M. Jean-Christophe Lagarde interroge M. le ministre de l'intérieur sur l'élargissement des compétences des agents de police judiciaire et plus précisément sur la réquisition des enregistrements réalisés par les centres de surveillance urbaine. En effet les articles 60 et 60-1 du code de la procédure pénale disposent respectivement que : « S'il y a lieu de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques, l'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de ce dernier, l'agent de police judiciaire a recours à toutes personnes qualifiées » et que : « Le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de ce dernier, l'agent de police judiciaire peut, par tout moyen, requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute administration publique qui sont susceptibles de détenir des informations intéressant l'enquête, y compris celles issues d'un système informatique ou d'un traitement de données nominatives, de lui remettre ces informations, notamment sous forme numérique ». Par ces dispositions, les compétences des agents de police judiciaire sont étendues. Toutefois, les groupes de mots « examens techniques ou scientifiques » et « système informatique » demeurent flous et peuvent, par conséquent, susciter les interrogations. Dans ces conditions, il lui demande de préciser ces termes et lui demande si les compétences des agents de police judiciaire sont élargies à la réquisition d'enregistrements, intéressant l'enquête, réalisés par les centres de surveillance urbaine d'une commune.
Les centres de surveillance urbaine sont mis en place par les communes pour assurer la vidéoprotection de la voie publique au moyen du visionnage d'enregistrements effectués dans des lieux particulièrement exposés à certains risques. Ils sont à ce titre soumis aux dispositions des articles L. 251-1 et suivants du code de la sécurité intérieure et subordonnés à l'autorisation du représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, du préfet de police. S'agissant des conditions d'accès, des modalités de transmission et de la durée de conservation des images à des fins adminitratives, l'article L. 252-3 du code de la sécurité intérieure dispose notamment que l'autorisation préfectorale « peut prescrire que les agents individuellement désignés et dûment habilités des services de police et de gendarmerie nationales ainsi que des douanes et des services d'incendie et de secours sont destinataires des images et enregistrements. Elle précise alors les modalités de transmission des images et d'accès aux enregistrements ainsi que la durée de conservation des images, dans la limite d'un mois à compter de cette transmission ou de cet accès. » Il est toutefois précisé au même article que la disposition susmentionnée ne fait pas obstacle à l'accès, la transmission et la conservation des images « pour les besoins d'une procédure pénale ». Ceci est précisé par les dispositions de l'article L. 252-5 du même code qui prévoient que « Hormis le cas d'une enquête de flagrant délit, d'une enquête préliminaire ou d'une information judiciaire, les enregistrements sont détruits dans un délai maximum fixé par l'autorisation. » Les conditions d'accès, des modalités de transmission et de la durée de conservation des images à des fins pénales sont précisées par les dispositions du code de procédure pénale. A cet égard, la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a étendu aux agents de police judiciaire les prérogatives prévues aux articles 60 et 60-1 du code de procédure pénale, ce qui concerne, notamment, la possibilité de requérir des examens techniques et scientifiques et des informations contenues dans un système informatique dans le cadre d'enquêtes en flagrance. L'article 60 du code de procédure pénale est relatif aux examens techniques ou scientifiques réalisés par une personne qualifiée au sens de l'article 77-1 du code de procédure pénale et n'est donc pas applicable à la communication d'enregistrements effectués au titre de la vidéoprotection. L'article 60-1 du code de procédure pénale prévoit pour sa part que « le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de ce dernier, l'agent de police judiciaire peut, par tout moyen, requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute administration publique qui sont susceptibles de détenir des informations intéressant l'enquête, y compris celles issues d'un système informatique ou d'un traitement de données nominatives, de lui remettre ces informations, notamment sous forme numérique, le cas échéant selon des normes fixées par voie réglementaire, sans que puisse lui être opposée, sans motif légitime, l'obligation au secret professionnel. » Les informations susceptibles d'intéresser l'enquête ne sont pas limitativement définies par l'article 60-1 du code de procédure pénale et peuvent donc inclure les images de vidéoprotection. A ce titre, la jurisprudence a considéré que, bien que l'arrêté préfectoral autorisant la mise en place d'un système de vidéosurveillance n'habilitait pas les officiers de police judiciaire à accéder aux enregistrements, « les dispositions de l'article L. 252-3 du code de la sécurité intérieure relatives aux conditions de désignation des agents, appartenant notamment aux services de police et de gendarmerie nationales, habilités à recevoir les enregistrements effectués par les systèmes de vidéo protection, ne sauraient priver un OPJ des pouvoirs qu'il tient de l'article 60-1 du code de procédure pénale », les officiers de police judiciaire étant donc autorisés à visionner ces enregistrements et à annexer à leurs procès-verbaux les éléments utiles à l'enquête (Crim. 9 janv. 2018). Ainsi, les agents de police judicaire pourront, uniquement dans le cadre d'une enquête en flagrance et toujours sous le contrôle d'un officier de police judiciaire, requérir la communication d'enregistrements visuels auprès des centres de surveillance urbaine d'une commune.
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