaux conduits n'ont pas démontré une augmentation des écarts avec la métropole depuis 2012. Néanmoins, dans le cadre de l'examen en cours du PLFSS 2020, le Gouvernement s'est engagé à remettre au Parlement, dans un délai d'un an, un rapport sur le financement des établissements hospitaliers ultramarins afin d'évaluer les coefficients géographiques liés aux facteurs spécifiques de ces territoires et les différents modes de financement dont ils font l'objet. Les établissements de santé de La Réunion bénéficient également au titre de missions d'intérêt général (MIG) d'une compensation des surcoûts liés à la prise en charge des patients en situation de précarité. La part des dotations de MIG attribuées aux territoires ultramarins a connu une progression de 20% entre 2016 et 2018 passant de 171 millions d'euros à 204 millions d'euros. La Réunion a tout particulièrement bénéficié de la revalorisation des MIG Précarité et CPDS (Centres de préventions et de soins). En 2018, ces financements ont été augmenté de près de 32 millions d'euros et les modalités de répartition ont été revues afin de mieux prendre en compte la situation des établissements ultramarins qui se sont vu attribuer 25% de l'enveloppe dédiée à cette MIG. De la même façon, la MIG finançant les permanences d'accès aux soins de santé (PASS) a vu son montant doubler dans les outre-mer passant de 3,5 millions d'euros en 2016 à 7 millions d'euros en 2018. L'ensemble de ces actions qui se mesurent en réalisations concrètes au bénéfice de la population réunionnaise concourt à la modernisation durable de l'offre de soins à La Réunion.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.