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Christophe Di Pompeo
Question N° 18999 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 23 avril 2019

M. Christophe Di Pompeo attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la question des salaires différés. Le salaire différé a été créé afin que les descendants d'un exploitant agricole puissent avoir, sous certaines conditions, un droit de créance s'ils ont participé à la mise en valeur de l'exploitation familiale sans recevoir de rémunération. C'est donc une gratification a posteriori qui s'impute sur les droits successoraux des descendants et qui ne concerne que les agriculteurs. La loi permet au bénéficiaire de le réclamer à n'importe quel moment du vivant de son parent. Le salaire différé est basé sur le SMIC brut en vigueur le jour du partage ou à la date du règlement s'il intervient du vivant de l'exploitant. Depuis 2017, le Gouvernement mène une politique déterminée pour revaloriser la formation professionnelle et l'apprentissage qui sont des leviers essentiels pour les métiers agricoles puisqu'ils contribuent à former ceux qui permettront de façonner l'agriculture de demain. Le ministère œuvre au quotidien pour une agriculture innovante et respectueuse de l'environnement afin qu'elle puisse répondre aux attentes des exploitants agricoles d'aujourd'hui. Or, il ne s'est pas prononcé sur la question des salaires différés. Le monde agricole change, les exploitations sont de moins en moins nombreuses mais de plus en plus grosses et équipées d'outils qui peu à peu libèrent l'homme de tâches difficiles. Le travail à la ferme a donc profondément changé même s'il faut reconnaitre que c'est toujours un travail ardu et à plein temps. Pourtant, dans une société où nous souhaitons donner des droits égaux à tous les salariés et leur permettre de travailler en toute sécurité, il semble que la question des salaires différés doit être reposée. Au moment où il a été voté une loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel, il semble qu'il faudrait donner la possibilité aux filles et fils d'agriculteurs de travailler en sécurité et avec les mêmes droits que les apprentis et les alternants. Aussi, il est nécessaire de s'interroger sur la pertinence de conserver un tel système. Aussi, il lui demande de lui préciser l'état de sa réflexion sur ce sujet.

Réponse émise le 25 juin 2019

Régi par les articles L. 321-13 à L. 321-21 du code rural et de la pêche maritime (CRPM), le bénéfice du salaire différé est subordonné à trois conditions : être descendant ou conjoint de descendant de l'exploitant agricole et être âgé de 18 ans, avoir participé directement et effectivement à l'exploitation, ne pas avoir été associé aux résultats de l'exploitation et ne pas avoir reçu de salaire en argent en contrepartie de la collaboration. Il convient de préciser que le droit au salaire différé ne peut en aucun cas, et quelle que soit la durée de la collaboration apportée à l'exploitant, dépasser, pour chacun des bénéficiaires, la somme représentant le montant de la rémunération due pour dix années. Le salaire différé peut être réglé : - de manière anticipée, c'est-à-dire du vivant du parent mais uniquement si ce dernier l'accepte. L'enfant ne peut réclamer le paiement. C'est en fait une faculté offerte au parent mais non une obligation. Ce cas ne s'applique pas pour les conjoints. - lors de l'ouverture de la succession du parent défunt. Ici deux cas se présentent auxquels il convient d'être attentif : - les deux parents exploitaient conjointement le fonds familial lorsque l'enfant travaillait sur l'exploitation ; ce dernier peut alors demander le règlement du salaire sur l'une ou l'autre des successions ; - les deux parents ont exploité successivement le fonds familial. Ici, la demande de paiement de salaire différé ne pourra intervenir que sur la succession du parent qui dirigeait l'exploitation lorsque l'enfant a travaillé. Si ce dernier a travaillé successivement sous la direction de ces deux parents, il devra effectuer une demande sur chacune des successions au prorata du temps de travail effectué au profit de l'un et l'autre. Enfin, il est important de préciser que le délai de prescription pour l'action en paiement a été réformé par une loi du 17 juin 2008 faisant passer ce délai de trente ans à cinq ans. Par conséquent, toutes les créances nées entre le 18 juin 1983 et le 17 juin 2008 sont prescrites depuis le 17 juin 2013. Il convient de rappeler que le salaire différé a été institué et adapté afin de reconnaître, lors de successions concernant des biens agricoles d'un ascendant, l'indemnisation d'un descendant ou conjoint d'exploitant agricole décédé qui a participé, sans contrepartie, à la mise en valeur de l'exploitation. Dans ce cadre, cette procédure permet, également, de maintenir en place ou d'installer un descendant, chef d'exploitation, sur une unité viable. Le bénéficiaire de la créance de salaire différé et de l'attribution préférentielle du fonds pourra, en conséquence, indemniser plus facilement les autres cohéritiers. Il n'est donc pas envisagé, à ce jour, de modifier les paramètres du salaire différé, qui, ne remet pas en cause la liberté des enfants d'agriculteurs de choisir leur avenir professionnel tout en reconnaissant leur contribution à la mise en valeur de l'exploitation.

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