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Huguette Bello
Question N° 20326 au Ministère des outre-mer


Question soumise le 11 juin 2019

Mme Huguette Bello interroge Mme la ministre des outre-mer sur la sous-consommation des crédits budgétaires de la mission outre-mer. Selon le rapport annuel de performances annexé au projet de loi de règlement du budget pour 2018, une « difficulté inédite » est apparue avec l'incapacité de plusieurs collectivités à assurer leur part de cofinancement. Les crédits de paiement ont ainsi été exécutés à hauteur de 92 % des crédits disponibles. En valeur absolue, ce taux se traduit par un différentiel négatif de 177 millions d'euros (33 millions pour l'enveloppe « Emploi » et 145 millions pour l'enveloppe « Conditions de vie »). Ces difficultés d'exécution, qui ne manquent pas d'interroger quand on les rapproche de la situation socio-économique des outre-mer, doivent être analysées avec précision afin d'en identifier les causes réelles. Par exemple, quel est l'impact, territoire par territoire, de la suppression par le Gouvernement de l'allocation logement-accession sur les chiffres relatifs au logement ? Les crédits de la ligne budgétaire unique sont non seulement très en retrait par rapport au montant programmé mais accusent aussi un net recul par rapport à 2017 (- 37,7 millions d'euros). De même, quelles sont les conséquences du gel des dotations de l'État aux collectivités territoriales sur ces difficultés de cofinancement ? Aussi, elle lui demande de bien vouloir aller au-delà du constat de sous-exécution des crédits de la mission et de présenter, pour chaque territoire, les crédits engagés, les projets non réalisés et les crédits à reporter correspondants.

Réponse émise le 26 novembre 2019

1.1 S'agissant de la suppression de l'allocation logement-accession. L'allocation logement-accession a été supprimée par la loi de finances pour 2018. Cette suppression a impacté 1359 dossiers de logements évolutifs sociaux ou de projets d'amélioration de l'habitat. L'article 227 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a apporté une première réponse à cette situation, en rétablissant la possibilité de financement pour les projets ayant fait l'objet d'une décision intervenue avant le 31 décembre 2018. Une mission d'analyse et d'expertise du conseil général de l'environnement et du développement durable a par ailleurs été diligentée. Le rapport définitif du CGEDD rendu en juin 2019, conclut à l'intérêt de rétablir de manière pérenne pour les outre-mer un dispositif de soutien à l'accession sociale et de sortie de l'insalubrité, en le couplant à un effort spécifique de réduction des coûts de construction. Dans ce cadre, le ministère en charge du logement propose de mettre en place, dans le cadre de la loi de finances 2020, une aide à l'accession sociale et à la sortie de l'insalubrité outre-mer. La disposition correspondante, prévue dans le projet de loi de finances pour 2020, permettra au ministère en charge du logement de reprendre son effort d'accompagnement en la matière, à hauteur de 2,5 M€ en 2020. 1.2 S'agissant des crédits de paiement. Les données chiffrées de l'application CHORUS, en matière de consommation des crédits de paiement (CP), doivent faire l'objet d'une analyse approfondie pour être correctement interprétés. En premier lieu, les fonds de concours doivent être spécifiquement pris en compte. Ces fonds de concours (FDC) participent au financement d'une action spécifique, voulue par la partie versante des fonds. Au titre de l'exercice 2018, sont notamment à signaler les crédits du Fonds de solidarité de l'Union européenne (FSUE), versés par la Commission européenne afin d'apporter à la France une aide financière, compensant une partie des dépenses engagées pour faire face aux conséquences des ouragans Irma et Maria (opérations de gestion de crise et réparations), ayant principalement frappé le territoire de Saint-Martin. En fin d'année, une convention a également été conclue avec la CDC pour le financement des dépenses d'aménagement numérique en Polynésie française et à Wallis et Futuna. D'autres fonds de concours de moindre importance sont également à signaler en 2018 : redevance thonnière, « fonds bois », Europact, … La consommation de ces crédits se caractérise par une contrainte particulière. En effet, contrairement aux crédits budgétaires qui peuvent faire l'objet d'une réorientation vers une autre nature de dépenses, par décision du RBOP et/ou du RPROG, l'utilisation des fonds de concours doit se faire dans le respect de la « volonté de la partie versante ». Par exemple, les crédits du FSUE ne peuvent être utilisés que pour compenser des dépenses exposées en raison de la gestion des conséquences des ouragans. En contrepartie de cette contrainte qui s'impose aux acteurs de la chaîne de dépense budgétaire et comptable, les AE des FDC sont reportables de droit sur l'année suivante. Ces fonds de concours représentent un total cumulé de CP de 52 085 012 €. Le tableau ci-dessous en présente le détail.


