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Marie Tamarelle-Verhaeghe
Question N° 17434 au Ministère auprès de la ministre de la transition écologique


Question soumise le 26 février 2019

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe attire l'attention de Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, sur la situation des travailleurs détachés européens dans le secteur du transport routier de marchandises (TRM) et l'augmentation croissante du cabotage. La France est au cœur des réseaux européens de transport routier de marchandises (TRM). En 2016, selon les chiffres de la fédération nationale du transport routier (FNTR), le secteur représentait environ 400 000 salariés, 36 000 entreprises dont 96% de PME, pour un chiffre d'affaires de 53 milliards d'euros. Si le secteur reste un des dix premiers employeurs privés en France, il a fortement été impacté par l'ouverture du marché intérieur aux routiers étrangers, le 1er janvier 1993, et l'entrée des pays de l'est dans l'Union européenne à partir de 2004. En principe, la directive sur les travailleurs détachés de 1996 prévoit qu'un salarié de l'UE travaillant dans un autre pays que le sien soit payé au salaire minimum de son pays d'accueil, selon le principe « à travail égal, rémunération égale », mais cela n'a jamais été respecté. Dans le cadre de la révision de la directive sur les travailleurs détachés en mai 2018, le TRM n'a d'ailleurs pas été intégré. De fait, le cabotage, où transport de marchandises entre deux points du territoire national réalisé par une entreprise non résidente, bat son plein. Cette activité de cabotage, censée éviter les trajets à vide, pénalise les acteurs français du transport routier. Dans son rapport sur le transport routier de marchandises en Pologne, remis en janvier 2019, le comité national routier (CNR) estime que les opérations de cabotage des transporteurs polonais en France ont été multipliés par 10 en 7 ans, et que leur coût de revient kilométrique est de 34% inférieur au niveau français. Pour faire face à cette concurrence, les transporteurs français se concentrent sur le transport régional à 55% et constatent une baisse de 22% du transport international depuis 1999. Selon les chiffres de la FNTR, la France serait le pays le plus caboté d'Europe avec 33% du cabotage européen effectué sur le territoire. Pour le Parlement européen, cabotage, travailleurs détachés et temps de travail forment les trois sujets sociaux du paquet routier, indissociables les uns des autres. Malgré les accords trouvés par les ministres européens des transports le 3 décembre 2018, la Commission n'a trouvé le 10 janvier 2019, qu'un accord sur le cabotage. Les députés européens devront décider en mars d'inscrire le paquet routier ou non à l'ordre du jour lors d'une plénière. Dans le cas où le paquet routier ne serait pas présenté ou pas voté en séance plénière au parlement européen, elle souhaiterait connaître les mesures qu'elle envisage pour faire évoluer la législation en matière de TRM.

Réponse émise le 9 mars 2021

Le 31 mai 2017, la Commission européenne a présenté une première série de mesures visant à adapter le cadre de la régulation économique et sociale dans le secteur du transport routier (Paquet Mobilité I). Après plusieurs mois de discussions, un texte de compromis a été approuvé au Conseil des ministres de l'Union européenne du 3 décembre 2018. Le Parlement européen a voté les rapports sur les différents textes début avril 2019. A l'issue du dialogue interinstitutionnel entre le Conseil, la Commission et le Parlement européen à la fin de l'année 2019, un accord a été obtenu et les textes ont été publiés le 31 juillet 2020. La majorité des mesures entreront en vigueur en 2022 mais celles relatives à la réglementation sociale des conducteurs, notamment le temps de repos et de conduite sont applicables depuis le 20 août 2020. Les nouvelles dispositions vont dans le sens d'une amélioration des conditions de travail des conducteurs et d'une concurrence plus équilibrée. En matière de cabotage, les règles sont renforcées, avec l'introduction d'une période de carence entre deux périodes de cabotage afin de lutter contre le cabotage systématique, alors que les règles actuelles de cabotage sont conservées : le nombre d'opérations de cabotage autorisées pendant la période de 7 jours suivant un transport routier international reste limité à 3. En outre, l'application des règles du détachement au secteur du transport routier, notamment pour les opérations de cabotage, est maintenue. Or, les écarts de salaires entre les États membres de l'Union européenne constituent un facteur important de la concurrence entre les entreprises. Le maintien de l'application des règles de détachement aux salariés du secteur du transport routier, notamment en matière de rémunération au niveau de « l'État d'accueil » dans lequel les prestations de transport sont réalisées, permettra une concurrence plus équilibrée. S'agissant du contrôle de ces règles, l'accélération de la mise en service d'un tachygraphe intelligent, doté de nouvelles fonctionnalités (enregistrement des passages de frontières, activités de chargement et de déchargement) renforcera la contrôlabilité. Cette accélération du calendrier de près de 10 ans a vocation à consolider l'application effective de l'ensemble des textes du Paquet Mobilité I. Il convient de souligner également que des mesures du Paquet Mobilité I ne portant pas spécifiquement sur le cabotage, visent également à améliorer les conditions d'une concurrence plus équilibrée. Ainsi, l'exploitation des véhicules dont le poids maximal autorisé dépasse 2,5 tonnes opérant à l'international sera soumise à des règles adaptées d'accès à la profession de transporteur routier. Cette mesure vise à éviter le contournement de la réglementation constatée actuellement avec le recours accru à ce type de véhicules. Les conducteurs de ces véhicules, qui n'étaient pas couverts par le règlement relatif aux temps de conduite et de repos, y seront soumis d'ici 6 ans. Même si ce délai apparaît lointain, son inscription dans le règlement marque un progrès significatif. L'interdiction du repos hebdomadaire normal en cabine du conducteur et son retour régulier dans l'État d'établissement œuvrent aussi en ce sens, en plus d'offrir des conditions de travail plus décentes et plus respectueuses de la santé de ces travailleurs. Enfin, le retour régulier du véhicule dans le pays d'établissement toutes les 8 semaines maximum, en renforçant le lien entre l'activité de l'entreprise et le lieu de son implantation limitera l'optimisation fiscale choisie par certaines entreprises. L'opportunité de cette dernière mesure, introduite par le Parlement, est toutefois remise en question par la Commission et plusieurs États en raison du risque de retour à vide des véhicules qu'elle serait susceptible de favoriser. La Commission réalise actuellement une étude d'impact. Les autorités françaises, au sein de l'Alliance du routier, ont pris une part très active tout au long des discussions ayant abouti au compromis obtenu à l'issue des échanges interinstitutionnels. Elles continuent à œuvrer pour que ce compromis soit définitivement adopté au plus tôt.

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