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Mme Muriel Ressiguier interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur l'importation par la France de gaz naturel liquéfié (GNL) en provenance des États-Unis, qui pour une large part provient de l'exploitation de gaz de schiste. Les conséquences de l'exploitation du gaz de schiste par fracture hydraulique, jugée dangereuse pour l'environnement, sont dramatiques tant sur la pollution des réserves d'eau, l'augmentation des tremblements de terre ainsi que l'émission de gaz à effet de serre. Par ailleurs, les méthaniers, les navires transportant le gaz naturel liquéfié dans les citernes, sont une menace pour l'océan qu'ils traversent. L'approvisionnement en GNL concerne des volumes importants en Europe et en France. L'Union européenne, en particulier, se montre particulièrement accommodante avec les importations de gaz de schiste américain. Un communiqué de presse du 2 mai 2019 de la Commission européenne mentionne le fait que les importations cumulées de GNL américain dans l'Union européenne ont enregistré une augmentation de 272 % depuis 2018. Elles représentaient en mars 2019 un volume de plus de 1,4 milliard de mètres cubes. Cette évolution intervient à la suite de la déclaration conjointe du président Junker et du président Trump à Washington le 25 juillet 2018, qui entendait renforcer la coopération entre l'Union européenne et les États-Unis dans le domaine de l'énergie. Depuis cette déclaration, la part du GNL importé par l'UE est passée de 2,3 % à 12 %. La Commission européenne s'est réjouie de cette hausse, tout en s'engageant à cofinancer des projets d'infrastructures de GNL, d'une valeur globale supérieure à 656 millions d'euros pour augmenter ainsi de 22 milliards de mètres cubes sa capacité de réserve d'ici 2023. Quant à la France, si elle interdit progressivement la recherche et l'exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels, elle importe du GNL des États-Unis de manière insensée. Selon les chiffres de l'agence américaine d'information sur l'énergie, la France a ainsi importé des États-Unis du gaz naturel liquéfié (GNL) en octobre, novembre et décembre 2018 ainsi qu'en janvier et mars 2019 pour un total de plus de 46 millions de mètres cubes. Les entreprises nationales ne sont pas en reste. Ainsi le PDG de Total, M. Patrick Pouyanné, avait déclaré en 2016 qu'interdire l'importation de gaz de schiste américain en Europe serait « une erreur » pour l'industrie européenne. Total a participé par ailleurs au développement d'un terminal de liquéfaction en Louisiane et est engagé dans l'exploration et la production de gaz de schiste dans le bassin de Barnett Shale au Texas et le bassin de l'Utica, dans l'Ohio. Ces choix d'approvisionnement par l'importation de GNL américain semblent incompatibles avec les engagements pris avec l'accord de Paris. À l'heure où l'Agence internationale de l'énergie vient de publier un rapport accablant sur l'énergie et le CO2, on ne peut que déplorer les orientations prises en matière d'investissement de la France et de l'UE. Dans ce rapport est notamment pointé le fait que les émissions de CO2 ont augmenté de 1,7 % en 2018 au niveau mondial, soit 33,1 gigatonnes de CO2. L'idée qui consiste à accroître ce type d'importations pour faire baisser les prix du gaz en provenance d'autres pays fournisseurs de la France et de l'UE, ne peut justifier les dégâts sur l'environnement que provoque l'exploitation du gaz de schiste. Les pays comme l'Algérie, dont le gaz représente 18 % de l'ensemble des importations de gaz en Europe, n'auront pas d'autre choix que de se tourner vers l'exploitation du gaz de schiste. L'idée a d'ailleurs déjà fait son chemin, puisque la compagnie algérienne Sonatrach discute actuellement avec l'entreprise américaine Chevron Corp, afin d'établir un partenariat dans l'exploitation du pétrole et du gaz de schiste. Par ailleurs, l'entreprise suisse Ineos déclare avoir investi 2 milliards de dollars dans le transport du gaz de schiste américain vers l'Europe, expliquant qu'il leur revenait moins cher d'importer du gaz depuis les États-Unis que de l'acheter en Europe. Ce groupe, qui a besoin de gaz éthane, un gaz naturel dérivé du gaz de schiste, pour ses installations de craquage pour pétrole notamment en Norvège, se félicite du prix bon marché du GNL américain. Par conséquent, avec l'explosion de l'exploitation du gaz de schiste aux États-Unis, nombreux sont ceux qui voient en cet hydrocarbure non-conventionnel une source de profit. Dès lors, la France doit sur ce sujet remettre au premier plan la protection de l'environnement en s'engageant dans le refus de l'importation du gaz de schiste et de ses dérivés, et en prônant des investissements à l'échelle européenne et mondiale dans les énergies renouvelables et ainsi en finir avec les énergies fossiles. Dans ces conditions, elle lui demande s'il compte agir pour interdire l'importation du gaz de schiste et de ses dérivés en France ; elle l'interroge également sur les mesures qu'il entend prendre, avec les fournisseurs en gaz naturel de la France, pour que demain le gaz de schiste n'arrive pas en France ; enfin elle l'invite à préciser quelles mesures concrètes il compte mettre en œuvre pour orienter l'investissement de la France vers des énergies renouvelables.
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