M. Gabriel Serville alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la situation inquiétante en Guyane concernant les internements psychiatriques sous contrainte. D'après les statistiques de l'année 2018 communiquées par la commission départementale des soins psychiatriques, 94 % des internements sans consentement décidés par les directeurs d'établissements sont des mesures d'urgence ou de péril imminent, ce alors même que la loi précise qu'elles doivent rester exceptionnelles. Ainsi, entre 2008 et 2018, on est passé en Guyane de 5 à 285 internements sans consentement décidés par les directeurs d'établissement pour mesures d'urgence ou de péril imminent soit + 5 600 % ! Ces chiffres interviennent alors que dans un rapport rendu public le 25 octobre 2019, le contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), après avoir effectué une visite du pôle de psychiatrie et du service des urgences du centre hospitalier Andrée-Rosemon (Char) à Cayenne, pointe « des pratiques illégales et abusives d'isolement », « l'absence d'évaluation de ces pratiques professionnelles, du registre de l'isolement et de la contention » et « des pratiques forcées de traitements par injections en l'absence de recherche de consentement du patient ». Déjà dans son rapport d'activité 2018, la CGLPL dénonçait, pour l'ensemble du territoire national cette fois, le recours abusif à la contention et l'isolement, le non-respect de la dignité et des droit fondamentaux en psychiatrie. Aussi, il lui demande de le rassurer quant aux mesures prisent pour assurer la stricte application de la réglementation, que ce soit en Guyane comme au niveau national et le respect des droits fondamentaux des patients.
Le consentement aux soins est un principe fondamental du droit de la santé. Cependant, l'une des manifestations de la maladie mentale peut être, pour la personne en souffrance, l'ignorance de sa pathologie et l'incapacité à formuler le besoin d'une prise en charge sanitaire. Ainsi, afin de garantir un accès aux soins aux personnes se trouvant dans cette situation, un dispositif d'encadrement rigoureux, des « soins psychiatriques sans consentement », conciliant tant le besoin de soins, la sécurité des patients et des tiers, que le respect des droits des personnes malades, a été conçu. Le Gouvernement est particulièrement attaché au respect des conditions légales d'admission et de maintien au sein du dispositif de soins sans consentement. Celles-ci imposent notamment que, lorsqu'une personne fait l'objet de soins psychiatriques sans consentement, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles soient justifiées médicalement, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en œuvre du traitement requis. Des garanties importantes existent à cet égard. Le juge des libertés et de la détention exerce un contrôle systématique de toutes les mesures de soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète, avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de l'admission du patient, puis d'un délai de six mois. De plus, dans chaque département, une commission départementale des soins psychiatriques est chargée d'examiner la situation des personnes en soins psychiatriques sans consentement. S'agissant plus spécifiquement des admissions dans le cadre de la procédure dite de péril imminent, c'est-à-dire en l'absence de tiers, celles-ci ne doivent pas nécessairement être considérées comme péjoratives. En effet, l'absence de tiers recouvre deux situations distinctes. La première concerne des patients isolés en faveur desquels aucune personne ne peut intervenir. La seconde concerne des patients pour lesquels, alors même qu'il existe des membres de la famille ou des proches à même d'agir en tant que tiers, ceux-ci peuvent choisir de ne pas faire de demande de soins psychiatriques afin de ne pas altérer leurs relations ultérieures avec le patient. Les mesures prises en l'absence de tiers font l'objet d'une vigilance particulière de la part des commissions départementales des soins psychiatriques qui doivent obligatoirement examiner la situation des patients concernés avant l'expiration d'un délai de trois mois à compter de leur admission, puis au moins une fois tous les six mois. Par ailleurs, la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 a introduit l'article L.3222-5-1 au code de la santé publique qui dispose que l'isolement et la contention sont des pratiques devant être utilisées en dernier recours et énonce clairement un objectif d'encadrement et de réduction de ces pratiques. Cette disposition s'inscrit dans le cadre d'une politique déterminée de prévention, de réduction et de contrôle des pratiques d'isolement et de contention partagée au niveau européen. En outre, comme le prévoit l'action n° 22 de la feuille de route de santé mentale et psychiatrie du 28 juin 2018, le Gouvernement met en œuvre un plan d'actions visant la réduction du recours aux soins sans consentement, et en particulier la réduction du recours aux mesures d'isolement et de contention dans les établissements.
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