M. Stéphane Trompille interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la question de l'accouchement accompagné à domicile (AAD) et des entraves à son développement. L'AAD est un accouchement non médicalisé, se déroulant à domicile et accompagné par une sage-femme. La démarche d'accompagnement est globale et débute en amont de l'accouchement. Comme pour un accouchement en milieu médicalisé, le suivi médical de la grossesse, l'accouchement, ainsi que le suivi post-natal sont assurés par la même sage-femme. Loin d'être un fait isolé, cette pratique est répandue dans plusieurs pays européens, particulièrement aux Pays-Bas où elle est choisie par une femme sur huit. En France, l'AAD représente environ 2 000 naissances par an, représentant environ 0,4 % de l'ensemble des accouchements. Le faible recours à ce droit s'explique, selon les professionnels, par de nombreuses difficultés d'accès et notamment du fait qu'il ne soit pas intégré aux soins périnataux. Les professionnels dénoncent un désinvestissement des pouvoirs publics sur la question de la naissance en dehors de l'hôpital. Tout d'abord, les sages-femmes pratiquant l'AAD doivent obligatoirement souscrire à des assurances dont les tarifs sont jugés prohibitifs et dissuasifs. Le coût élevé de la souscription obligatoire à un contrat d'assurance responsabilité civile (RCP), introduite par la loi 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de soins, a une double conséquence sur l'accès à l'AAD. Premièrement, face à la quasi-impossibilité pour les professionnels de santé libéraux de souscrire à un RCP, le nombre de sages-femmes accompagnant les naissances à domicile est en diminution. Parallèlement, le phénomène des accouchements non accompagnés se développe de façon inquiétante, multipliant les risques pour les mères et les enfants. Or accoucher à domicile constitue un droit fondamental inscrit dans l'article L. 1111-4 du code de la santé publique et rappelé, le 15 décembre 2010, par la Cour européenne des droits de l'Homme. Celle-ci, statuant sur la plainte contre la Hongrie d'une femme (A. Ternovszky) n'ayant pas pu accoucher à domicile du fait des sanctions encourues par les professionnels de la santé en cas de pratique de l'AAD, réaffirmait le recours à l'AAD comme l'exercice d'un droit. En effet, ce droit s'inscrit dans le respect des femmes à accoucher dans les conditions et le lieu qu'elles jugent les meilleurs. Par ailleurs, compte tenu du non-recours à l'hospitalisation et aux coûts relativement faibles de la prise en charge par l'assurance maladie des interventions pour des AAD, le développement de cette pratique représente un intérêt économique certain. Ainsi, il lui demande les mesures envisagées par le Gouvernement afin de faciliter l'accès à l'AAD pour permettre que ce droit devienne réellement effectif.
Moins de 1 % des naissances ont eu lieu hors d'une structure de soins en 2016. Ce pourcentage concerne à la fois les accouchements survenus de façon inopinée hors structure hospitalière et les accouchements à domicile souhaités par les parturientes, ce qui confirme le caractère marginal de ces dernières situations en France. Cette situation s'explique par l'effort important fait depuis plusieurs décennies dans notre pays pour sécuriser la naissance et réduire la mortalité maternelle et néonatale susceptible de survenir à cette occasion. Cette politique, appuyée sur la publication de décrets réglementant l'activité d'obstétrique et de plans périnatalité successifs, a porté ses fruits puisque la mortalité maternelle par exemple, qui s'élevait à 13,2 pour cent-mille femmes en 1996, s'établit aujourd'hui à un taux de 10,3. Cette préoccupation de sécurisation de la naissance continue d'animer la politique gouvernementale actuelle, dans un contexte où les indicateurs de morbi mortalité périnatale sont en stagnation depuis plusieurs années en France et placent notre pays derrière les autres pays européens, comme en témoignent les dernières données de l'enquête Européristat. Aussi, la politique gouvernementale s'attache-t-elle à conforter la place et les conditions de fonctionnement des établissements de santé autorisés à l'activité d'obstétrique, au travers d'un nouveau régime d'autorisation de cette activité qui devrait intervenir d'ici à fin 2020. La demande d'une frange de la population d'avoir accès à un cadre « alternatif » de réalisation des accouchements a toutefois été entendue au travers de l'expérimentation des maisons de naissance, conduite depuis 2013 et traduite par la création de 8 maisons. Ces structures, qui organisent la prise en charge des parturientes en dehors d'un cadre hospitalier et dont le fonctionnement repose exclusivement sur des sages-femmes, libérales ou salariées, sont une forme de réponse à ces demandes, tout en garantissant la qualité et la sécurité des prises en charge indispensables pour ces parturientes. Après un travail d'analyse des résultats obtenus par les maisons de naissance, qui donnera prochainement lieu à la diffusion au parlement d'un rapport d'évaluation, le Gouvernement considère que cette expérimentation est globalement positive et qu'elle apporte une offre complémentaire dans le paysage actuel de l'offre de soins de périnatalité pour les femmes potentiellement éligibles et souhaitant ce type de prise en charge. En conséquence, des travaux vont être engagés pour sécuriser et pérenniser l'offre existante en prenant en compte les résultats de cette évaluation et dans le but de garantir le maintien de la qualité et de la sécurité des soins ainsi que d'améliorer l'efficience du dispositif.
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