Mme Sylvie Tolmont attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le projet d'ordonnance, découlant de la loi du 30 octobre 2018, relative au statut coopératif agricole. L'article 11 de cette loi habilite le Gouvernement à prendre par ordonnances diverses mesures pour faire évoluer le statut des coopératives agricoles. Lors de la séance publique du 14 septembre 2018 à l'Assemblée nationale, l'ancien ministre de l'agriculture s'est engagé à conduire une concertation avec les parlementaires sur ce point. Force est de constater que cet engagement n'a pas encore été tenu. Le projet d'ordonnance établi par le Gouvernement a suscité de très vives inquiétudes. En effet, en assimilant le contrat coopératif à un contrat commercial, ce projet nie la spécificité du modèle coopératif et porte atteinte à son développement. La relation entre l'associé coopérateur et son entreprise ne saurait être assimilée à une relation entre un fournisseur et un client. En effet, la coopérative est le prolongement de l'exploitation agricole et les agriculteurs en sont à la fois les propriétaires et les apporteurs. C'est pourquoi vouloir plaquer la notion de « prix abusivement bas » au contrat d'apport coopératif ou dessaisir le médiateur de la coopération au profit du médiateur des relations commerciales est perçu comme une aberration, laquelle rompt avec l'équilibre de la relation entre l'association coopérateur et sa coopérative. Aussi, ce projet d'ordonnance est perçu comme susceptible d'ouvrir la voie vers une « démutualisation » des coopératives agricoles, ce qui aurait un fort retentissement sur l'avenir des territoires ruraux. Dans ces conditions, elle l'interroge sur les intentions du Gouvernement pour préserver la spécificité du modèle coopératif et entreprendre la concertation promise avec les parlementaires sur cette question.
Les mesures prises dans le cadre de l'ordonnance relative à la coopération agricole visent à renforcer le modèle coopératif auquel le Gouvernement est très attaché, et à conforter son exemplarité notamment dans la prise en compte des avancées issues des états généraux de l'alimentation. Cette ordonnance du 24 avril 2019 est issue de plusieurs mois de concertation avec Coop de France, le haut conseil de la coopération agricole (HCCA) et les organisations professionnelles agricoles. Elle prend en compte les échanges du débat parlementaire organisé sur la gouvernance des grands groupes coopératifs le 15 janvier 2019, au Sénat. L'inscription de l'interdiction de cession à un prix abusivement bas prévue à l'article L. 442-9 du code de commerce est adaptée dans le code rural et de la pêche maritime. En effet, la relation entre un associé coopérateur et sa coopérative, distincte d'une relation commerciale, ne relève pas du code de commerce. Il s'agit avec ce dispositif adapté de faire en sorte que les associés coopérateurs puissent bénéficier des avancées de la loi si le prix s'écarte trop des indicateurs, notamment ceux publiés par les interprofessions. L'adaptation prévue est issue de la concertation et tient compte des spécificités du secteur coopératif. Elle prévoit ainsi l'avis motivé du ministère chargé de l'agriculture ainsi que du HCCA ou l'intervention du médiateur avant introduction de l'action devant la juridiction civile compétente. Elle prévoit également la prise en compte par le juge des spécificités des contrats coopératifs. L'ordonnance précise que le médiateur de la coopération agricole est désormais nommé par décret afin de renforcer son indépendance. Les attributions du médiateur de la coopération agricole, les modalités d'exécution de sa mission et les conditions de la contribution du médiateur des relations commerciales agricoles (MRCA) à cette mission, seront fixées par décret. Il est ainsi prévu, s'agissant des questions de prix des apports et du montant des indemnités en cas de départ d'un associé-coopérateur de la coopérative, que le médiateur de la coopération agricole reste maître de la proposition de conclusion de la médiation aux parties après avoir pris l'avis du MRCA. Par son ensemble de mesures liées à la transparence, au renforcement de la capacité d'action du HCCA, et à l'affirmation du rôle du médiateur de la coopération agricole, cette ordonnance vise à renforcer le modèle coopératif et son appropriation par ses adhérents.
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