Reports des FDC

Participation de la Commission européenne au financement de la politique outre-mer (Europe Act, FEDER, FEADER, FSE)

676 884,00 €

Fonds destiné au développement du haut-débit dans le Pacifique (PF et WF)

13 394 000,00€

"Aide filière bois 2018" - Guyane

1 378 640,00 €

Redevances pêche pour Mayotte 2018

622 443,00 €

FSUE 2018

(reconstruction de Saint-Martin et de la Guadeloupe)

35 937 670,00€

Contribution aux calamités naturelles

75 375,00 €

Total

52 085 012,00€
Ce montant total de 52 085 012 € a fait l'objet d'un report sur l'exercice 2019. Le produit de cession des SIDOM, dont le principe de l'affectation à la ligne budgétaire unique du programme 123 avait été acté début 2017, a été ouvert début décembre 2019, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2018. Il n'était donc pas matériellement possible de l'utiliser avant la fin de l'exercice budgétaire. Ces crédits, à hauteur de 19 300 000 € en AE et CP, ont fait l'objet d'un report sur l'exercice 2019. Ce seul volume a conduit, à lui seul, à quasiment saturer le plafond de report prévu par l'article 15 de la loi organique sur les lois de finances [1]. Un report a concerné le territoire de la Polynésie française, concernant des opérations financées grâce à la réserve parlementaire affectée pour ce territoire. Ce report pour 2019 s'élève à 195 829 €. Enfin, suite à un problème technique, des demandes de paiement émanant de l'agence française de développement n'ont pas été traitées avant la fin de l'exercice budgétaire 2019 par le centre de prestations financières du ministère de l'intérieur. Un report de droit a été effectué pour 2 506 380 €. Déduction faite des sommes mentionnées aux deux paragraphes précédents, il demeure une sous-consommation de 70 459 205 € qui n'ont pu être utilisés ni reportés. Il convient de préciser que cela n'a pas généré de préjudice pour les projets des territoires ultramarins. Ces crédits étaient disponibles jusqu'à la date de fin d'exercice budgétaire 2018 et auraient été utilisés, si des factures avaient été disponibles. L'ensemble des acteurs de la chaîne de dépense s'est mobilisé afin d'obtenir la production d'un maximum de factures, mais cette mobilisation n'a pas permis de rassembler un volume de dépenses suffisant. Ainsi les charges à payer[2] se montent, au 31 décembre 2018, à 21 136 435 €, en recul tant par rapport à l'année précédente (23 577 052 €) que par rapport à 2016 (48 819 116 €), ce qui témoigne bien de l'effort de mobilisation des services du ministère et des services locaux de l'Etat. Pour les projets en cours, pour lesquels les factures n'ont pu être produites, cela signifie que les paiements interviendront sur les crédits de paiement de 2019 et des exercices à venir, sans aucune remise en cause des opérations ayant fait l'objet d'un engagement d'AE. 2. Les restes à payer du programme 123. La répartition par territoires de ce montant des restes à payer a été communiquée à Madame la députée, par année sur la période 2011-2018, et par action budgétaire, en complément d'un courrier du ministère des outre-mer relatif au même sujet le 11 juillet 2019. La moitié des restes à payer correspond à des engagements des années 2017 et 2018. En volume, les trois principales lignes budgétaires constituant les restes à payer sont l'action 1 (ligne budgétaire unique), l'action 2 (aménagement territorial) et l'action 6 (collectivités territoriales) qui représentent respectivement 46,9 %, 19,8 % et 14 % du total des restes à payer. S'agissant de la ligne budgétaire unique, les restes à payer se décomposent comme suit :

Sous-action budgétaire

Restes à payer

Construction de logements locatifs sociaux

369 541 462,57

Accession à la propriété

47 963 743,79

Amélioration du parc locatif social

51 411 770,63

Études et manifestations

614 885,03

Accompagnement des politiques urbaines d'aménagement (hors CPER)

64 491 293,92

Accompagnement des politiques urbaines (CPER)

7 320 942,76

Résorption de l'habitat insalubre

159 427 957,21

Plan de relance - logement

164 317,90

Total

756 257 758,35
Le volume des restes à payer constitue un enjeu qui doit conduire à une mobilisation de l'ensemble des acteurs : services de l'Etat, collectivités, opérateurs de logements notamment. En effet, ces restes à payer recouvrent des réalités de nature différentes : - des opérations venant d'être engagées et qui sont appelées à se réaliser selon un calendrier inhérent à leur nature ; - des opérations engagées dont le calendrier de réalisation s'étale dans le temps au-delà de l'échéance prévue initialement ; - des opérations achevées à un coût moindre que celui engagé à l'origine ; - des opérations engagées, mais qui ne se sont pas réalisées, pour des raisons diverses (technique, juridique, foncière, etc…). Cette mobilisation recouvre deux axes d'effort : - une démarche d'apurement des engagements passés, lorsque ceux-ci s'inscrivent dans les deux derniers cas de figure ci-dessus ; - une mobilisation des maîtres d'ouvrage concernés afin de renforcer la dynamique de réalisation des projets ayant fait l'objet d'engagements budgétaires. [1] Le plafond de report est de 3 % de l'enveloppe totale du programme, qui était en 2018 de 733 407 002 en CP, en loi de finances initiale, ce qui conduit à une enveloppe reportable de 22 002 210 € en CP [2] Les charges à payer correspondent aux factures produites en fin d'année, qui n'ont pu faire l'objet de paiement avant la clôture de l'exercice et devant donc faire l'objet d'un règlement au début de l'exercice suivant.

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