Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Philippe Huppé
Question N° 17036 au Ministère de l'éducation nationale


Question soumise le 19 février 2019

M. Philippe Huppé attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la place accordée à l'enseignement des langues régionales dans le cadre de la réforme du baccalauréat. Telle que présentée à la fin de l'année 2018, cette réforme, qui s'attache à établir des parcours au plus près des aspirations des lycéens et à les responsabiliser dans leur choix, est exemplaire à de nombreux égards. En plus de l'enseignement du socle commun des matières fondamentales, les lycéens devront choisir trois enseignements de spécialité en première puis deux en terminale pour approfondir les disciplines qui les intéressent. En complément, ils pourront choisir des enseignements optionnels. Le 6 février 2019, le Conseil supérieur de l'éducation (CSE) a confirmé la possibilité d'inclure les langues vivantes régionales dans les enseignements de spécialité. Si cette décision offre à l'enseignement des langues régionales une place symbolique jamais acquise, elle le met, dans les faits, en concurrence avec des langues étrangères telles que l'espagnol et l'allemand et donc, le rend moins attractif. Aussi, les enseignants de langue occitane craignent que leur matière subisse une dévaluation et témoignent de leurs inquiétudes quant au coefficient qui sera accordé au baccalauréat et à l'impossibilité, dans le cadre optionnel, de cumuler l'enseignement d'une langue régionale avec une autre option. Enfin, il convient de rappeler qu'aujourd'hui l'offre de formation de l'occitan est inégalement assurée, mettant en péril la qualité et la durabilité de cet enseignement. Dans l'académie de Montpellier, il reste une trentaine d'enseignants du second degré contre 56 au début des années 2000. À titre d'exemple, dans la ville de Clermont-l'Hérault, il ne demeure plus aujourd'hui que deux postes d'enseignants certifiés, dont un gelé. Pourtant, l'enseignement des langues régionales comme l'occitan se révèle aujourd'hui fondamental pour s'emparer et porter l'identité des régions et des territoires et préserver cette composante essentielle du patrimoine immatériel de la France. De ces observations, et dans l'intention d'assurer l'intérêt porté à ces langues multiséculaires, il souhaite connaître sa position sur le soutien à l'enseignement des langues régionales dans le cadre de la réforme du baccalauréat.

