M. Bruno Nestor Azerot attire l'attention de Mme la ministre des armées sur le fait que la revue stratégique de défense et de sécurité nationale, présentée en conseil des ministres le 18 octobre 2017, fait une large impasse sur la présence stratégique des armées outre-mer sur tous les océans. Pourtant, cette revue confiée à la présidence de M. Arnaud Danjean, député européen, pose bien des problèmes essentiels qui interpellent toute la politique internationale - et ultramarine - française. Elle relève en particulier que l'environnement stratégique actuel est dégradé de manière durable du fait la remise en cause du système international par les stratégies de puissance de certains États. Et ceci sur tout le globe ! De nouvelles formes de conflits émergent par ailleurs : dans un contexte d'enracinement d'un terrorisme islamiste en pleine mutation, le monde connaît une accélération du phénomène de prolifération mais aussi de transformation des conflits ; un risque d'escalade militaire est redevenu possible dans les espaces de conflictualité traditionnels mais aussi dans les espaces numérique et exo-atmosphérique. Pour faire face à ces menaces, la revue expose que la France devra poursuivre une double ambition : renforcer son autonomie stratégique et entraîner ses partenaires pour promouvoir une défense européenne efficace qui passera par le renforcement des fondements industriels et opérationnels ainsi que par la construction pragmatique de la politique européenne de sécurité et de défense. Les armées françaises, expose la revue stratégique, devront ainsi être construites sur un modèle complet et équilibré, ouvert aux coopérations, renforçant les aptitudes clés dans cet environnement stratégique exigeant et s'appuyant sur des personnels compétents et reconnus. Il lui demande en conséquence ce qu'il entend par « un modèle complet et équilibré », et de quelle façon elle compte intégrer les outre-mer de la République dans cette nouvelle configuration, enfin comment celle-ci se manifestera concrètement dans l'élaboration de la prochaine loi de programmation militaire 2019-2025 qui a vocation à en être le socle.
La préservation d'un modèle d'armée complet et équilibré est effectivement indispensable pour assurer à la France son indépendance nationale, son autonomie stratégique, sa liberté d'action et pour lui permettre de faire face à la totalité des menaces auxquelles elle est confrontée. Ce modèle doit disposer de l'ensemble des aptitudes et des capacités nécessaires pour atteindre les effets militaires recherchés dans un contexte opérationnel toujours plus exigeant. A cet égard, les armées doivent pouvoir être engagées, parfois dans des délais très contraints, sur l'ensemble du spectre de la menace et de la conflictualité. Elles doivent ainsi être capables, simultanément, d'assurer les postures permanentes de dissuasion, de sûreté et de protection du territoire national, de conduire des opérations de gestion de crise et de participer à des opérations caractérisées par un niveau d'intensité élevé dans tous les milieux. Dynamique et s'adaptant à l'évolution de la conflictualité, ce modèle traduit notre ambition et notre savoir-faire militaire. Il apporte en outre une légitimité supplémentaire pour générer des partenariats et conforter notre rôle de nation-cadre, en particulier pour ce qui relève des aptitudes militaires à haute valeur ajoutée détenues par quelques rares puissances. La revue stratégique de défense et de sécurité nationale définit ainsi le besoin d'un outil de défense agile, projetable et résilient, dont la mission primordiale demeurera d'assurer la protection des Français et du territoire national, en métropole comme dans les départements, régions et collectivités d'outre-mer (DROM-COM). C'est la nature même du lien fondamental qui unit la République à ses armées. Dans ce contexte, les forces de souveraineté stationnées dans les DROM-COM concourent d'ores et déjà à la protection des Français et des espaces de l'outre-mer, mais également à celle des Français établis à l'étranger (aptitude à conduire d'éventuelles évacuations de ressortissants). Elles participent au soutien de l'action de l'État en mer, prennent part à des exercices militaires interalliés et sont des acteurs importants de la coopération entretenue avec les pays proches de leur zone de responsabilité. Elles mettent en œuvre un ensemble cohérent de capacités interarmées capable d'apporter une première réponse aux principales menaces et aux scénarios de crise ou de catastrophe d'origine naturelle. S'il apparaît légitime de vouloir augmenter la présence des armées et les moyens dont elles disposent dans les DROM-COM afin, notamment, de renforcer la protection et la surveillance de nos zones économiques exclusives ultramarines, il peut être observé que des résultats tangibles ont déjà été obtenus en la matière. Ainsi, le développement du recours aux satellites dans le domaine de la surveillance maritime permet aujourd'hui de mieux cibler l'emploi des moyens d'action dans les vastes espaces sur lesquels la France exerce sa souveraineté. Afin d'harmoniser les besoins et de rationaliser davantage les pratiques des administrations françaises concourant à l'action de l'État en mer dans le domaine de l'emploi des satellites pour la surveillance maritime, l'état-major de la marine a fait réaliser, sur mandat du secrétaire général de la mer auprès du Premier ministre, un démonstrateur dénommé « Trimaran ». Ce démonstrateur prend la forme d'un guichet unique permettant d'accéder à des informations provenant d'un catalogue évolutif de satellites commerciaux. Au terme d'une phase d'expérimentation conduite en divers points du globe, il a été décidé de pérenniser ce dispositif et de l'étendre à l'ensemble des zones maritimes. Le renouvellement des moyens de la marine nationale stationnés outre-mer est d'ores et déjà lancé. Ainsi, le 4ème bâtiment multi-missions (B2M) et un patrouilleur léger guyanais (PLG) seront déployés aux Antilles en 2019. Le renouvellement des autres patrouilleurs positionnés outre-mer sera pris en compte pour sa part dans le cadre de la prochaine loi de programmation militaire (LPM). Enfin, la nécessité de renforcer la surveillance maritime dans les DROM-COM a été soulignée dans la revue stratégique de défense et de sécurité nationale. Les travaux visant à traduire les conclusions de cette revue stratégique en termes budgétaires et capacitaires dans la future LPM sont en cours.
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