Mme Danièle Cazarian attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'offensive menée par l'armée turque contre les forces kurdes en Syrie. Après l'annonce du retrait des troupes américaines du nord-est de la Syrie par Donald Trump, la Turquie a lancé une offensive contre les Kurdes de l’YPG, qu'elle considère comme terroristes. Ces mêmes kurdes de l’YPG, composante des Forces démocratique syriennes, ont grandement contribué à la protection des minorités persécutées dans la région depuis leur victoire sur les djihadistes de l'État Islamique (EI), en mars 2019. Le retrait des troupes américaines et le manque de fermeté des grandes puissances mondiales, ont laissé au président Erdogan la possibilité d'envahir une région stratégique pour lui. Selon de nombreux médias, cette invasion terrestre de la Syrie par la Turquie serait accompagnée de bombardements sur des villages, des hôpitaux et plus largement sur des positions habitées par des civils. De plus, des soldats turcs et leurs supplétifs commettraient ce qui pourrait s'apparenter à des crimes de guerre sur des civils kurdes et syriens. Cette information a été confirmée par le département de la défense américain. En outre, des journalistes sur place affirment avoir été visés par des bombardements turcs et ont quitté les zones de combat, tout comme les milliers de civils qui fuient actuellement leurs terres, déplacés par l'attaque des troupes d'Erdogan. Elle l'interroge donc sur les moyens que la France compte mettre en œuvre pour apporter une aide humanitaire aux milliers de civils blessés et aux alliés kurdes, et lui demande comment la France envisage le futur de sa coopération militaire avec la Turquie dans le cadre de l'OTAN.
La France a fermement condamné l'intervention militaire de la Turquie qui a profondément déstabilisé le Nord-est syrien et menace ainsi de remettre en cause les gains que la France a obtenus, avec la Coalition internationale et ses partenaires des Forces démocratiques syriennes, dans la lutte contre Daech. L'ensemble des États membres de l'Union européenne ont fait de même en exprimant une position unie à ce sujet à l'occasion du sommet européen des 17-18 octobre 2019. L'intervention unilatérale de la Turquie a également créé une grave crise humanitaire et rendu plus difficile encore la recherche d'une solution politique au conflit syrien, sans laquelle il n'y aura ni réconciliation entre les différentes composantes de la société syrienne, ni possibilité pour les minorités de vivre sereinement dans ce pays. Face à la dégradation rapide de la situation humanitaire et aux déplacements de population massifs qu'a entraînés l'offensive turque, la France a mobilisé une aide d'urgence de 10 millions d'euros qui a notamment permis de contribuer à la prise en charge des déplacés. La France est également attentive à la situation dans la zone à présent occupée par les forces turques et leurs supplétifs, qui doivent respecter en toutes circonstances les droits des populations locales, y compris en s'abstenant de toute réinstallation massive de réfugiés originaires d'autres régions de Syrie. Les événements qui se sont produits dans le Nord-est syrien depuis le début du mois d'octobre rendaient par ailleurs nécessaire une clarification entre alliés, dans le cadre de la Coalition internationale comme dans le cadre de l'OTAN. Il était nécessaire et urgent de mettre en place un dialogue renforcé pour éviter toute résurgence de Daech. A la demande de la France, une réunion exceptionnelle des ministres des affaires étrangères du groupe restreint de la Coalition s'est tenue le 14 novembre 2019 et a permis d'obtenir les clarifications attendues concernant la poursuite de l'engagement civil et militaire de ces pays contre Daech, y compris dans le Nord-est syrien. En marge du sommet de l'OTAN à Londres, le 4 décembre 2019, le Président de la République a engagé avec ses homologues allemand et britannique et le Président Erdogan un dialogue franc et exigeant. En Syrie, les Forces démocratiques syriennes (FDS), notamment kurdes, ont été en première ligne dans le combat contre Daech et demeurent un partenaire indispensable pour éviter la résurgence de ce groupe terroriste. La France ne l'oublie pas.
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