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Éric Straumann
Question N° 16260 au Ministère de l'action


Question soumise le 29 janvier 2019

M. Éric Straumann alerte M. le ministre de l'action et des comptes publics sur la problématique du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu pour les travailleurs frontaliers intérimaires exerçant leur activité en Allemagne. Ce sujet a été soulevé par une question, publiée au Journal officiel le 14 août 2018 page 7249 sous le numéro 11749, restée sans réponse à ce jour. Les craintes exprimées à l'époque se confirment aujourd'hui. En effet, l'administration fiscale impose aux entreprises françaises de travail temporaire le prélèvement à la source sans tenir compte du prélèvement déjà imposé par le l'administration fiscale allemande. En pratique, les intérimaires qui travaillaient déjà en Allemagne paieront l'impôt allemand chaque mois et se feront rembourser en N+1 et seront prélevés de l'impôt français mensuellement. Les salariés intérimaires avanceront donc deux impôts mensuellement et ne se verront rembourser le prélèvement allemand que l'année suivante. En effet, l'administration fiscale allemande poursuit son prélèvement sans tenir compte du prélèvement à la source français. De son côté l'administration française ne tient pas compte des impôts payés en Allemagne au prétexte que les intérimaires se feront rembourser l'année suivante. Le Finanzamt allemand aurait prévenu l'administration fiscale française de cette problématique voilà déjà quelques mois. Cette difficulté va affecter le pouvoir d'achat des intérimaires frontaliers exerçant en Allemagne qui renonceront à des missions de l'autre côté du Rhin. Ce dysfonctionnement va également mettre en difficulté les entreprises de travail temporaire françaises exerçant en Allemagne. Une réponse à cette anomalie s'impose de toute urgence. Il l'interroge donc sur ses intentions sur ce sujet.

Réponse émise le 16 avril 2019

Le 6 de l'article 13 de la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959 modifiée stipule que les traitements et salaires des travailleurs sont imposables dans l'État d'exercice de leur activité et dans l'État de leur résidence, à charge pour ce dernier d'éliminer la double imposition. L'Allemagne peut ainsi imposer les salaires des travailleurs résidents de France exerçant sur son territoire, à l'exception toutefois de ceux qui bénéficient du régime des frontaliers prévu au 5 de ce même article. L'administration fiscale allemande s'assure, avant de renoncer à cette imposition et de dispenser l'employeur de retenue à la source, que les conditions requises pour bénéficier du régime frontalier sont satisfaites. Or, celles-ci peuvent être difficiles à établir a priori, en particulier s'agissant de travailleurs intérimaires, l'accord conditionnant le bénéfice du régime au fait que le frontalier travaille régulièrement dans la zone frontalière et rentre chaque jour à son domicile et un accord amiable du 16 février 2006 prévoyant que cette condition n'est plus remplie au-delà de 45 jours par an travaillés hors de la zone ou passés hors du domicile. Par suite, et pour ce qui concerne les intérimaires, les services fiscaux allemands subordonnent l'octroi a priori de l'exonération de retenue à la source prélevée sur les revenus de source allemande au respect des conditions cumulatives citées dans la question. À défaut de cette dispense a priori, et si la personne concernée remplit in fine les conditions d'éligibilité au régime frontalier au titre de l'année écoulée - ce qui entraîne une imposition exclusive dans son État de résidence (France) - l'Allemagne procède au remboursement a posteriori de l'impôt prélevé localement, permettant ainsi le respect de la convention fiscale franco-allemande et l'absence de double imposition. À cet égard, le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu n'affecte pas plus qu'auparavant le régime fiscal des travailleurs frontaliers qui, par dérogation, prévoit une imposition exclusive des revenus dans l'État de résidence du bénéficiaire. Dans le cas particulier des travailleurs frontaliers intérimaires résidents de France qui perçoivent des salaires provenant d'une activité exercée en Allemagne, ils devaient le cas échéant, verser des tiers provisionnels ou des mensualités puis acquitter le solde dès lors que ces revenus étaient exclusivement imposables en France. À compter de 2019, ces tiers provisionnels et mensualités sont remplacés par un prélèvement à la source dû au titre de l'année de perception des revenus qui prendra, si l'entreprise de travail temporaire est située en France, la forme d'une retenue à la source effectuée par le débiteur lors du paiement de ces revenus lorsqu'ils sont imposables en France. Dans le cas où l'entreprise de travail temporaire qui emploie le travailleur frontalier intérimaire résident de France est établie en Allemagne, le prélèvement à la source prend la forme pour ces personnes d'un acompte calculé par l'administration sur la base de la dernière déclaration des revenus du contribuable. Le contribuable qui estime que le prélèvement à la source résultant de cette situation est trop important compte tenu de sa situation et de ses revenus réels de l'année considérée peut demander la modulation à la baisse de ce prélèvement. Il pourra également demander à revoir sa situation s'il estime qu'il ne remplira pas les conditions pour bénéficier du régime frontalier. Par ailleurs, il est précisé que si les travailleurs intérimaires ne relèvent pas du régime de travailleur frontalier, leurs salaires sont imposables à la fois en France et en Allemagne. Afin d'éliminer la double imposition, l'impôt acquitté en Allemagne au titre de ces revenus ouvre droit à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt sur le revenu français dans la limite du montant de l'impôt français correspondant. Dans cette situation, afin d'éviter un double prélèvement, le taux de prélèvement à la source calculé par l'administration fiscale en France est diminué pour tenir compte de l'imputation de l'impôt acquitté en Allemagne sur l'impôt dû en France. Les services du ministère des finances allemands ont été saisis par les services du ministère de l'économie et des finances en vue de faciliter les modalités pratiques permettant d'établir l'État en droit de prélever à la source, et en particulier de revoir et assouplir les procédures permettant d'obtenir a priori une dispense de la retenue à la source allemande. Ces travaux ont d'ores et déjà été engagés. Néanmoins cette solution, qui reste celle qui doit être privilégiée à terme et qui permettra de mettre en œuvre un dispositif pérenne et stable, doit être accompagnée de mesures spécifiques permettant d'arrêter immédiatement les doubles prélèvements opérés au titre des revenus 2019 pour les frontaliers intérimaires concernés. Dans cet esprit, le Gouvernement a également demandé de faire en sorte d'arrêter immédiatement les prélèvements 2019 au titre de l'impôt français pour tous les contribuables dans cette situation, quand bien même l'impôt sur les revenus perçus en 2019 serait dû in fine en France. Un message a été transmis aux entreprises de travail intérimaire, notamment par l'intermédiaire d'associations comme Prism Emploi, et une communication a été engagée en ce sens par les directions départementales des finances publiques qui traitent ces dossiers. Il s'agit d'une mesure qui vise à ne pas pénaliser ces contribuables en trésorerie en 2019 mais qui a bien vocation à rester exceptionnelle et dans l'attente de l'aboutissement des négociations engagées avec les autorités allemandes sur ce sujet.

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