Réponse émise le 4 juin 2019

Le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse est attaché à la préservation et à la transmission des diverses formes du patrimoine linguistique et culturel des régions françaises, et la situation de l'enseignement des langues régionales fait l'objet de la plus grande attention dans les académies et territoires concernés. La circulaire n° 2017-072 du 12 avril 2017 a rappelé cet attachement et le cadre du développement progressif de l'enseignement des langues et cultures régionales. Les textes réglementaires relatifs à l'enseignement des langues régionales à l'école, au collège et au lycée constituent un cadre à la fois solide et souple, qui offre des garanties pour assurer leur pérennité et leur développement. L'article L. 312-10 du code de l'éducation dispose que « les langues régionales appartenant au patrimoine de la France, leur enseignement est favorisé prioritairement dans les régions où elles sont en usage » ; les modalités de cet enseignement facultatif, qui peut être dispensé « tout au long de la scolarité » sous deux formes, un enseignement de la langue et de la culture régionales et un enseignement bilingue, sont « définies par voie de convention entre l'État et les collectivités territoriales ». L'article L. 312-11 du même code autorise, en outre, les professeurs des premier et second degrés à « recourir aux langues régionales, dès lors qu'ils en tirent profit pour leur enseignement. » L'arrêté du 12 mai 2003 organise, quant à lui, l'enseignement bilingue en langues régionales à parité horaire dans les écoles et les sections langues régionales des collèges et des lycées. La réforme du baccalauréat et du lycée, entrant en vigueur pour les élèves de première à partir de la rentrée 2019 et pour les élèves de terminale à partir de la rentrée 2020, est cadrée par les arrêtés du 16 juillet 2018 relatifs à l'organisation et au volume horaire des enseignements du cycle terminal des lycées, sanctionnés par le baccalauréat général et portant organisation et volumes horaires des classes de première et terminale des lycées sanctionnés par le baccalauréat technologique. Dans ce cadre, l'arrêté du 22 février 2019 modifiant l'arrêté du 16 juillet 2018 relatif à l'organisation et aux volumes horaires des enseignements du cycle terminal des lycées, sanctionnés par le baccalauréat général, publié au JORF n° 0068 du 21 mars 2019, permet de choisir une langues vivante régionale comme enseignement de spécialité, à l'instar des langues vivantes étrangères. Cela est possible dès lors que l'élève suit par ailleurs un enseignement dans cette langue régionale en Langue vivante A, B ou C. Elle bénéficie à ce titre d'un enseignement à hauteur de 4 heures en première puis de 6 heures en terminale. Elle est évaluée dans le baccalauréat pour un coefficient à 16 sur un coefficient total de 100. Ceci correspond à un réel progrès par rapport à la situation actuelle où la langue vivante régionale approfondie ne peut être choisie que par une minorité d'élèves, ceux de la série L. Par ailleurs, pour le baccalauréat général, il est toujours possible pour le candidat de choisir une langue vivante régionale (LVR), dont l'occitan-langue d'oc, en tant qu'enseignement commun au titre de la langue vivante B, et également en tant qu'enseignement optionnel, au titre de la langue vivante C. En ce qui concerne la voie technologique, dans toutes les séries, le choix d'une langue vivante régionale, dont l'occitan-langue d'oc, demeure possible au titre de la langue vivante B dans les enseignements communs. Pour l'enseignement optionnel de la voie technologique, le choix d'une langue vivante régionale dont l'occitan-langue d'oc est toujours proposé dans la série « Sciences et technologies de l'hôtellerie et de la restauration » (STHR), en raison de l'intérêt que comporte un tel enseignement pour des élèves se destinant à des carrières où l'accueil du public est primordial. La réforme du baccalauréat conforte le poids des langues régionales dans l'examen. La langue vivante régionale (LVR) choisie au titre de la langue vivante B constitue l'un des six enseignements communs ayant exactement le même poids dans l'examen, c'est-à-dire que tous ces enseignements comptent dans leur ensemble à hauteur de 30 % de la note finale, et en y incluant les notes de bulletin, la note de langue régionale compte pour environ 6 % de la note finale. S'agissant de la LVR choisie au titre d'enseignement optionnel comme langue vivante C, tous les enseignements optionnels ont exactement le même poids et les notes de bulletins de tous les enseignements comptent dans leur ensemble à hauteur de 10 % de la note finale de l'examen. La situation précédant la réforme dans laquelle seules les notes au-dessus de la moyenne étaient prises en compte dans l'examen disparaît. Désormais, il faut suivre les enseignements optionnels en cours de scolarité tout au long du cycle terminal, et la note annuelle obtenue au titre des enseignements optionnels compte pour l'examen, quelle que soit sa valeur. La valorisation des LVR peut enfin s'opérer grâce à l'accent mis par la réforme sur l'enseignement des disciplines non linguistiques en langue vivante, notamment régionale. L'arrêté du 20 décembre 2018 relatif aux conditions d'attribution de l'indication section européenne ou section de langue orientale (SELO) et de l'indication discipline non linguistique ayant fait l'objet d'un enseignement en langue vivante (DNL) sur les diplômes du baccalauréat général et du baccalauréat technologique, publié au JORF n° 0296 du 22 décembre 2018, prévoit ainsi que, hors des sections européennes ou de langue orientale, les disciplines autres que linguistiques (DNL) peuvent être dispensées en partie en langue vivante donc en langue régionale, conformément aux horaires et aux programmes en vigueur dans les classes considérées. Par exemple, sur 3 heures d'histoire-géographie, 1 heure peut être dispensée en langue vivante régionale. Dans ce cas, et cela est nouveau, le diplôme du baccalauréat général et du baccalauréat technologique comporte l'indication de la discipline non linguistique ayant fait l'objet d'un enseignement en langue vivante étrangère ou régionale, suivie de la désignation de la langue concernée, si le candidat a obtenu une note égale ou supérieure à 10 sur 20 à une évaluation spécifique de contrôle continu visant à apprécier le niveau de maîtrise de la langue qu'il a acquis. Toutes ces nouvelles dispositions œuvrent en faveur de la valorisation de l'apprentissage des langues vivantes régionales pour les élèves du lycée général et technologique. Parmi les langues régionales, l'occitan-langue d'oc fait l'objet d'une attention toute particulière ; elle constitue la première langue régionale enseignée dans le système scolaire français par le nombres d'élèves concernés (environ 66 000 élèves durant l'année scolaire 2017-2018) ; ce nombre augmente progressivement d'une année à l'autre, témoignant des efforts conjoints des services académiques et des collectivités territoriales impliquées pour soutenir l'enseignement et la transmission de cette langue. Le ministère s'est clairement engagé à poursuivre cette politique volontariste en signant le 26 janvier 2017 une convention pour le développement et la structuration de l'enseignement contribuant à la transmission de l'occitan avec les régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie et l'Office Public de la Langue Occitane. De plus, l'occitan-langue d'oc a fait partie des trois langues régionales retenues pour la première session de l'agrégation externe de langues de France, qui s'est tenue en 2018 : il s'agit là à la fois d'une reconnaissance symbolique importante et d'un moyen de dynamiser la formation et le recrutement de professeurs hautement qualifiés pour dispenser les enseignements de langues et cultures régionales. En ce qui concerne le volume de postes offerts pour cette session 2018 à l'agrégation externe d'occitan-langue d'oc, il convient de rappeler que la politique de recrutement des professeurs du second degré public fait l'objet d'une évaluation prévisionnelle chaque année. Il s'agit de déterminer le calibrage du nombre de postes offerts au recrutement pour les différents concours entre chaque discipline en fonction de plusieurs indicateurs, le schéma d'emplois du ministère, les prévisions de départ dans la discipline, la présence de sureffectifs disciplinaires, l'évolution des heures d'enseignement, les demandes des académies pour chaque discipline, l'évolution du nombre d'élèves, …). En octobre 2017, l'occitan-langue d'oc rassemble un peu plus de 130 enseignants (en ETP). Cet enseignement connaît des sureffectifs depuis plusieurs années (en octobre 2017, 12 ETP soit 2,1 % du sureffectif total, constaté pour l'ensemble des disciplines alors que le poids disciplinaire de l'occitan-langue d'oc est de 0,04 %). Au regard de ces éléments, il ne paraissait pas pertinent d'accroître davantage les volumes de recrutement dans cette discipline. De plus, à la session 2017, pour 6 postes ouverts au CAPES, seuls 12 candidats se sont présentés. Par ailleurs, alors que la demande académique est inférieure aux apports (stagiaires et titulaires), il a été décidé d'ouvrir, pour la session 2018, un poste en agrégation externe et quatre postes en CAPES externe. La situation de l'occitan-langue d'oc fera l'objet d'une nouvelle évaluation pour la session à venir des concours.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.