Mme Émilie Cariou interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la mise en œuvre de la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs. À son article 3, cette loi dispose que pour la gestion des déchets radioactifs à vie longue de haute ou de moyenne activités, les recherches et les études relatives sont poursuivies selon les trois axes complémentaires suivants : premièrement, la séparation et la transmutation des éléments radioactifs à vie longue ; deuxièmement, le stockage réversible en couche géologique profond ; troisièmement, l'entreposage. Couplé à la lecture de l'article 6 de la loi de 2006 (L. 542-1-2 du code de l'environnement), il en ressort que le stockage géologique profond n'est envisagé que par défaut, si l'ensemble de ces pistes ont été entièrement expertisées et évaluées et si un stockage sûr ne peut être réalisé en surface. À l'heure où s'ouvre un débat public national sur la gestion des matières et déchets radioactifs et étant considéré notamment l'impact financier sans commune mesure du stockage géologique profond, elle souhaite donc l'interroger sur l'état d'avancement des recherches et projections sur l'ensemble de ces trois pistes de gestion évoquées, en France mais aussi chez les pays partenaires européens et internationaux. Elle souhaite plus particulièrement être éclairée précisément sur les financements respectifs mobilisés pour chaque piste de gestion et sur leurs perspectives de réalisation à court et moyen terme.
L'étude des options de gestion des déchets radioactifs ultimes de haute et de moyenne activité à vie longue a été marquée par différentes étapes législatives dont la première, en 1991, a inauguré une longue période de recherche. En effet, la loi « Bataille » a cadré un programme de recherche sur trois options alternatives : 1. la séparation/transmutation des éléments radioactifs à vie longue ; 2. le stockage en couche géologique profonde ; 3. les procédés de conditionnement et d'entreposage de longue durée en surface de ces déchets. Ce programme de recherche s'est déroulé sur la période de 1992 à 2004 et a mobilisé des ressources financières importantes s'élevant au total à 2,49 milliards d'euros qui se répartissent de la manière suivante : - 32,5 % du total de l'investissement, soit 0,81 milliard € sur l'axe dédié à la séparation et la transmutation, pour des recherches effectuées principalement par le commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ; - 40,5 % du total de l'investissement, soit 1 milliard € dédié au stockage en couche géologique profonde, pour des recherches menées par l'agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) avec le concours d'autres organismes de la communauté scientifique française ; - 27 % du total de l'investissement, soit 0,67 milliard € sur l'axe dédié au conditionnement et à l'entreposage de longue durée, recherches effectuées principalement par le CEA. Suite à plus de 15 années de recherche et à un débat public organisé par la commission nationale du débat public en 2005-2006, deux stratégies alternatives sont apparues possibles : soit le stockage souterrain comme solution de référence, soit la poursuite des études à la fois sur le stockage et sur l'entreposage de subsurface. Les résultats des études menées avaient conduit à conclure que la faisabilité technologique de la séparation et de la transmutation n'apparaissait pas acquise et même en cas de mise en œuvre de cette solution, l'élimination des déchets radioactifs n'aurait pas pu être totale et n'aurait pas supprimé le besoin d'une solution de gestion long terme. La solution de l'entreposage avait, quant à elle, été écartée au motif qu'elle ne constituait pas en elle-même une solution de gestion (les colis de déchets devant être repris et de nouveaux entrepôts construits), et revenait donc à reporter sur les générations futures la gestion des déchets nucléaires déjà produits. Dans la loi de 2006, le Gouvernement a ainsi proposé de retenir le stockage profond pour la gestion à long terme de ces déchets. Plusieurs pays dans le monde et en Europe se sont orientés vers la solution de stockage géologique profond et la pertinence de cette solution technique pour les déchets radioactifs à vie longue est reconnue au niveau international. Un état des recherches, études et projets sur le stockage géologique profond à l'international a été dressé par la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) et l'autorité de sûreté nucléaire (ASN) dans le cadre du débat public sur le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs qui est en cours [1]. À la demande de la commission nationale du débat public, l'institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a mené une expertise sur les alternatives au stockage profond [2] dans le cadre de ce même débat. Par ailleurs, la commission particulière du débat public a mené une démarche de clarification des controverses [3]. Cet exercice a notamment été mené sur les alternatives au stockage profond, son résumé est le suivant : « En 2006, le stockage géologique a été choisi par le Parlement comme solution de référence pour la gestion des déchets de haute et moyenne activité à vie longue. L'entreposage de longue durée et la séparation-transmutation, qui constituaient jusqu'alors les deux volets d'une alternative au stockage, ont continué à être étudiés, mais principalement comme compléments à un stockage. Les arguments motivant la décision de 2006 n'étaient pas principalement liés à d'éventuelles difficultés techniques de l'entreposage. Les améliorations récentes obtenues grâce à la recherche sur ce sujet n'ont ainsi pas significativement changé la donne. Les fortes incertitudes liées à la séparation-transmutation avaient en revanche une place importante dans la décision de 2006. La recherche récente, malgré des progrès incontestables, a confirmé la difficulté d'une stratégie de transmutation lourde, et ce même avec un objectif plus modeste de réduction de l'emprise du stockage et non de substitution. Diverses solutions de transmutation, reposant sur de nouveaux types de réacteurs, continuent d'être explorées, mais sans perspective d'application industrielle à court ou moyen terme. » [1] Pour plus de détails, se référer à la fiche n° 20 du document « Approfondir ses connaissances » téléchargeable sur le site de la commission particulière du débat public (CPDP) : https://pngmdr.debatpublic.fr/approfondir/la-bibliotheque-du-debat/approfondir-ses-connaissances/viewdocument [2] Etude consultable sur le site de la CPDP : https://pngmdr.debatpublic.fr/images/contenu/PNGMDR-Rapport-IRSN-Panorama-recherches-alternatives-stockage-profond.pdf [3] Se référer à l'exercice de clarification des controverses mené par la CPDP et consultable sur le site internet du débat public : https://pngmdr.debatpublic.fr/approfondir/clarification-des-controverses-techniques
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