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Florence Lasserre
Question N° 24348 au Secrétariat d'état Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire


Question soumise le 12 novembre 2019

Mme Florence Lasserre-David interroge Mme la secrétaire d'État, auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, sur l'obligation, pour les collectivités ayant opté pour le tri mécano-biologique, avant l'entrée en vigueur de la loi pour la transition énergétique et pour la croissance verte (LTECV) du 17 août 2015, de proposer également des solutions de tri à la source. Le tri mécano-biologique permet, à partir d'un flux d'ordures ménagères résiduelles (OMR), de séparer la fraction fermentiscible afin de la valoriser, soit par compostage, soit par méthanisation. La partie non fermentiscible peut, quant à elle, être enfouie ou transformée en combustible solide de récupération pour être utilisée dans les chaudières industrielles ou, comme c'est aujourd'hui le plus souvent le cas, en cimenterie. Avec l'adoption de la loi de 2015 précitée, la France s'est fixée un objectif de généralisation du tri à la source des biodéchets d'ici 2025. L'Europe, en révisant la directive européenne sur les déchets en mai 2018, a confirmé cette obligation en prévoyant une échéance plus courte fixée au 31 décembre 2023. À l'occasion d'un contentieux, les juridictions administratives de premier et second degrés ont conclu que les dispositions du code de l'environnement issues de la LTECV accordaient une préférence « à la généralisation du tri à la source [qui] doit, en principe, conduire l'autorité administrative à rejeter les demandes d'autorisations de nouvelles installations de tri mécano-biologique » (CAA Bordeaux, 14 novembre 2017, n° 16BX00688, 16BX00690, 16BX00699 et 16BX00700). Dans sa récente décision du 26 juin 2019, à l'occasion du recours en cassation dans cette même affaire, le Conseil d'État a censuré la décision des juges du fond au motif que la prohibition du tri mécano-biologique ne pouvait pas s'appliquer aux unités mises en services avant la promulgation de la loi de 2015. Dans un considérant limpide les juges du Palais Royal ont précisé qu' « il résulte des termes du I de l'article L. 541-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015, éclairés par les travaux parlementaires ayant conduit à l'adoption de cette loi, que le législateur n'a entendu viser que la création, postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi, des nouvelles installations de tri mécano-biologique d'ordures ménagères. Il s'ensuit que les objectifs ainsi fixés par la loi ne sauraient, en tout état de cause, s'appliquer à des installations de tri ayant été autorisées avant le 19 août 2015, date d'entrée en vigueur de la loi du 17 août 2015 ». Il ressort donc de cette jurisprudence que si les unités futures sont proscrites, les unités anciennes peuvent continuer à fonctionner. Elle souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement concernant l'obligation, ou non, pour les collectivités équipées d'une unité ancienne de tri mécano-biologique, de proposer des solutions de tri à la source.

Réponse émise le 12 mai 2020

La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) a donné, pour le tri à la source des biodéchets, une orientation très claire, en prévoyant la généralisation du tri à la source des biodéchets partout en France d'ici à 2025, pour les particuliers comme pour les entreprises. Si la loi n'interdit pas aux installations existantes de fonctionner, elle est donc très claire sur l'objectif de généraliser le tri à la source sur l'ensemble du territoire, et sur la fin de la production de compost par ces installations en 2027. L'arrêt du Conseil d'Etat de juin 2019 précise uniquement que la non-pertinence des nouvelles installations de tri mécano-biologique prévues par la LTECV ne concernait pas les installations existantes : il ne concerne pas l'obligation de déploiement du tri à la source. La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, qui vient d'être adoptée par l'Assemblée nationale et par le Sénat, confirme cette obligation de généralisation du tri à la source et l'avance au 31 décembre 2023, en conformité avec la directive cadre relative aux déchets révisée. Ce tri à la source généralisé peut se faire selon diverses solutions techniques, qui peuvent être combinées entre elles, au choix de chaque collectivité : collecte séparée des biodéchets, compostage domestique, compostage partagé. L'objectif de la loi est qu'un tri à la source des biodéchets efficace, généralisé dans les territoires, soit pleinement mis en œuvre au 31 décembre 2023. La jurisprudence récente a confirmé que la seule mise à disposition de composteurs domestiques ne peut être considérée comme correspondant à la mise en place d'un tri à la source et que la démarche doit correspondre à un programme complet avec un accompagnement dans le temps qui puisse prouver une certaine efficacité. L'expérience montre par ailleurs les limites des installations de tri mécano-biologique, ce procédé ne permettant pas systématiquement la production d'un compost de qualité, à l'inverse du tri à la source qui permet d'assurer une excellente qualité des composts et donc un retour au sol de haute qualité. De plus, les installations industrielles de tri mécano-biologique d'ordures ménagères résiduelles sont susceptibles de décourager le déploiement par les collectivités du tri à la source des biodéchets. Ainsi, depuis de plusieurs années, l'ADEME, les différents services de l'État, et plus généralement la plupart des autres pays européens ont émis des réserves vis-à-vis de tels procédés. En conséquence, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire interdit la création de nouvelles capacités d'installations de tri mécano-biologique en l'absence d'un tri à la source généralisé, et interdit la production de compost à partir de la fraction fermentescible des déchets issue des installations de tri mécano-biologique à compter du 1er janvier 2027. Il n'apparaît donc pas possible de prévoir de dérogation spécifique au tri à la source des biodéchets au-delà de l'échéance du 31 décembre 2023. En revanche, la reconversion au cas par cas des installations de tri mécano-biologique peut être une piste intéressante, pour les territoires qui le souhaite, sous réserve d'une étude spécifique de l'intérêt technique et économique pour chaque territoire. En particulier, sur le plan technique, le pré-traitement par tri et stabilisation permet de réduire les quantités de déchets éliminées tout en extrayant davantage de matériaux qui peuvent être orientés vers le recyclage et/ou la fabrication de combustibles solides de récupération. Ce type d'installation est déjà utilisé en France avec succès. Une autre possibilité est la reconversion des équipements de traitement de la matière fermentescible issue des installations de tri mécano-biologique, ces dernières pouvant, dans certains cas, être reconverties pour valoriser exclusivement des biodéchets triés à la source. Les collectivités concernées peuvent se rapprocher de l'ADEME qui pourra apporter son expertise.

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