M. Jean-Carles Grelier interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les difficultés liées à la démographie médicale. Depuis de nombreuses années, les difficultés que rencontrent les Français pour accéder à la médecine de proximité sont prégnantes et deviennent récurrentes. D'abord circonscrites aux territoires ruraux, elles concernent désormais l'ensemble du territoire national. Les solutions sont, depuis l'origine, laissées à l'initiative des collectivités locales et ne font donc l'objet d'aucune harmonisation nationale, l'État se contentant de soutenir financièrement les actions locales. L'une des causes majeures de ces difficultés tient dans l'absence de dispositif de répartition des médecins généralistes sur le territoire. Dans le strict respect de la liberté d'installation laissée aux praticiens, le ministère des solidarités et de la santé ne pourrait-il pas saisir les partenaires sociaux administrateurs de la caisse nationale d'assurance maladie pour que soit acté le principe d'un conventionnement exclusif des médecins dans les zones et spécialités définies comme prioritaires par les agences régionales de santé ? Il lui demande sa position sur cette question.
Le Gouvernement partage l'inquiétude des élus et des patients face aux difficultés d'accès aux soins sur de nombreux territoires. Pour remédier à ces difficultés, le premier ministre et la ministre en charge de la santé ont présenté dès le mois d'octobre 2017 un plan ambitieux pour favoriser la coopération et libérer du temps médical. De nouvelles mesures ont également été annoncées par le Président de la République lors de la présentation du plan "Ma Santé 2022". En ce qui concerne le conventionnement sélectif, le Gouvernement estime que ce n'est pas la bonne solution pour de multiples facteurs. La première limite est le fait que l'installation en libéral du professionnel de santé n'est pas son seul choix possible : plus de la moitié des médecins en exercice sont salariés, soit des établissements de santé, soit de structures de soins ambulatoires, soit de différents types d'organisme. Rendre coercitive l'installation rendra moins attractive l'activité libérale qui est souvent considérée, sauf pour quelques spécialités, comme peu attractive déjà. Par ailleurs, la coercition ne peut être une solution pour les zones sous dense que pour des professions avec une démographie dynamique. Aujourd'hui, en France, en libéral, il n'y a pas de remplacement de l'ensemble des médecins qui partent à la retraite. Interdire le remplacement de médecin existant sous prétexte de rééquilibrage démographique devrait poser des difficultés d'accès aux soins à leur patientèle actuelle. En général, dans les dispositifs coercitifs, les remplacements dans les zones denses sont acceptés et ce sont les excès d'installation qui devraient permettre le rééquilibrage. La coercition peut générer des stratégies d'évitement, lesquelles conduisent au bout du compte à passer à côté de l'objectif visé : o Installation des médecins à la frontière des zones où l'installation est proscrite o Aucun report d'installation des médecins dans les zones sous-denses ; o Découragement à l'installation et préférence pour le remplacement ; o Détournement des médecins vers des spécialités pour lesquelles ces mesures n'existent pas, voire à terme perte d'attractivité des études médicales parmi les jeunes étudiants. Enfin, la coercition requiert de définir de manière normative ce qu'on entend par territoire sur-dense puisqu'on ne sait pas dire de manière absolue quel est le bon niveau d'offre de soins. Le critère est donc forcément un critère statistique : un territoire sera considéré comme sur-dense s'il fait partie des X % de territoires les plus denses. Autant cette approche est acceptable pour orienter les aides à l'installation dans les territoires sous-denses, autant elle plus problématique quand il s'agit de définir les territoires dans lesquels l'installation n'est pas possible, comme le montre les débats dans plusieurs pays dans lesquels des dispositifs coercitifs existent.
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