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Naïma Moutchou
Question N° 17888 au Ministère des solidarités


Question soumise le 19 mars 2019

Mme Naïma Moutchou alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la situation inquiétante des internements sous contrainte dans les hôpitaux psychiatriques du département du Val-d'Oise. La législation en vigueur recèle plusieurs dispositifs d'internement dans les hôpitaux psychiatriques, dont les mesures dites d'urgence et de péril imminent. En pratique, l'hospitalisation forcée en cas d'urgence nécessite un seul certificat médical au lieu de deux dans le cadre d'une admission à la demande d'un tiers ; et en cas de péril imminent, le diagnostic d'un seul et même psychiatre suffit à engager la procédure d'internement immédiat. La loi encadre ces pratiques spécifiques d'internement et prévoit qu'elles ne soient mobilisées qu'à titre exceptionnel, car elles comprennent des niveaux de garantie moindres contre de potentiels abus qu'auraient à subir les patients. Dans le département du Val-d'Oise, en 2016, 82 % des internements sans consentement ont été réalisés à la demande d'un directeur d'établissement sous les motifs d'urgence ou de péril imminent. Cette forte prévalence des mesures exceptionnelles n'est pas sans soulever des inquiétudes légitimes de la part des citoyens. Aussi, elle souhaiterait savoir quels modes de contrôle renforcés peuvent être appliqués dans les hôpitaux psychiatriques du département afin de s'assurer que ces pratiques par principe exceptionnelles, le demeurent dans les faits.

Réponse émise le 3 novembre 2020

Le Gouvernement est particulièrement attaché au respect des conditions légales d'admission et de maintien au sein du dispositif de soins sans consentement. Celles-ci imposent notamment que, lorsqu'une personne fait l'objet de soins psychiatriques sans consentement, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles soient justifiées médicalement, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en œuvre du traitement requis. Des garanties importantes existent à cet égard. Le juge des libertés et de la détention exerce un contrôle systématique de toutes les mesures de soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète, avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de l'admission du patient, puis d'un délai de six mois. De plus, dans chaque département, une commission départementale des soins psychiatriques est chargée d'examiner la situation des personnes en soins psychiatriques sans consentement. S'agissant plus spécifiquement des admissions dans le cadre de la procédure dite de péril imminent, c'est-à-dire en l'absence de tiers, celles-ci ne doivent pas nécessairement être considérées comme péjoratives. En effet, l'absence de tiers recouvre deux situations distinctes. La première concerne des patients isolés en faveur desquels aucune personne ne peut intervenir. La seconde concerne des patients pour lesquels, alors même qu'il existe des membres de la famille ou des proches à même d'agir en tant que tiers, ceux-ci peuvent choisir de ne pas faire de demande de soins psychiatriques afin de ne pas altérer leurs relations ultérieures avec le patient. Ces mesures font l'objet d'une vigilance particulière de la part des commissions départementales des soins psychiatriques qui doivent obligatoirement examiner la situation des patients concernés avant l'expiration d'un délai de trois mois à compter de leur admission, puis au moins une fois tous les six mois. S'agissant des admissions en cas d'urgence qui sont prévues lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, elles relèvent bien de situations à titre exceptionnel et disposent de garanties de respect des droits fondamentaux (tels que l'établissement des certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 par deux psychiatres distincts, la vérification préalable à l'admission de la conformité de la demande de soins au 1° du II de l'article L. 3212-1 mais aussi de l'identité de la personne malade et de celle qui demande les soins). Par ailleurs, comme le prévoit l'action n° 22 de la feuille de route de santé mentale et psychiatrie du 28 juin 2018, le Gouvernement met en œuvre un plan d'actions visant la réduction du recours aux soins sans consentement, et en particulier la réduction du recours aux mesures d'isolement et de contention dans les établissements. Cette démarche s'inscrit dans le cadre d'une politique déterminée de prévention, de réduction et de contrôle des pratiques d'isolement et de contention, partagée au niveau européen. Elle s'est traduite en France par le déploiement depuis 2016, sous l'égide du Centre Collaborateur de l'Organisation Mondiale de la Santé pour la recherche et la formation en santé mentale de Lille, de l'initiative de l'OMS QualityRights, basée sur la Convention des Nations Unies relative aux Droits des Personnes Handicapées (CIDPH). L'article L. 3222-5-1 du code de santé publique dispose que la contention, comme l'isolement, « sont des pratiques de dernier recours » et qu'il « ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision d'un psychiatre, prise pour une durée limitée ». Il prévoit aussi la création d'un registre dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie, afin de tracer chaque mesure d'isolement et de contention. Or, par décision n° 2020-844 QPC du 19 juin 2020, le Conseil Constitutionnel a déclaré que cet article L. 3222-5-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, était contraire à la Constitution et qu'il devait être abrogé. Cette décision prendra effet au 31 décembre 2020 (date de l'abrogation des dispositions contestées). Dans le prolongement de l'action déjà engagée pour réduire l'isolement et la contention, le Gouvernement entend donc donner suite à cette décision d'inconstitutionnalité, en travaillant dans le cadre du PLFSS pour 2021 sur le droit des personnes de façon rigoureuse.

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