M. Éric Poulliat attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le renouvellement d'autorisation du cuivre, fongicide indispensable aux viticulteurs biologiques, ainsi que de la méthode du lissage. Les États membres de l'Union européenne ont voté le 27 novembre 2018 pour la ré-homologation d'utilisation du cuivre par les exploitants, en prenant en compte la variabilité des quantités de cuivre utilisées en fonction des conditions météorologiques ; les risques éventuels pour la santé des sols ; les risques d'une éventuelle toxicité pour les travailleurs exposés. Les États membres ont également décidé d'une limitation des doses annuelles de cuivre à 4 kg/ha et l'autorisation d'un mécanisme « de lissage », pour moduler le plafond annuel en fonction des besoins de protection des plantes : les exploitants peuvent établir une moyenne sur sept ans maximum (soit une quantité maximale de 28 kg/ha pour sept ans). Les modalités d'application de ces décisions ont été laissées à l'appréciation de chaque État membre. Si la méthode du lissage constitue une avancée certaine, car les conditions météorologiques notamment entraînent une grande variabilité dans le besoin d'utilisation du cuivre, une forte source d'inquiétude persiste quant à la mise en œuvre opérationnelle de cette méthode en France. En effet, la France a précisé à l'issue du vote européen que la possibilité du lissage pourra être accordée au cas par cas par l'ANSES sur la base des éléments fournis dans le dossier de demande d'autorisation de l'usage considéré, qui devront montrer que la pratique n'entraîne pas de risque inacceptable pour la santé et l'environnement. De fait, depuis novembre 2018, certaines spécialités commerciales cupriques ont vu leur autorisation de mise sur le marché (AMM) réattribuée par l'ANSES afin d'introduire une phrase de risque SPe1. Cela risque de contraindre drastiquement l'usage de ces produits, voire de bloquer de fait toute possibilité de recourir au lissage. Par ailleurs, les délais de retour de traitement dans les vignes et des nombres de traitements ne sont pas adaptés aux viticulteurs biologiques qui ont besoin de traiter plus souvent avec de moindres doses. Lors du comité d'orientation stratégique et de suivi (COS) du plan national de réduction des produits phytosanitaires du 10 avril 2019, le Gouvernement a évoqué la finalisation d'une feuille de route pour le développement d'alternatives au cuivre dans la viticulture. En attendant de connaître la position de la France sur l'utilisation du cuivre dans la viticulture biologique, il souhaite donc savoir si le Gouvernement entend prendre des mesures pour assurer une mise en place effective du lissage et favoriser un dialogue opérationnel entre l'ANSES, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation et la profession à ce sujet.
La Commission européenne, par le biais du règlement n° 2018/1981 du 13 décembre 2018, a renouvelé l'approbation des composés du cuivre en tant que substance active phytopharmaceutique pour une durée de sept ans. Cependant, cette approbation est assortie de restrictions, sur les quantités de métal utilisables notamment. L'approbation précise que les autorisations de mise sur le marché délivrées par les États membres ne peuvent permettre des utilisations excédant une quantité de 28 kg de cuivre par hectare sur la période de sept ans, en prenant en compte toutes les sources d'apport en cuivre. Ces modalités rendent possible un mécanisme dit « de lissage », qui consiste à moduler le plafond annuel en fonction des besoins de protection des plantes tout en restant dans la limite de 28 kg sur l'ensemble de la période. Au cours des travaux préparatoires avec la Commission européenne, la France a défendu la possibilité de mettre en place un « lissage » pour les préparations pour lesquelles des tests ou des études montreraient que l'utilisation dans ces conditions peut être sûre. L'approbation européenne prévoit également la possibilité pour les États membres de fixer un taux d'application maximal annuel ne dépassant pas 4 kg de cuivre par hectare. Sur cette base, les États membres vont délivrer les autorisations nationales de mise sur le marché pour des produits phytopharmaceutiques à base de cuivre. Dans la mesure où le cuivre est une substance active candidate à la substitution, une évaluation comparative doit être préalablement conduite pour s'assurer qu'il n'existe pas d'alternatives chimiques ou non chimiques sensiblement plus sûres pour la santé humaine ou animale ou l'environnement et ne présentant pas d'inconvénients économiques ou pratiques majeurs. L'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), qui délivre les autorisations de mise sur le marché pour les produits phytopharmaceutiques en France, est en train d'évaluer les demandes d'autorisation ou de renouvellement d'autorisation, qui devaient être déposées avant le 31 mars 2019. Les éléments transmis doivent montrer que la pratique proposée par le demandeur n'entraîne pas de risque inacceptable pour la santé et l'environnement. Lorsque le lissage est demandé, ses modalités doivent être décrites précisément et des données nécessaires fournies, de façon à ce que l'Anses puisse procéder à leur évaluation. Compte tenu des risques et des impacts du cuivre sur l'environnement et la santé, l'État est soucieux de faciliter la transition vers des pratiques ou des produits alternatifs moins risqués. Cette transition doit reposer sur la mobilisation de tous les acteurs des filières agricoles concernées et pourra s'appuyer sur l'ensemble des dispositifs et mesures du plan Ecophyto II+. Une feuille de route a été élaborée pour articuler les actions et veiller à leur cohérence, après des échanges dans le cadre d'un groupe de travail piloté par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation et associant les services ministériels compétents et les acteurs de la recherche et du développement, notamment du secteur de l'agriculture biologique. Cette feuille de route comporte cinq axes : - encourager la recherche, l'innovation et l'acquisition de connaissances sur les pathogènes, les impacts de l'usage du cuivre, la réduction des doses et le développement d'alternatives (produits de biocontrôle et préparations naturelles peu préoccupantes, résistance variétale, modification des pratiques, évolution ou reconception des systèmes de production, comportement du cuivre dans les sols notamment biodisponibilité), en prenant en compte les différents types d'agriculture (biologique, biodynamique, conventionnelle) ; - diffuser et encourager les bonnes pratiques et le recours aux alternatives à l'utilisation du cuivre qui sont déjà disponibles ; - adapter la réglementation pour favoriser le développement des différentes solutions alternatives ; - accompagner et former les agriculteurs dans le changement de pratiques ; - valoriser ce travail et mutualiser les efforts au niveau européen, notamment avec l'Allemagne, engagée dans une démarche de réduction de l'utilisation du cuivre.
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