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Sébastien Nadot
Question N° 20855 au Ministère de l'europe


Question soumise le 25 juin 2019

M. Sébastien Nadot interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les relations diplomatiques et économiques de la France avec le Cameroun. Depuis deux ans un conflit armé oppose l'armée camerounaise et une partie de sa population, anglophone, des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du pays. Dans son rapport du 2 mai 2019, International Crisis Group indique qu'en 20 mois, le conflit a fait 1 850 morts, 530 000 déplacés internes et des dizaines de milliers de réfugiés. Le centre pour les droits humains et la démocratie en Afrique, basé à Buéa en zone de guerre, souligne dans son rapport du 3 juin 2019 que 206 villages ont été incendiés par des soldats, avec une vingtaine de cas avérés de personnes brûlées vives dans leur maison, dont Mamie Appih âgée de 92 ans dans le village de Kwa Kwa en janvier 2018. Le rapport souligne également qu'ont lieu des exécutions sommaires sans distinction de sexe ni d'âge, dont le bébé Martha, 4 mois, exécutée dans son lit le 20 mai 2019 dans la ville de Muyuka. Par un communiqué du 23 octobre 2018, le quai d'Orsay s'exprimait ainsi : « la France adresse ses vœux de réussite au Président Biya pour ce nouveau mandat afin de satisfaire les aspirations légitimes du peuple camerounais à la sécurité, à la prospérité et à la pleine expression des libertés. » Par un nouveau communiqué du 13 février 2019, le quai d'Orsay affirmait cependant que « Nous sommes préoccupés par ce développement judiciaire et restons attentifs à la situation de M. Kamto et à celle d'environ 200 de ses partisans qui sont détenus. L'opposition camerounaise, dont il est l'une des figures, doit pouvoir s'exprimer librement, dans le respect de la loi. » En dépit de l'emprisonnement de Maurice Kamto (premier opposant politique à Paul Biya, président de la République du Cameroun depuis 1982), l'état français s'est pourtant très récemment porté garant pour un prêt de 100 000 000 euros à la République du Cameroun (arrêté ministériel du 11 avril 2019). Est-ce à dire que les violations des droits humains au Cameroun et les inquiétudes profondes de la communauté internationale, caractérisées lundi 13 mai 2019, par une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU sur la crise anglophone et la question des droits de l'homme au Cameroun, n'ont aucune conséquence sur les relations entre la France et le pouvoir politique actuellement en place au Cameroun ? Il souhaite connaître son avis sur le sujet.

Réponse émise le 30 juillet 2019

La France suit avec une grande attention la situation au Cameroun. Elle le fait car le Cameroun est un pays ami, important pour la stabilité de l'Afrique centrale et où se trouvent plus de 6 500 ressortissants français. La situation dans les régions anglophones du Cameroun continue à se dégrader. La France est très préoccupée par cette évolution. Les pertes humaines sont lourdes, la situation humanitaire est critique (35 000 réfugiés au Nigéria et 530 000 déplacés internes) et l'activité économique dans ces régions s'effondre. Dans ce contexte, la France poursuit ses efforts bilatéraux, ainsi qu'en concertation avec ses principaux partenaires, en particulier à Bruxelles et à New York, pour convaincre le gouvernement camerounais de prendre des initiatives en vue d'un réglement politique durable de la crise. Le Conseil de sécurité des Nations unies s'est réuni le 13 mai dernier pour examiner cette crise sous l'angle humanitaire. La Haute-Commissaire aux droits de l'Homme, Michelle Bachelet, s'est rendue sur place du 1er au 4 mai. D'autres instances internationales sont désormais attentives à l'évolution de la situation et certains pays se proposent pour mener des médiations. La France est convaincue que la réponse à la crise n'est pas d'ordre militaire ou sécuritaire, mais bien politique. Tous les canaux de dialogue et de réconciliation doivent être ouverts, et c'est pourquoi elle poursuit ses échanges, en toute franchise, avec les autorités camerounaises. Elle les appelle à lancer un dialogue politique inclusif, à mettre en œuvre des mesures de détente et à approfondir la décentralisation. Par ailleurs, la France suit avec attention la situation de l'ancien candidat à la présidentielle Maurice Kamto, qui a été arrêté le 28 janvier dernier avec près de 200 de ses partisans. La France est très préoccupée par son inculpation mi-février, notamment pour rébellion, insurrection et hostilité contre la patrie. L'opposition camerounaise, dont Maurice Kamto est l'une des figures importantes, doit pouvoir s'exprimer librement, dans le respect de la loi. A cet égard, il est inquiétant que plusieurs centaines de ses sympathisants aient été arrêtés, à l'occasion de marches de soutien dans plusieurs villes du Cameroun.

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