M. Raphaël Schellenberger appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la conduite d'enquêtes publiques par un commissaire enquêteur par ailleurs élu au sein d'une collectivité territoriale dont le territoire couvre tout ou partie du périmètre de l'enquête publique. Le champ des projets soumis à enquête publique est varié : projets routiers et ferroviaires, projets liés à la production d'énergie ou installations classées pour la protection de l'environnement. Ces projets émanent de différents acteurs, institutionnels ou privés, et ne peuvent en aucun cas être ceux des commissaires enquêteurs dont l'indépendance et l'impartialité constituent, au même titre que les compétences et qualifications, des exigences à leur nomination par le président du tribunal administratif. À cet égard, il apparaît que la situation de commissaires enquêteurs assumant un mandat d'élu local au sein d'une collectivité dont les compétences s'exercent sur le territoire concerné par l'enquête publique mérite une attention particulière. Il l'interroge donc sur les dispositions envisagées à cet égard pour prévenir tout risque de conflits d'intérêts et garantir l'indépendance et l'impartialité de l'enquête publique.
De nombreux projets, parmi lesquels ceux qui sont susceptibles de porter atteinte à l'environnement, sont soumis à l'exigence de l'organisation d'une enquête publique. Ces enquêtes ont pour objet de recueillir l'avis des personnes concernées par ces différentes opérations mais également d'assurer l'information et la participation du public conformément aux exigences imposées par l'article 7 de la Charte de l'environnement. Les enquêtes publiques sont alors menées par un commissaire enquêteur chargé d'assurer leur bon déroulement. Le rôle du commissaire enquêteur est déterminant pour la bonne conduite de ces enquêtes. Leur désignation est soumise à un régime permettant de s'assurer de leur aptitude à exercer de telles fonctions. Ils sont ainsi désignés au regard de leur compétence et expérience parmi les personnes qui manifestent un sens de l'intérêt général. Les commissaires enquêteurs doivent surtout conduire leur mission en toute objectivité et impartialité (article R123-41 du code de l'environnement). Dès lors, les personnes intéressées à l'opération à titre personnel ou en raison de leur fonction ne peuvent en principe être désignées pour remplir ce rôle. En ce sens, avant toute désignation, chaque commissaire enquêteur indique au président du tribunal administratif les activités exercées au titre de ses fonctions précédentes ou en cours qui pourraient être jugées incompatibles avec les fonctions de commissaire enquêteur et signe une déclaration sur l'honneur attestant qu'il n'a pas d'intérêt personnel au projet (R. 123-4 du code de l'environnement). La détermination de ce que recouvre la notion de personne intéressée au projet relève d'une appréciation subtile du juge administratif. La circonstance qu'un commissaire enquêteur exerce des fonctions d'adjoint au maire dans une commune voisine de celle intéressée par le projet soumis à enquête publique ne peut par exemple suffire à mettre en cause son impartialité dans l'exercice de ses fonctions (CAA Douai, 15 octobre 2015, n° 14DA01524). De même, la seule circonstance qu'un commissaire enquêteur ait exercé, avant son départ à la retraite plus de cinq ans avant le début de l'enquête publique, les fonctions de directeur régional d'un bureau d'études ayant travaillé sur d'autres projets avec le maître d'ouvrage du projet soumis à enquête ne suffit pas à le regarder comme intéressé à ce projet (CE, 22 juillet 2016, n° 390496). A l'inverse, une personne ayant exercé des fonctions depuis moins de cinq ans au sein de la collectivité qui assure la maitrise d'ouvrage, la maitrise d'œuvre ou le contrôle du projet soumis à enquête publique ne peut être désignée comme commissaire enquêteur (article R. 123-4 du code de l'environnement). Ainsi, le dispositif légal et réglementaire actuel encadrant la désignation des commissaires enquêteurs est de nature à garantir, sous le contrôle du juge administratif, l'indépendance et l'impartialité de ces derniers et d'éviter toute désignation susceptible de faire naître un conflit d'intérêt.
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