M. Nicolas Dupont-Aignan appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur le problème posé à tous les justiciables par les dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative, tel que modifié par l'article 24 du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016. En effet, cet article prévoit que le juge administratif peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant peut aller jusqu'à 10 000 euros, alors qu'auparavant cette somme ne pouvait en aucun cas excéder 3 000 euros. Or on constate ces derniers temps une tendance des juges administratifs à utiliser de plus en plus cette disposition afin de sanctionner au maximum autorisé les justiciables dont les recours sont simplement mal motivés et qui, en tout état de cause face au problème qu'ils rencontrent, ont recours à la justice pour trancher un litige plutôt que de se faire justice eux-mêmes. Cette tendance lourde visant à punir le justiciable de l'audace qu'il a eue de recourir à la justice dans un État de droit apparaît en contradiction avec le principe fondamental de tout citoyen au droit à un recours effectif et à un procès équitable devant un tribunal impartial dans le cadre du droit à une bonne administration, ainsi qu'avec le principe de légalité et de proportionnalité des délits et des peines. Aussi, il lui demande s'il entend supprimer cet article indigne d'un État de droit ou, au moins, limiter l'amende maximale à la somme de 3 000 euros, comme c'était le cas auparavant, et qui représente elle-même des frais substantiels pour un particulier.
L'amende pour recours abusif a été créée en 1956 pour dissuader les administrés de saisir le juge administratif à des seules fins dilatoires ou procédurières. L'appréciation par le juge du caractère abusif d'une requête est soumis au contrôle entier du juge d'appel ou de cassation (CE section, 9 novembre 2007, no 293987). Il a été jugé que cette procédure, qui ne limite pas le droit au recours mais uniquement l'abus de ce droit, n'est contraire ni à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (CE 18 octobre 2000, no 194029), ni au principe d'un droit au procès équitable posé par l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CE 25 juillet 1986, no 50095). Le montant maximum de l'amende pour recours abusif n'avait pas été revalorisé depuis 1990. Il a été porté à 10 000 € à compter du 1er janvier 2017 pour tenir compte à la fois de l'inflation depuis plus de 25 ans et du constat que le montant de 3 000 € n'était pas du tout suffisant pour dissuader certains requérants, notamment des sociétés commerciales, de former des recours purement dilatoires. Dans la pratique, le nombre d'amendes pour recours abusif reste très faible : du 1er janvier au 30 septembre 2017, 109 amendes ont été prononcées dont 6 seulement au-dessus de 3 000 euros, sur 142 500 affaires jugées.
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