M. Franck Marlin appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences, pour les justiciables, des dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative, tel que modifié par l'article 24 du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016. En effet, cet article prévoit que le juge administratif peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant peut aller jusqu'à 10 000 euros alors que cette somme ne pouvait en aucun cas excéder 3 000 euros. Or depuis cette modification, il est constaté une tendance des juges administratifs à utiliser de plus en plus cette disposition afin de sanctionner au maximum autorisé les justiciables dont les recours sont parfois simplement mal motivés et qui, en tout état de cause, face au problème qu'ils rencontrent, ont recours à la justice pour trancher un litige. Cette tendance lourde visant à punir le justiciable d'avoir recouru à la justice dans un État de droit apparaît en contradiction avec, d'une part, le principe fondamental pour tout citoyen de droit à un recours effectif et à un procès équitable devant un tribunal impartial dans le cadre du droit à une bonne administration, et, d'autre part, le principe de légalité et de proportionnalité des délits et des peines. Aussi, il lui demande si le Gouvernement entend supprimer cet article ou, a minima, s'il entend réduire cette somme de 10 000 à 3 000 euros, comme auparavant, sachant que ce dernier montant est déjà considérable pour un particulier.
L'amende pour recours abusif a été créée en 1956 pour dissuader les administrés de saisir le juge administratif à des seules fins dilatoires ou procédurières. L'appréciation par le juge du caractère abusif d'une requête est soumis au contrôle entier du juge d'appel ou de cassation (CE section, 9 novembre 2007, no 293987). Il a été jugé que cette procédure, qui ne limite pas le droit au recours mais uniquement l'abus de ce droit, n'est contraire ni à la Déclaration des droits de l'homme et de citoyen (CE 18 octobre 2000, no 194029), ni au principe d'un droit au procès équitable posé par l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CE 25 juillet 1986, no 50095). Le montant maximum de l'amende pour recours abusif n'avait pas été revalorisé depuis 1990. Il a été porté à 10 000 € à compter du 1er janvier 2017 pour tenir compte à la fois de l'inflation depuis plus de 25 ans et du constat que le montant de 3 000 € n'était pas suffisant pour dissuader certains requérants, notamment des sociétés commerciales, de former des recours purement dilatoires. Dans la pratique, le nombre d'amendes pour recours abusif reste très faible : du 1er janvier 2017 au 30 septembre 2017, 109 amendes ont été prononcées dont 6 seulement au-dessus de 3 000 euros, sur 142 500 affaires jugées.
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